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Au Mali, avec les soldats de l’opération Akello

GENERAL BERNARD BARRERA SERVAL OFFICIERS AKELLOLe général Barrera (au centre) sur le théâtre de l’opération Akello.

L’armée française poursuit ses opérations dans le nord du Mali. La dernière en date est l’opération Akello.

Pendant une semaine, 600 soldats ont parcouru 450 kilomètres pour chasser les djihadistes et trouver leurs caches d’armes.

Les tensions entre l’armée malienne et les indépendantistes touaregs sont de plus en plus nettes.

Dans un violent tourbillon de sable et de poussière, un hélicoptère Puma de la force Serval se pose en quelques secondes sur le plateau qui surplombe l’oued d’In-Delimane, en plein territoire du Mujao (Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest) dans le nord-est du Mali.

Un tireur d’élite saute en premier suivi par le général Bernard Barrera, le commandant des forces terrestres de l’opération Serval. Ensemble, ils piquent à travers l’épais nuage fouetté par les palmes du Puma, et se rendent sur le poste d’observation le plus avancé du plateau.

Au cinquième jour de l’opération Akello, l’une des dernières grandes opérations de la brigade Serval avant son transfert d’autorité à la mi-mai, le général Barrera vient évaluer la mission. Depuis le 25 avril, 600 hommes du Groupement tactique interarmes 2 (GTIA 2, le dernier bataillon français présent à Gao), 50 gendarmes, un bataillon malien, un bataillon tchadien, ont quitté secrètement la base Serval de Gao pour nomadiser sur plus de 400 km entre Djébok, Télataï et In-Delimane : un espace semi-aride, brûlé par un étourdissant soleil sahélien.

Les djihadistes n’ont pas renoncé

« Poursuivre le Mujao, marquer notre présence, rechercher les caches d’armes et recueillir des infirmations. Nous ne devons pas relâcher la pression sur les djihadistes », explique le général Barrera. Une mission à haut risque même si, depuis le début du mois d’avril, les djihadistes ont évité tout contact direct avec les Français. La situation est calme, en apparence. Mais la guerre n’est pas terminée. Tout le monde le sait dans cette bande du Sahel : les djihadistes n’ont pas renoncé. Dans la région, les autorités de Bamako sont discréditées, et le soutien d’une partie de la population au Mujao, fortement enraciné. De plus, la question des indépendantistes touaregs du MNLA ronge la fausse paix du nord du Mali.

Les traits des soldats français déployés sur ce plateau sont tirés. Ils sont engagés dans des conditions extrêmes de chaleur et d’inconfort depuis le début de l’opération Serval, il y a quatre mois. En contrebas de leur position, une section de véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) patrouille dans l’oued In-Delimane. Les hommes avancent à pied, prudemment, entre les roches et les buissons. Devant eux, un troupeau de chèvres et deux maisons en torchis.

« Hier après-midi, explique le capitaine Jean-Baptiste au général Barrera, l’un de nos éléments a pris pied à l’est d’In-Delimane. Un pick-up a soudain pris la fuite devant eux, à 2000 mètres et s’est fondu dans l’oued. Au bout d’une heure et demie, nous avons abandonné nos recherches : la nuit allait tomber. Ce matin, nous sommes entrés dans le village d’In-Delimane : nous l’avons quadrillé, fouillé les maisons suspectes avec les gendarmes. Au marché, des femmes et des enfants criaient à notre passage “Vive la France”, “Vive le Paris-Dakar”, “Vive l’Azawad”. Pour l’heure, on a trouvé des armes, des uniformes et surtout, on a recueilli beaucoup d’informations. Maintenant, nous sommes en train de remonter l’oued à pied. »

Les démineurs sont indispensables

À quelques kilomètres plus en amont, une autre compagnie est en position d’observation. Parmi eux, des sapeurs. Chargés du déminage, ils sont indispensables dans cette guerre au Mali. L’occasion pour le général Barrera de faire un point sur les explosifs cachés sur la route (IED). La veille, un véhicule de la Task Force Sabre a sauté sur un IED dans la région de Tin Zaouaten : un tué, le caporal-chef Duval du 1 er  RPIMa, et deux blessés.

