La question de l’organe unique de gestion des élections, la nécessité de la tenue des Assises nationales de la refondation (leur formation, les conditions d’organisation, les objectifs visés) ; la durée de la transition… sont, entre autres, les sujets largement débattus lors de la rencontre du premier ministre Choguel Kokalla Maïga avec la classe politique, le vendredi dernier. Même si la question du respect de la durée de la transition n’est pas tranchée, la tenue des Assises nationales de la Refondation et la création de l’organe unique de gestion des élections semblent être des acquis malgré certaines voix discordantes.
Travailler à avoir le maximum de consensus autour des priorités du gouvernement de la transition. Telle est la démarche qu’a entrepris le premier ministre Choguel Kokalla Maïga. Pour que chaque Malien ait son mot à dire sur l’avenir du Mali, le premier ministre rencontre les forces vives de la Nation. C’est dans ce cadre qu’il a rencontré la classe politique le vendredi dernier.
Les besoins du peuple Mali
Dans son discours introductif devant la classe politique, le premier ministre a indiqué les besoins du peuple malien : La sécurité, la justice, la refondation et la bonne gouvernance. « Je crois exprimer la préoccupation de l’écrasante majorité de la population lorsque j’exprime que les Maliens ont soif de sécurité. Partout où je me suis rendu, partout où je rencontre les citoyens, la question de sécurité me reviens en permanence comme étant le premier souci des Maliens. Les Maliens ont soif de justice : la lutte contre l’impunité, la corruption doit être conduite de façon implacable ; le peuple Malien ne comprendra pas que la transition n’engage les premiers pas de la lutte contre l’impunité. Le besoin de refondation de l’État. Pour refonder l’État, nous avons besoin de tous les fils du pays quel que soit leur sensibilité politique. Personne ne sera traité pour ce qu’il a été, mais pour ce qu’il a fait », a indiqué le premier ministre
Selon lui, les reformes sont nécessaire pour la refondation même de l’État du Mali. « Ces réformes doivent aboutir, entre autres, au processus de refondation de l’État. Nous devons asseoir un nouvel État. Nous devons asseoir l’État dont les Maliens veulent. Nous devons prendre en compte, dans ce processus, toutes les réflexions qui ont été faites dans ce domaine par le passé, toutes les analyses, toutes les recommandations. Nous dévons également prendre en compte les réalités d’aujourd’hui », a défendu le Dr Choguel Kokalla Maïga.
L’Organe unique de gestion des élections sera créé
L’une des décisions du gouvernement Choguel Kokalla Maïga qui divise la classe politique, c’est la création de l’organe unique de gestion des élections pendant cette transition. Pour le chef du gouvernement, cet organe sera créé. « Cette question a fait l’objet d’une décision gouvernementale irréversible. L’organe unique va être installé. Il s’agit de serrer les coudes pour le rendre fonctionnel pour que les élections qui se tiendront soient les moins contestées possibles dans l’histoire récentes de notre », a-t-il déclaré. Cette vision est soutenue par le M5-RFP actuellement dirigé par Me Moungata Tall. Pour ce mouvement hétéroclite, il faut mettre en place cet organe pour la crédibilité des élections au Mali. « L’Organe unique de gestion des élections est aujourd’hui la garantie de l’organisation d’élections libres, régulières et transparentes. Au lieu de nous mettre d’accord pour organiser une dernière fois des élections frauduleuses, organisons-nous pour faire des élections propres qui seraient acceptées par tous. Ne bricolons plus, car nous avons payé un prix trop élevé aux mauvaises élections. Cet organe peut être mis en en place de façon inclusive et non clivante ; donnons-nous les mains pour y travailler et pour y arriver. Nous le pouvons, nous le devons », a déclaré Me Mountaga Tall. Mais pour d’autres hommes politiques comme Amadou Koïta de la coalition du groupement des partis politiques appelant au respect de la durée de la transition, le temps imparti est trop minime pour que le gouvernement puisse mettre en place cet organe. Ils souhaitent ainsi que cette réforme soit menée par un pouvoir légitime. Pour Modibo Kadjoké, c’est bien possible de mettre en place l’organe unique de gestion des élections dans les délais impartis pour la transition.
Assises Nationales de la Refondation, une nécessité ou des assises de trop ?
