Pour sensibiliser, informer et former les hommes de médias sur le blanchiment de capitaux, ses causes et impacts sur l’économie du pays et le financement du terrorisme, les responsables de la Cellule nationale de traitement des informations financières (Centif) ont initié, vendredi 26 juin, une séance de formation. L’enceinte de l’Assep a abrité l’évènement.
L’évènement a enregistré la présence de l’ex-ministre Marinpa Samoura, président de la Centif, le colonel Mamadou Sangaré, membre de la cellule… Pour le président, « nous sommes actuellement confrontés à ces deux phénomènes (blanchiment d’argent et financement du terrorisme) ». M. Samoura rappelle que le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sont en train de déstabiliser nos économies et les institutions. À le croire, le blanchiment d’argent ou de capitaux tue l’économie du pays, entrave l’émergence et le progrès d’une Nation et empire le chômage, la pauvreté, la mal gouvernance, l’injustice. Au Mali, la structure chargée de lutter contre le blanchiment de capitaux est la Centif. Ce qui amène M. Samoura à donner cette définition : le blanchiment d’argent consiste à transformer ou recycler l’argent sale en argent propre. L’ex-ministre estime que peu de gens connaissent ce que c’est que le blanchiment de capitaux.
D’où la raison de cette séance de formation pour les hommes de médias. Aussi a-t-il précisé qu’après avoir obtenu cet argent sale, les gens se livrent à des constructions d’immeubles, de bâtiments, d’entreprises, ou de financement du terrorisme. Au nombre de cinq (5), les responsables de la Centif expliquent en clair le sujet d’actualité : « Le blanchiment sert à dissimuler la provenance d’argent obtenu par des moyens illicites. Il s’agit d’un argent issu d’activités illégales dont les plus lucratives restent : le trafic de drogue ; d’armes ; de déchets nocifs, de faux médicaments ; la prostitution ; la surfacturation, la corruption, la fraude fiscale, la mafia ou tout fric obtenu suite à la commission d’une infraction criminelle ou délictuelle ».
Pour l’occasion, l’ex-ministre a rappelé l’historique du vocabulaire blanchiment : « En Amérique, il y avait un grand bandit en la personne d’Al Capone. Pour ramasser de l’argent, celui-ci ne faisait que de la vente de drogue. Pour masquer l’origine de la provenance de sa fortune, ce bandit avait ouvert des blanchisseries un peu partout en Amérique. Lorsque les gens lui demandaient comment il gagne son argent, Al Capone disait qu’il a des blanchisseries en Amérique. D’où l’origine du mot blanchiment dans les années 1930 ».
Cependant, c’est en 1989 que les ministres des Finances des pays les plus industrialisés qui se sont rendu compte de l’impact du blanchiment d’argent sur la vie économique, expose Marinpa, rappelant qu’en vue de lutter contre ce fléau, le Gafi (groupe d’action financière) a adopté, en 1990, 40 recommandations qui s’imposent à tous les pays du monde.
Il y a blanchiment d’argent, ajoute Marinpa, lorsque l’argent est issu du vol, l’exploitation sexuelle, la traite humaine, la fraude, le détournement des biens, l’enlèvement, la séquestration, la contrebande, la piraterie, l’extorsion…. D’après lui, le blanchiment constitue « le crime des crimes aujourd’hui ». Ce n’est pas avec l’argent propre qu’on finance le terrorisme, ça se fait avec l’argent sale, souligne-t-il.
Le président de la cellule trouve important à ce qu’on mise, au-delà des chars et des matériels de combat, sur l’aspect financier pour lutter contre le terrorisme. « Un combat se fait par des matériels de guerre, mais il s’effectue aussi par des moyens financiers », a-t-il enchainé, expliquant qu’il faut, de nos jours, barrer la route aux auteurs et complices du blanchiment de capitaux qui sont les financiers du terrorisme.
De son côté, le colonel Mamadou Sangaré explique les phases du blanchiment : le placement, l’empilement et l’intégration. La centif travaille en collaboration avec la Police, la Gendarmerie, la Douane, la justice. Elle ne peut convoquer ses suspects ni les placer en détention. Son rôle se limite à des enquêtes discrètes. De 2008 à nos jours, elle a pu transmettre 55 rapports au procureur de la commune VI de Bamako, compétent en la matière. De nos jours, les défis de la Centif restent nombreux : manque d’expertise, de moyens, de budget nécessaire et d’une franche collaboration des banques et autres corporations. Plus de 3000 ONG soumises à aucun contrôle se trouvent actuellement dans notre pays, déplore le président Marinpa.
Mamadou Diarra
Le Pays