Les véhicules de tête de l’opération Akello ne sont pas passés loin d’une attaque similaire, constate le capitaine Jean-Baptiste : « Au premier jour d’Akello, nous avons repéré des marquages au sol. Les démineurs ont ratissé la zone, et ont détecté un IED armé. Il aurait pu nous faire très mal. Il était plus perfectionné que ceux que l’on trouve depuis le début de Serval. Dans les jours suivants, nous en avons trouvé un autre, mais il n’était pas armé. »

« L’enfer, je l’imagine comme ça, désormais. »

Sur une troisième position où sont disposés deux canons Caesar, des canons capables de toucher très précisément leur cible à plus de 40 km, la chaleur dépasse les 50 °C. Éreintés, les soldats qui ne tiennent pas la garde tentent de se protéger du soleil dans leur VAB (véhicule avant blindé) : là, sans air, le thermomètre dépasse largement les 55 °C. « Jamais vu des conditions aussi dures, s’exclame le curé de la Légion étrangère, le P. Kowalczyk, errant parmi les soldats. L’enfer, je l’imagine comme ça, désormais. »

Le général Barrera poursuit sa visite sur le terrain, recueille des informations, passe un moment avec ses soldats, monte dans les VAB, partage une bouteille d’eau tiède. « Signalons un pick-up armé et arborant le drapeau MNLA à 500 mètres de nos positions », crache une radio. La nouvelle tend les esprits. L’approche de ce véhicule a tout l’air d’une nouvelle provocation des indépendantistes touaregs en direction du bataillon malien qui accompagne le GTIA2.

Le MNLA est en train d’étendre son influence

Alors qu’il domine la ville de Kidal, dans l’extrême nord, le MNLA est en train d’étendre son influence dans le grand Gao. Il s’est même signalé, depuis peu, à une vingtaine de kilomètres de Ménéka, la dernière grande ville avant le Niger. Là, il prélève en toute impunité et par la force une taxe sur les véhicules qui se rendent ou quittent le nord.

En face d’eux, l’armée malienne et, avec elle, la nation, n’attendent qu’une chose : en finir par la force avec le MNLA ! Les Français et l’ONU jouent de toute leur influence pour obliger les deux camps à trouver un accord politique. Bamako se plie aux pressions française et onusienne, mais pour combien de temps encore ?

Frères ennemis

Un pick-up de l’armée malienne quitte soudain la position française pour se ruer sur le véhicule du MNLA. Un ordre est lancé pour empêcher le contact entre ces frères ennemis. Un VBL (véhicule blindé léger) démarre aussitôt et suit la trace du pick-up malien. Tout le monde écoute à la radio les suites de l’affaire. Au bout d’une dizaine de secondes, la radio annonce que les Français sont arrivés sur le véhicule MNLA, en premier. Les Maliens n’insistent pas. L’un d’eux, une fois de retour parmi les Français, lance : « Il faut être sans pitié avec le MNLA. Ils parlent au nom des Touaregs mais ils ne représentent personne d’autre qu’eux-mêmes. Aujourd’hui, on retrouve dans leurs rangs les combattants du Mujao et d’Ansar Dine. Tant que nous ne les aurons pas écrasés, la guerre ne sera pas terminée. »

De son côté, le général Barrera a repris son Puma pour Gao. Concrètement, le bilan de l’opération Akello se solde par deux bennes de munitions trouvées (plus de 110 obus et près de 5000 munitions de petit calibre), des caches d’armes vidées, un pick-up armé et deux IED pris. Aucun blessé. Mais la nette impression que tout le monde redoute une prochaine déflagration entre Bamako et les Touaregs du MNLA.

LAURENT LARCHER, à In-Delimane (Mali)

Source: La Croix.com

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