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Anne Comptone : « La culture est un lien très fort entre les États-unis et le Mali »

Cette archéologue occupe la fonction d’analyste du patrimoine culturel au Centre du patrimoine culturel du Département d’État des États-Unis. En visite au Mali du 16 au 21 décembre dernier, elle a saisi l’opportunité de cette interview exclusive pour parler des excellentes relations culturelles entre son pays et le nôtre

 

L’essor : Les États-Unis d’Amérique viennent de remettre au Mali plus de 900 objets issus de fouilles clandestines. Cet acte inédit dans l’histoire pourrait-il être suivi par d’autres ?

Anne Comptone : Les États-Unis ont un profond respect pour le patrimoine culturel du Mali et une histoire de coopération travaillant ensemble pour soutenir sa protection et sa préservation. Le retour d’objets importants du patrimoine culturel au Mali est la dernière démonstration de notre engagement à travailler avec le Mali. Ce retour a été rendu possible parce que le Musée national du Mali a partagé des informations précieuses qui ont permis aux autorités américaines d’interdire et de saisir les objets.

Le Musée national du Mali organise une exposition muséale et d’autres activités pour sensibiliser le public malien aux actions qu’il peut entreprendre pour protéger le patrimoine culturel au Mali et prévenir le futur trafic d’objets. J’espère que nos efforts conjoints pour éduquer les gens sur la protection du patrimoine culturel seront si fructueux qu’il n’y aura jamais besoin d’un autre retour important de tels objets parce que les gens arrêtent le pillage et le trafic illicite.

L’essor : Votre visite rentre dans le cadre de l’Accord sur les restrictions à l’importation de matériels archéologiques de la Vallée du Niger et des Falaises de Bandiagara entre les USA et le Mali. Pouvez-vous nous parler brièvement des activités que vous allez mener à Bamako ?

Anne Comptone : Avant de rejoindre le Centre du patrimoine culturel du Département d’État américain, j’étais archéologue. J’ai mené des recherches et travaillé avec des communautés pour documenter leur patrimoine et leur histoire au Ghana et en Sénégambie. Mon travail au Centre du patrimoine culturel me permet de travailler en étroite collaboration avec les ambassades des États-Unis sur des initiatives et des projets de protection et de préservation du patrimoine culturel.

Au cours de ma visite, j’ai rencontré de nombreux professionnels remarquables et réputés du patrimoine culturel du Mali pour m’informer davantage sur leurs efforts inlassables pour arrêter le pillage et le trafic et conserver le patrimoine culturel du Mali. J’ai eu le plaisir de me joindre au ministre de la Culture, Andogoly Guindo et à l’ambassadeur des États-Unis Dennis Hankins pour la cérémonie d’ouverture du tout nouveau projet du Fonds des ambassadeurs pour la préservation culturelle du Mali.

Le projet vise la conservation, la revitalisation et la valorisation des textiles traditionnels des communautés Peul et Dogon. J’ai pris plaisir à visiter les excellentes collections du Musée national du Mali. En tant qu’archéologue professionnel, j’ai réalisé mon rêve de sortir de Bamako pour une courte visite d’un site archéologique où d’importantes poteries anciennes avaient été trouvées.

L’essor : Cet accord concerne seulement deux régions, ne pensez-vous pas qu’avec la généralisation de l’insécurité qu’il faut l’étendre à l’ensemble du territoire du Mali ?

Anne Comptone : L’accord actuel couvre le matériel archéologique de la vallée du fleuve Niger et de l’escarpement de Bandiagara, ainsi que les protections des manuscrits du XIIe au milieu du XVIIIe siècle. Il existe une densité et une diversité incroyables de sites archéologiques issus des cultures de la région de la vallée du Niger, et l’accord offre une protection pour une grande partie des sites maliens en danger.

Votre question souligne que le monde change et que de nouveaux événements peuvent menacer la sécurité d’un pays et d’un peuple. Il est important de s’adapter à un monde en évolution. Les accords sur les biens culturels sont initiés par le gouvernement du pays hôte. Dans ce cas, ce sont les Maliens qui ont défini les régions d’origine couvertes. Maintenant, le Mali a demandé de modifier et d’étendre l’accord. La décision est entre les mains du gouvernement du Mali quant aux types de biens culturels et d’objets du patrimoine culturel à inclure dans l’accord, et ma visite a permis de clarifier le processus de demande de telles modifications de l’accord.

L’essor : Quel est l’intérêt que votre pays tire-t-il de ce type de collaboration ?

Anne Comptone : Le patrimoine culturel est le lien qui unit les gens. Le Mali possède un patrimoine culturel important et diversifié qui doit être célébré et largement partagé. L’histoire du Mali a façonné les événements mondiaux et a joué un rôle important dans la connexion des personnes et des idées. Les accords sont de merveilleux outils qui permettent à nos pays, institutions et personnes de se connecter, de partager et de s’engager dans des échanges culturels, scientifiques et éducatifs.

Les accords sont importants pour les États-Unis, car ils nous permettent de démontrer la valeur que nous accordons au respect des cultures à travers le monde. L’arrêt du pillage et du trafic du patrimoine culturel est une priorité importante pour les États-Unis. La collaboration permet également aux États-Unis de se connecter et de comprendre l’histoire, le peuple et l’identité du Mali. Par exemple, il y a eu deux expositions récentes du patrimoine malien dans certains des plus grands musées des États-Unis, le Metropolitan Museum of Art de New York et le Smithsonian National Museum of African Art à Washington DC.

Ces expositions braquent les projecteurs sur l’histoire et la culture du Mali pour le public américain. Cela n’aurait pas été possible sans les généreux prêts d’objets à des conditions négociées par le Musée national du Mali. Ce genre d’échange permet à nos deux pays de mieux se comprendre et de s’apprécier.

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Qui est Anne Comptone ?

Anne Comptone est analyste du patrimoine culturel au Centre du patrimoine culturel du Département d’État des États-Unis. Compton est titulaire d’un doctorat, d’une Master 2 en archéologie et études africaines de l’Université du Michigan et d’une licence en archéologie de l’Université du Nouveau-Mexique.

Avant de travailler au Département d’État, Comptone était directrice associée du Centre d’enseignement et d’apprentissage de l’Université du Nouveau-Mexique et professeure au Département d’anthropologie et d’archéologie.

Elle était archéologue au U.S. Forest Service. Elle a effectué de vastes travaux archéologiques en Afrique notamment au Ghana, où elle a examiné à quoi ressemblait la vie quotidienne le long des routes commerciales qui reliaient les villes maliennes de Gao et Tombouctou aux villes de Bono Manso au Ghana du 14e au 18e siècle.

Comptone est l’auteur de Excavations at Kranka Dada et auteure collaboratrice de Archaeology and History of Pueblo San Marcos: Stasis and Change.

Y. D.

Source : L’ESSOR

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