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Autrement dit : Le Mali aux trois visages

Ceux qui s’inquiétaient de la menace de partition, qui pesait sur notre pays, n’ont, désormais, que leurs yeux pour pleurer. Même si, officiellement, le Mali reste une seule et unique entité en termes de limites géographiques, force est de reconnaître que le pays est de fait constitué de trois entités : le nord, le sud et le centre.

Au nord, on constate une absence totale de l’Etat et les populations commencent, désormais, à s’y accommoder. Dans certaines localités, l’Etat n’existe, quasiment, plus et dans certaines, elle a, totalement, plié bagage. Si à Gao, on constate un semblant d’Etat, à Kidal et d’autres zones, aucun signe du Mali, aucune présence de l’Administration. Malheureusement, cette situation ne dérange personne au sommet de l’Etat, où on se comporte comme dans un pays normal.

Au centre, dans la région de Mopti, c’est le véritable Far-West. L’Etat existe là où il peut. Contrairement à Kidal où le gouverneur a pris ses quartiers et donc totalement déménagé à Gao, jusqu’à la semaine dernière, celui de Mopti était sur place, avec tous les autres services administratifs. Malheureusement, ça s’arrête là.

Au-delà du chef-lieu de région, c’est l’anarchie totale, chacun fait ce qu’il veut et se défend comme il peut. Tous les matins se créent, au vu et au su de tous, des milices et des groupes d’autodéfense qui règnent en véritables seigneurs de guerre sur presque tout le territoire de la région de Mopti.

Ce sont ces milices et groupes armés qui font et défont la loi dans le centre du pays, tuent, rançonnent, volent et pillent impunément. Il ne se passe pas un seul jour sans qu’au moins, une seule personne ne soit tuée dans cette zone, et c’est lorsque le bilan dépasse la dizaine, que l’on s’émeut. Sinon, à Mopti et environs, la mort est devenue banale. Les gens sont égorgés chez eux, en ville, en brousse et, même, en plein marché. C’est aussi cela un autre visage du «Grand Mali qui avance».

Le plus laid visage de ce Mali, c’est le Sud. Ici, tout va bien. Tant qu’on peut tranquillement circuler, vaquer à ses occupations, faire la sourde oreille aux critiques, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Vous pouvez exterminer à Koulongo, piller des greniers à Ogossagou, brûler vifs des habitants de Sobane-da. Tant qu’à Bamako, les choses se passent bien, les rues y restent bruyantes, le pont Fadhvit tous les jours ses bouchons-monstres ; tant que le président de la République, le Premier ministre et les ministres peuvent, tranquillement et librement circuler, inaugurer des chrysanthèmes, passer des marchés, offrir des cadeaux à coup de millions à qui (suivez mon regard) ils veulent, tout va bien. Le reste du pays les préoccupe si peu qu’ils organisent des fêtes au bord du fleuve et à Bougouni, pendant que le Mali et les Maliens brûlent.

 

Makan Koné 

Nouvelle Libération

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