La Cour suprême du Burundi a condamné l’ancien président burundais Pierre Buyoya, ainsi que 18 autres proches à la perpétuité, pour l’assassinat du président Melchior Ndadaye qui a plongé le pays dans une décennie de guerre civile qui a fait plus de 300 000 morts. 

Il y a près de 27 ans jour pour jour, le 21 septembre 1993, Melchior Ndadaye, le premier président hutu du Burundi démocratiquement élu, était assassiné. L’ancien président Pierre Buyoya, aujourd’hui Haut Représentant de l’Union africaine au Mali et au Sahel est condamné par contumace à la prison à perpétuité, pour « attentat contre le chef de l’État, contre l’autorité de l’état et attentat tendant à porter le massacre et la dévastation ».

Dix-huit autres personnalités de la haute administration burundaise de son époque, militaires et civils, sont condamnés à la même peine, alors que trois autres écopent de 20 ans de prison pour « complicité » pour les mêmes crimes. Un seul accusé, l’ancien Premier ministre de transition Antoine Nduwayo est acquitté. Seuls cinq de ces personnalités, dont quatre anciens hauts gradés de l’armée en prison depuis près de deux ans, étaient dans le box des accusés pour ce procès qui s’est tenu à Gitega de novembre 2018 à septembre dernier. Tous les autres dont Pierre Buyoya vivent à l’étranger et sont visés par des mandats d’arrêt internationaux.

Un verdict en l’absence des accusés

Les 21 prévenus sont également condamnés à payer solidairement à l’État burundais l’équivalent de 45 millions d’euros « à titre de dédommagement matériel et moral ». Le gouvernement compte se payer sur la vente de tous leurs biens au Burundi qu’il a saisis il y a deux ans.

Le verdict a été rendu mardi en l’absence des accusés et de leurs avocats qui n’avaient pas été prévenus. L’un d’eux dénonce un « procès inique qui a violé le droit burundais ainsi que l’Accord de paix pour le Burundi », signé en 2000 à Arusha et qui avait décrété une immunité pour tous les protagonistes du conflit burundais.  Une des personnalités condamnées dans ce procès dénonce « une revanche ethnique de la part d’un pouvoir devenu dictatorial ».

Pour la société civile en exil, ce verdict rendu quatre mois après l’intronisation du général Evariste Ndayishimiye à la tête de l’Etat est la preuve que l’heure est toujours à « la répression ».

Un haut cadre du parti au pouvoir lui se réjouit d’un « procès historique qui répare une injustice ». « La condamnation de Pierre Buyoya et d’une vingtaine de ses proches dont des membres de l’ancienne oligarchie militaire tutsi est un message fort à la population burundaise que justice est enfin rendue ». Jusqu’ici, seuls une dizaine d’« exécutants » dont le plus haut gradé était lieutenant avaient été condamnés en 1998 pour l’assassinat du président Ndadaye.