Visiblement, en fermant les yeux sur tout ce qu’il a entrepris de positif pour sa patrie, le nom de l’ancien président Amadou Toumani Touré apparait chez certains comme celui d’un paria. Les acquis du 26 mars 1991 que nul ne renie, la stabilité, la cohésion sociale maintenues depuis son accession au pouvoir, les infrastructures réalisées à travers le pays, les centaines de milliers d’emplois créés en dix ans, la hausse des salaires [40%], les réformes institutionnelles opérées, la stabilisation économique du pays, l’urbanisation galopante {Il faut y voir des insuffisances comme partout ailleurs à travers le monde.} Tout un héritage jamais égalé au pays(en 10ans/52), balayé du revers de la main, au profit de la confirmation des arguments d’un putschiste, qui, soutenu et encouragé par des politiques véreux, ne pouvait autre que trouver le mal partout afin de justifier son crime. Et sans moindre réflexion, un bon nombre de Maliens ont, depuis, changé la manière de voir les choses, comme si tout n’était qu’un simple rêve. Ils se sentent déçus, mais se trompent sans doute de personne. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ?
Si le Mali est tombé si bas en ce début de l’année 2012, ça ne peut être dû au fait d’un seul homme. Cette occupation jusqu’aux 2/3 du territoire, qui a favorisée abus et exactions au nord, a bien été la volonté d’un certains nombre d’individus, paisiblement installés au sud,-et plus que jamais soucieux de leurs ambitions personnelles au dessus de l’intérêt national.
Certes, les bandits surarmés venus de la Libye avaient commencé à gagner du terrain, mais l’armée nationale du Mali tenait bon. Le retraité général président qui s’était très vite rendu à l’évidence, la détermination des bandits, avait tout de fonctionnel -engins de guerre, armes et munitions- mobilisé pour aider l’état-major à parvenir à bout. Objectif : Chasser les bandits du territoire national afin de favoriser la tenue, dès avril 2012, des élections. Erreur.
Tous contre un. Face à ATT, une autre rébellion au sud. Il faut dire que le jeune capitaine qui a profité de la situation pour renverser son régime, dans la nuit du 21 au 22 mars 2012, n’est qu’un bouc-émissaire. Sous l’ombre, des vrais putschistes, jamais, nommément identifiés. Ceux-là qui en ont intérêt plus que Sanogo, l’auteur. « Empêcher, quoiqu’il advienne, ATT à tenir les élections », était leur dessein. Bien avant Sanogo, dans les rues de Bamako, il était affirmé qu’ « un putsch était en préparation contre ATT …». Qui le préparait ? Et Pourquoi?
ATT, lui, le savait bien, mais puisque son recul n’arguerait que sur son supposé désir de continuer à régner, il n’avait qu’à maintenir le cap.
Le réel obstacle. Conscients de ne pouvoir remporter les élections présidentielles, si le président réussissait à les tenir, une armada d’hommes politiques maliens se voyait déjà punie, jetée à la retraite politique par ATT, après des décennies de lutte politique. Ils le savaient mieux que quiconque, le président ATT jusqu’au bout de son mandat, disposait encore de la confiance de son peuple qui voyait en lui : un bâtisseur qui a tout donné à son pays, épuisé par le travail lassant, malgré ce qui s’annonçait [à y remédier.] Donc, ceci étant, des politiciens, ambitieux de tous bords, s’étaient déjà repéré l’homme à qui ATT allait remettre le pouvoir, comme un tour de passe-passe, à l’issue du scrutin. Pour monter le peuple contre le général sur la sellette, « plusieurs centaines d’urnes sont déjà [dès février] bourrées, au palais présidentiel, en faveur d’un proche du président, son dauphin», poussaient-ils à faire croire. Alors qu’aucun candidat n’avait encore déposé sa demande de candidature. Pis : « ATT est le chef de rebelles », faisaient-ils dire à travers certaines ondes. Tout ça pour ça !
Inédit. « Si j’ai un conseil à donner aux Maliens, c’est de faire en sorte que, le 29 Avril, nous tenions les élections, que nous ayons un président démocratiquement élu. Toutes les conditions seront réunies, -et, je sais, y en a des gens qui sont convaincus que par la voie des élections, ils ne parviendront jamais à un pouvoir malien, ce sont eux qui parlent de transition. Et, aux officiers : Au lieu de dire qu’on ne veut pas mettre la fin à la guerre, au nom du pouvoir, je leur dis ceci : c’est à eux d’aller mettre fin à la rébellion, nous les avons armés, organisés,-et ils sont payés. C’est à eux que revient le rôle de soldat», avançait ATT, en février 2012, lors d’un débat télévisé. Quid des officiers ?
Et comme il n’en manque jamais, au sein des armées africaines, de tous les temps, surtout qu’on les recherchait, les militaires tribuns, sans formation politique. Il ne fallait qu’agir de la sorte pour que certains puissent être: présidents, députés et ministres. A défaut, leur espoir nourri de parvenir au pouvoir, ne vivait que sur le fil du rasoir.
De la roche Tarpéienne, tous, ils doivent tout, -sinon, leur actuel statut-, au général Sanogo, en taule, depuis novembre2013. Ce lui-là qui affirmait détenir ATT après son putsch [les Maliens ont très vite pardonné pour cette farce.]
Sinon, insinuer qu’ATT au pouvoir, le nord n’échapperait pas à l’occupation totale, est tout simplement magicien. Or, qui sait comment ce général à la retraite, plus habile au dossier, que quiconque, au Mali, allait finir par mettre terme à la crise ? Personne, certainement. Il détenait ce qu’il fallait : l’expérience, les tactiques et la ruse. « Même ceux qui combattaient l’armée malienne à l’époque ne se hasardaient pas à trop l’intimider, ils se méfiaient toujours des hommes de renseignements de Koulouba qui étaient partout, et toujours capables de les diviser face à un objectif touareg commun, reconnaissait un diplomate Mauritanien en poste au Mali, qui conclut : ATT avait toutes sortes de carottes pour un chef de bandits…», etc. Suite au putsch, ce sont des commandants arabes et touareg, loyalistes, ayant senti un vide à Bamako, qui ont rejoint les éléments d’AG Najim, venus de la Libye.
Les compromettants paient toujours le prix. Parmi eux, déjà : des politiques, conspirateurs contre le Mali, plus que jamais, destitués, humiliés. Des militaires grossiers jetés au cachot, d’autres, dans le collimateur de la justice, etc. Le match pour la vérité est loin d’être terminé. En tout : si le procès ATT se tient, plus d’un habitant de la roche Tarpéienne iront au Capitole.
IMT