États généraux sur la décentralisation, Conférence d’Entente Nationale, Dialogue National Inclusif…Le Mali a-t-il besoin d’autres fora encore ? Oui, pour le premier ministre Choguel Kokalla Maiga. « Nous voulons que les Assises nationales de la Refondation soient le grand moment de réflexion, de cohésion, d’unité des Maliens pour qu’ensemble nous projetons, dans un avenir commun dans lequel chaque Malienne et malien va se reconnaitre », a-t-il expliqué à la classe politique avant d’ajouter : « Nous voulons que ces assises soient inclusives, que ces assises aboutissent à des résultats exécutoires par d’abord le gouvernement de transition et après ». Beaucoup d’hommes politiques adhèrent à la tenue de ces assises. C’est le cas de Abdel Kader Maïga, cadre de l’URD et membre du comité stratégique du M5-RFP qui a déclaré que « les Assises nationales de refondation est une nécessité. Il y a des sujets difficiles qui ne peuvent trouver que leur réponse dans les assises nationales de refondation ». Là Aussi, le comité stratégique du M5-RFP soutient les autorités de la transition. Le mouvement estime que les assises nationales de refondation doivent se tenir. « Les débats sur les assises nationales de refondation doit désormais porter sur les assurances à donner sur sa compatibilité avec les délais impartis à la transition et non sur son utilité maintes fois réaffirmés. Et aussi sur son inclusivité réelle, son impartialité, sa durée ou son coût. Vouloir le remettre purement et simplement en cause n’est pas productif », a déclaré Me Mountaga Tall.
Par contre, Amadou Koïta trouve inutile la tenue de ces assises et a jeté des pierres dans le jardin du premier ministre. « Nous avons fait tellement de fora au Mali. Nous estimons que si vous pensez qu’il faille aller à des assises de refondation, mais faites-en un projet de société et allez-y aux élections. Le Mali a besoin des 2 milliards 5 pour autre chose », a-t-il déclaré.
« Ni le président ni le premier ministre n’a parlé de prolongation » de la transition
La question de la durée de la transition suscite des débats ces dernières semaines. Pendant que certains manifestent pour demander la prolongation, d’autres se battent pour le respect de la durée prévue dans la charte. Après la manifestation des jeunes qui ont réclamé la prolongation de la transition, les hamallistes ont aussi marché la semaine dernière pour demander une prolongation de 3 ans.
La classe politique est aussi divisée sur la question. Pour Jeamille Bittar, c’est aux Assises Nationales de la Refondation de décider si la transition doit être prolongée ou pas. « La bonne intelligence voudrait que ce planning, avec la participation des forces vives de la nation et de l’ensemble de la classe politique, que nous convenions d’un calendrier réel, réalisable par rapport à ce que les Maliens souhaiteraient que la transition soit. Nous disons que nous ne voulons pas d’une transition bâclée », a-t-il déclaré. Pour Amadou Koita, il n’est pas question de prolonger la transition. « Par rapport au délai de la transition, respectons nos engagements. Nous avons décidé de faire cette transition en 18 mois. Nous sommes déjà à 12 mois. Il reste 6 mois. Celui qui ne veut pas quand il peut, ne pourra jamais, au moins l’aura voulu », a laissé entendre l’ancien ministre d’IBK. Le M5-RFP affirme également ne pas avoir soutenu une éventuelle prolongation de la transition. « Quant au respect du temps imparti à la transition, j’invite celui qui, ici, a entendu une voix autorisée soutenir une éventuelle prorogation de ce délai à le faire savoir », a déclaré le porte-parole du mouvement hétéroclite qui a ajouté : « travaillons ensemble à la réussite de la transition, sortons des procès d’intention, faisons des évaluations régulières et prenons en mains le sort de notre pays ».
Sur la durée de la transition, le premier ministre n’a pas donné trop d’explications. « Ni le président ni le premier ministre n’a parlé de prolongation », a-t-il déclaré. Il a promis de faire tout son possible dans le temps. « Nous leur avons dit que le gouvernement s’est engagé à faire tout ce qui dépend de lui pour faire respecter ses engagements. C’est pour cela que nous travaillons d’arrache-pied pour obtenir ces résultats. Pour le reste, rien ne sera décidé sans les Maliens », s’est engagé le premier ministre Choguel Kokalla Maïga.
Boureima Guindo
Source: LE PAYS