L’attaque djihadiste qui a frappé le week-end dernier la ville de Seytenga dans le nord du Burkina Faso a fait au moins 79 morts et plus de 16.000 déplacés internes, a indiqué vendredi l’Agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR), appelant à « un soutien urgent pour aider ces nouveaux déplacés qui ont fui un massacre ».
Le HCR s’est alarmé de la récente escalade de la violence contre les civils par des groupes armés au Burkina Faso qui a forcé des milliers de personnes à fuir, mettant les ressources humanitaires sous pression alors que l’insécurité continue de sévir dans le Sahel central.
Depuis le 12 juin, près de 16.000 Burkinabé, principalement des femmes et des enfants, sont arrivés à Dori, dans l’est du Burkina Faso. L’attaque de Seytenga a été condamnée par la communauté internationale, le Secrétaire général de l’ONU António Guterres la qualifiant dans un communiqué d’« épouvantable ».
« Ces civils ont fui après une attaque brutale d’hommes armés à Seytenga, une ville située à 15 kilomètres de la frontière avec le Niger », a déclaré lors d’un point de presse régulier de l’ONU à Genève, Matthew Saltmarsh, porte-parole du HCR, relevant que d’autres personnes devraient arriver dans les jours à venir dans cette localité.
L’incident le plus meurtrier depuis le massacre de Solhan
Dans le même temps, d’autres civils ont même franchi les frontières internationales du Burkina Faso. A ce stade, le HCR note que près de 360 personnes auraient traversé la région de Tillabéri au Niger, s’ajoutant aux 15.500 ressortissants burkinabé qui s’y trouvaient déjà et qui ont été forcés de fuir.
« Les autorités et la population locale de la ville de Tera ont accueilli et hébergé les nouveaux arrivants, même si la plupart des familles nigériennes sont elles-mêmes sans ressources », a ajouté M. Saltmarsh.
Depuis 2015, à l’instar de ses voisins nigérien et malien, le Burkina Faso est visé par des groupes affiliés à Al-Qaïda ou à l’organisation Etat islamique (EI). La dernière attaque a eu lieu dans la nuit du 11 au 12 juin. Selon le HCR, au moins 79 personnes ont été tuées par des hommes armés au cours de cet assaut, mais certains médias font état d’un bilan encore plus lourd, a fait valoir le porte-parole du HCR. Divers bilans des médias font état d’au moins 86 morts. Pour l’ONU, il s’agit de « l’incident le plus meurtrier au Burkina Faso depuis le massacre de Solhan en juin 2021, qui a fait plus de 130 morts ».
La ville de Dori abrite près de 76.000 déplacés burkinabés et 20.000 réfugiés maliens
Sur le terrain, les nouveaux arrivants à Dori ont raconté aux équipes du HCR que des hommes armés faisaient du porte-à-porte pour rechercher et tuer des hommes adultes. Cela signifie que beaucoup ont été témoins de la mort de leurs maris ou de leurs pères. « Près des deux tiers des personnes qui ont fui la Seytenga ont moins de 18 ans », a détaillé M. Saltmarsh.
Beaucoup ont été hébergées par la communauté d’accueil et par des familles déplacées résidant déjà à Dori, tandis que d’autres ont trouvé un espace dans des centres d’accueil et de transit pour réfugiés. Mais des centaines de personnes dorment à la dure au bord de la route. Avec ces vagues successives de déplacement, la ville de Dori a été multipliée par cinq. Elle abrite aujourd’hui près de 76.000 déplacés burkinabé, ainsi que quelque 20.000 réfugiés maliens.
Face à cet afflux, les autorités régionales, avec le soutien des organisations humanitaires, ont commencé à reloger les familles dormant dans la rue sur trois sites existants à Dori pour les réfugiés et les déplacés internes, tandis que des parcelles supplémentaires ont été identifiées pour accueillir les futurs arrivants potentiels.
« Le HCR s’efforce également d’identifier les nouveaux arrivants ayant des besoins de protection, comme les enfants et les survivants de violences sexuelles et sexistes, et de leur permettre d’accéder à des soins appropriés », a fait remarquer M. Saltmarsh.
La crise de déplacement interne la « plus rapide au monde »
Depuis 2015, les attaques attribuées à des groupes djihadistes ont fait des milliers de morts et près de deux millions de déplacés au Burkina. Selon le HCR, la crise du déplacement au Burkina Faso est l’une de celles qui se développent « le plus rapidement dans le monde ».
Le nombre de déplacés internes a ainsi atteint 1,9 million à la fin du mois d’avril, selon les chiffres du gouvernement. D’autres pays du Sahel – le Tchad, le Mali et le Niger – sont également confrontés à une combinaison de violence, de pauvreté et d’effets du changement climatique. Plus de 2,5 millions de personnes ont fui leurs foyers dans la région du Sahel au cours de la dernière décennie. Au Burkina Faso, les besoins les plus urgents concernent des abris et des articles essentiels, des services d’eau, d’assainissement et d’hygiène, ainsi qu’un soutien psychosocial.
« Cependant, des groupes armés non étatiques ont attaqué les approvisionnements en eau et les infrastructures dans le pays, y compris une attaque récente sur l’approvisionnement principal en eau de Dori, et les besoins en eau, assainissement et hygiène pourraient augmenter rapidement », a regretté le porte-parole du HCR. Malgré ces besoins aigus et croissants, l’appel de fonds de 110 millions de dollars pour 2022, n’est à ce jour financé qu’à hauteur de 20%.
Source: ONU