Acquitté il y a seulement deux semaines par la Cour Pénale Internationale (CPI) pour les faits de crime contre l’humanité commis lors des violences postélectorales de 2010-2011, Laurent Gbagbo va désormais résider en Belgique. Suite à la décision unanime des juges de la CPI de les libérer sous conditions, l’ancien président ivoirien et son principal lieutenant, Charles Blé Goudé, ont ainsi cessé depuis le vendredi dernier de dormir dans leur prison « dorée » des Nations Unies à la Haye.
Si les juges de la Cour d’appel ont unanimement décidé de la libération des deux prévenus, la chambre estime toutefois qu’il y a un risque de fuite des acquittés. Ainsi a-t-elle tenu à détailler, dans un document de trente pages, les conditions de restriction de leur liberté qui correspondent point par point à ce qu’avait demandé le bureau du procureur, Fatou Ben Souda.
De restrictions draconiennes de liberté
Des restrictions que les deux anciens détenus ont volontairement signer dans une déclaration indiquant qu’ils se conformeront aux décisions des juges de la CPI, à savoir : rendre leur passeport au greffe de la Cour et ne pas quitter la municipalité dans laquelle ils résideront dans les pays d’accueil. A cet effet, « Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé devront se pointer une fois par semaine auprès des autorités de leur pays de résidence. Ils ne pourront se déplacer qu’au sein de la municipalité des pays hôtes. S’il devait y avoir un déplacement à l’étranger, ils devront demander une autorisation préalable à la CPI. Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé ont l’interdiction d’interagir avec des témoins du procès. Interdiction aussi de s’exprimer sur cette affaire auprès de la presse ».
Pour la Chambre, « il est important que Gbagbo et Blé Goudé ne fassent pas de déclarations à propos de l’affaire, à leur encontre et à propos potentiellement des victimes de la procédure judiciaire, etc. Ce, pour « protéger les informations liées à la procédure ».
A l’analyse, on peut aisément estimer que les mesures imposées par la chambre d’appel ne sont ni plus ni moins qu’une quasi-assignation à résidence pour les deux anciens prévenus, d’autant qu’en cas de non-respect de ces décisions listées ci-dessus, la chambre d’appel se donne le droit de réviser leurs conditions de libération, à sa propre initiative ou à sur celle d’une des parties prenantes. De même que la Cour pourrait réaménager les conditions de leur remise en liberté tous les six mois. Est-ce cela une liberté ? Certainement pas !
Autrement dit, l’affaire Gbagbo est loin de connaître son épilogue. A partir du moment où le Procureur compte bien faire appel de l’acquittement des deux Ivoiriens. Ce qui signifie qu’il faudra encore attendre des mois, voire des années pour que l’ancien président puisse fouler à nouveau le sol ivoirien et prétendre refaire de la politique.
Gaoussou Madani Traoré
Le Challenger