Malgré l’interdiction de sa marche du samedi 2 juin dernier par le Gouverneur du District de Bamako à cause de l’état d’urgence, l’opposition a maintenu sa manifestation car selon elle, plusieurs autres manifestations ont eu lieu dans ces conditions. Ce qui donné lieu à des échauffourées entre marcheurs et forces de l’ordre suivies de la répression violente de cette marche. Comme si cela ne suffisait pas, une autre marche est prévue par la même opposition le vendredi 8 juin prochain. Et personne ne sait ce qui va se passer ce jour. Un autre ‘’vendredi noir’’ en perspective !.
Dans la matinée du samedi 2 juin, un important dispositif sécuritaire attendait les marcheurs avant leur rassemblement. Déjà à 7 heures, l’on pouvait voir des forces de l’ordre composées de policiers, de gendarmes et d’éléments de la garde nationale sur tout le long de l’itinéraire de la marche. Ils étaient déployés en nombre du rond-point du grand hôtel en passant par la mairie du District, la chambre du commerce, la direction du PMU-Mali, la direction commerciale de la Sotelma-Malitel, sous l’échangeur du cinéma Babemba, la Bourse du Travail jusqu’au Monument de l’Indépendance. On pouvait également remarquer les aller et retour des pick-ups remplis d’éléments très bien équipés sur cet itinéraire.
A 8 heures déjà, une cinquantaine de manifestants venus des communes I et II étaient sur le lieu de rendez-vous. Il s’agit du rond-point du grand hôtel de Bamako pour se diriger ensuite vers la Place de la Liberté. Avec leurs drapeaux et écharpes, ces jeunes ont été bloqués par le premier bloc des forces de l’ordre. Après quelques temps d’observation, les policiers ont demandé au groupe de libérer le trottoir. Ce qui n’a pas été respecté par les manifestants qui attendaient les consignes de leurs leaders. C’est là que les policiers ont décidé d’exécuter pour la première fois, les ordres qu’ils ont reçus de leur hiérarchie à savoir disperser les manifestants à coups de gaz lacrymogènes.
La fumée des gaz lacrymogènes et les coups de matraques ont obligé le groupe de jeunes à se replier jusqu’au ‘’rail-da’’.
«Je viens d’avoir Tièbilé Dramé au téléphone, il dit qu’ils sont au siège du parti ADP-Maliba et qu’il faut se dépêcher pour les rejoindre là-bas. Dispersons-nous, on se retrouve là-bas », a crié un jeune du Parena. Cap sur le siège de l’ADP-Mali au quartier du fleuve, contigu au Centre National d’Odontostomatologie et en face du Haut Conseil des Collectivités. A 8 heures passées, une foule énorme était rassemblée devant le siège de l’ADP-Maliba ou s’étaient retrouvés les leaders de l’opposition et des associations qui ont organisé cette marche pour réclamer une élection libre et transparente le 29 juillet prochain. Enfin, ils sortent du siège de l’ADP-Maliba pour rejoindre les manifestants. Il s’agit de Tièbilé Dramé, Aliou Boubacar Diallo, Mamadou Igor Diarra, Djiguiba Keïta, Me Mohamed Aly Bathily, Mamadou Hawa Gassama, Amadou Thiam entre autres. Ils seront bloqués par les forces de l’ordre. Ils s’arrêtent au niveau du Centre d’Odontostomatologie. Au même moment, des policiers à bord de quatre pick-ups viennent en renfort. Un commissaire de police se dirige vers les manifestants. Des discussions ont eu lieu entre lui, Tièbilé Dramé et d’autres leaders de l’opposition.
« Je vous en prie messieurs, veillez libérer la voie publique s’il vous plaît ! », a demandé ledit commissaire aux leaders de l’opposition et aux manifestants.
« Nous allons tenir notre marche, elle est pacifique, nous ne voyons pas en quoi cela pose problème. Laissez-nous faire notre marche, ça ne vous regarde pas, vous n’avez pas le droit d’être là, devant notre siège », scandent les manifestants.
Le sauve-qui-peut
Ce fut le début des échauffourées avec des jets de cailloux par-ci par-là, des tirs de gaz lacrymogène et des coups de matraques. La foule se disperse. C’est le sauve-qui-peut général. Certains manifestants se sont retranchés au siège de l’ADP-Maliba et d’autres dans les familles situées non loin. Plusieurs personnes ont reçu des coups de matraques pendant que d’autres croulaient sous les gaz lacrymogènes. On dénombre plusieurs blessés du côté des manifestants, de la police et même du côté des journalistes venus simplement faire leurs reportages.
«Nous sommes de Sokorodji, c’est notre grand frère qui a loué une sotrama qui est venue nous déposer ici. Nous ne savions pas qu’il y avait tout cela. Nous voulons rentrer chez nous », ont déclaré deux filles en détresse dans une famille à Bamako-Coura.
Après cette marche avortée et réprimée, l’opposition n’a pas encore dit son dernier mot car elle compte, coûte que coûte, organiser une autre marche. Et la date choisie pour ce faire est le vendredi 8 juin prochain. Pourquoi le choix d’un vendredi pour cette manifestation ? Selon certains observateurs, l’opposition voudrait qu’il y ait un autre ‘’vendredi noir’’ au Mali à l’image des évènements tragiques qui se sont déroulés sous Moussa Traoré le vendredi 22 mars 1991.
D’abord, elle a demandé le départ du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga qu’elle juge d’être à l’origine de cette répression et promet qu’elle organisera vaille que vaille sa marche. Selon des sources dignes de foi, tout sera mis en œuvre pour que l’autorité de l’Etat soit respectée le 8 juin prochain. Ce qui n’augure rien de bon.
Moussa Sékou Diaby
Source: Tjikan