Le second tour de l’élection, qui se tient ce dimanche, doit départager le président sortant Ibrahim Boubacar Keita de son rival Soumaïla Cissé. Ce duel attendu peine à passionner des électeurs désabusés alors que les islamistes armés ont menacé de perturber le processus.
La campagne du second tour a été brève et sans grand enthousiasme. Deux petits jours pour convaincre des Maliens de se mobiliser. Désabusés de la politique, les électeurs ne montrent guère de passion à départager le président sortant, Ibrahim Boubacar Keita, dit IBK, et Soumaïla Cissé, une affiche qui est la réplique parfaite de celle de 2013.
Sans l’avouer, beaucoup redoutent que ce dimanche, jour du vote, le duel annoncé du second tour débouche surtout sur une abstention record. D’autant que IBK avance en position de force avec ses 41,7 % des voix gagnées lors du premier tour du 29 juillet. Son rival, Soumaïla Cissé (17,8%) veut pourtant y croire. Il se dit «convaincu de pouvoir renverser la tendance».
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Pour relever ce défi, ce que bien peu d’analystes pensent possible, Soumaïla Cissé affirme que son score ne reflète pas la réalité. Selon lui une fraude massive a biaisé les chiffres. «Quand vous avez des centres où il y a 9898 votants pour le président, une voix pour moi et zéro pour tous les autres candidats, on doit s’interroger, détaille-t-il. Quand le président fait des progressions de plus de 80% dans certains fiefs dans le Nord, on doit s’interroger». Dans le camp présidentiel, on réfute ses arguments. «L’élection a été parfaitement transparente», affirme Mouhammadou Camara, un conseiller d’IBK qui s’avoue «très serein».
Participation anormalement élevée
Les missions d’observations partagent cependant certains doutes. Le Pocim, une association nationale, souligne ainsi une participation anormalement élevée dans le nord du pays, parfois plus de 80% alors qu’elle n’est que 43% en moyenne. Il s’étonne aussi que les résultats n’aient été diffusés qu’à l’échelle nationale, empêchant toute vérification. L’association n’est pas la seule à mettre en avant des «incohérences». Mesurée, la mission d’observation de l’Union européenne a réclamé davantage de «transparence». Ce communiqué, pourtant bien poli, a engendré un sévère et rare rappel à l’ordre du ministère malien des Affaires étrangères, qui a enjoint l’UE à ne pas «entraver le processus électoral».
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Soumaïla Cissé va devoir aussi faire face à un autre obstacle. Alors qu’il avait appelé à un large «front démocratique» derrière lui pour battre le président, il n’a récolté que des soutiens très mineurs. Aliou Diallo, arrivé troisième (8%), a refusé de donner une consigne à ses électeurs. Cheick Modibo Diarra, le quatrième (7%), a lui, en creux, appelé à l’abstention. À ses yeux, le combat Cissé contre IBK «n’est pas l’alternance, ce n’est ni plus ni moins qu’un simple jeu de chaises musicales». Les deux hommes, il est vrai, sortent de fait du même moule, celui de l’Adema (Alliance pour la démocratie au Mali), le parti hégémonique, au pouvoir de 1991 à 2012.
À l’ouverture des bureaux de vote, cette ambiance de défiance peut peser. Elle s’ajoute à la peur des violences, alors que les djihadistes, largement infiltrés dans le nord et le centre du Mali, ont clairement menacé le processus. Le premier tout s’était déroulé dans un calme relatif, seul quelques incidents ayant été enregistrés.
Source: lefigaro