Le chef du gouvernement a partagé avec les panelistes sa vision pour l’Afrique à travers trois thèmes : la libre circulation des personnes et des biens, le développement des infrastructures, la sécurité et le développement
Le 24è Forum économique mondial qui s’est tenu à Abuja en fin de semaine dernière a été marqué par des rencontres thématiques animées par des responsables politiques, selon leur profil, et aussi par des responsables d’entreprises et des investisseurs. C’est ainsi qu’après la cérémonie d’ouverture mercredi, la dizaine de chefs d’Etat et de gouvernement présents à l’hôtel Hilton d’Abuja ainsi que le millier d’hommes d’affaires venus d’Afrique et d’ailleurs, se sont retirés en panels au tour de thèmes précis.
Le Premier ministre Moussa Mara a été particulièrement sollicité pendant les trois jours du Forum. Le premier panel qu’il a animé avait trait à la libre circulation des personnes, des biens et des intelligences connaissance.
Le chef du gouvernement a développé l’idée que l’élimination des obstacles à la libre circulation des personnes en Afrique pourrait créer des millions d’emplois pour le continent au cours des dix prochaines années. Comment instaurer un visa unique et une politique des frontières susceptible de stimuler la croissance inclusive et d’améliorer la mobilité des talents en Afrique ? Le Premier ministre propose ses solutions à travers trois axes : l’harmonisation des politiques visant à faciliter les flux de voyage ; l’activation de la libre circulation des personnes pour une croissance à long terme et l’apprentissage des expériences réussies dans d’autres régions en la matière.
Moussa Mara a exposé la vision de notre pays dans ce domaine. « L’Afrique peut devenir un continent prospère à condition qu’elle soit plus intégrée, avec comme corolaire la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux entre pays et régions », analyse-t-il. De son point de vue, cela débouchera sur la création d’un vaste marché, l’accroissement de la compétitivité des entreprises et permettra de booster les possibilités d’échanges intra-africains. Le développement de la coopération au sein des bassins frontaliers ne peut qu’être source de croissance, de paix et de stabilité.
POUR UN SECTEUR PRIVE DYNAMIQUE. L’objectif recherché à travers notre Cadre stratégique pour la croissance et la réduction de la pauvreté (CSCRP) 2012-2017, a expliqué le chef du gouvernement est d’accroître le rôle du commerce dans le développement économique et social par une meilleure intégration du pays au marché régional et international (offre de produits maliens de qualité, diversification des marchés, respect des normes et des règles sanitaires et phytosanitaires, renforcement des capacités des acteurs).
Il est nécessaire, dans notre pays, de diversifier la production en vue de réduire la dépendance nationale de la culture du coton, de la production d’or, de favoriser l’émergence d’un secteur privé dynamique, de promouvoir les investissements directs créateurs d’emplois et d’explorer de nouvelles possibilités d’exportation.
Dans cet objectif, il est envisagé de renforcer les filières et programmes existants pour lesquels le pays dispose d’un avantage comparatif et d’opportunités de marchés confirmés. Il s’agit de filières comme le riz et les autres céréales, les fruits et légumes, le karité, le bétail, l’artisanat, le tourisme, les mines, les télécommunications etc…
Le deuxième panel auquel Moussa Mara a participé avait pour thème : « la stratégie africaine en matière d’infrastructures ». Là aussi, il a pris la parole pour faire valoir ses convictions.
Son gouvernement, a-t-il dit, est conscient que la mise en place d’un réseau efficace d’infrastructures à travers l’Afrique est indispensable à une croissance inclusive, à un développement durable et pour la réduction de la pauvreté. En effet, pour tirer profit de la mondialisation, les pays africains doivent disposer d’un réseau adéquat de transport. « Les infrastructures de transport doivent évoluer de concert avec la production de l’Afrique et ses besoins évolutifs », a précisé Moussa Mara.
VERITABLE GOULOT D’ETRANGLEMENT. S’inscrivant dans cette vision, notre pays tout en respectant ses engagements dans le cadre de l’UEMOA, de la CEDEAO et de l’Union africaine, soutient que l’accélération de la croissance économique butte sur des obstacles encore nombreux, le déficit d’infrastructures de base constituant un véritable goulot d’étranglement au développement économique, singulièrement dans les secteurs des routes, de l’énergie et des technologies de l’information et des télécommunications.
A ce sujet le Premier ministre, a indiqué que la crise de l’énergie caractérisée par l’insuffisance de l’offre et son coût très élevé, affecte au quotidien le fonctionnement des services et des activités économiques avec comme corollaire la perte de productivité.
Pour lui, la vraie question du développement des infrastructures en Afrique demeure celle de son financement par des ressources adéquates. C’est pourquoi, lors de la réunion des gouverneurs africains du groupe de la Banque mondiale et du FMI tenue à Washington en avril dernier, plusieurs pays ont souligné la nécessité d’introduire plus de flexibilité en matière de plafond d’endettement au moment où tout le monde s’accorde sur la nécessité d’accroitre l’investissement, notamment dans les infrastructures.
Le Premier ministre a surtout insisté sur l’importance pour l’Afrique de mettre l’accent sur la réduction des coûts de production dans le domaine des infrastructures (énergie et transport) dont la réalisation participe de manière significative à la croissance.
Le dernier panel auquel Moussa Mara a participé était consacré au binôme sécurité et développement, une question d’une brulante actualité au moment où les foyers de conflits locaux se multiplient sur le continent. « La sécurité régionale et le développement économique en Afrique sont interdépendants et se renforcent mutuellement », relève le Premier ministre pour qui le risque d’extension des conflits locaux est une grave menace pour la stabilité et la croissance à long terme. Moussa Mara s’est dit convaincu que la coopération multilatérale impliquant toutes les parties prenantes est de ce fait nécessaire pour assurer la sécurité du développement économique futur de l’Afrique.
MITUALISATION DES EFFORTS. Mais que faire pour renforcer l’architecture de paix et de sécurité en Afrique, pour mieux gérer les flux migratoires et de réfugiés afin de prévenir l’extension régionale des conflits locaux ? Quel rôle le secteur privé doit-il jouer pour la stabilité et la transition des Etats fragiles ? En réponse à ces interrogation, il estime que « pour garantir la sécurité et la stabilité, nos Etats pris individuellement ou collectivement doivent privilégier les stratégies, les initiatives et les actions permettant de sortir les populations de la pauvreté ambiante ». Et d’indiquer qu’il faut des projets structurants de développement à même d’améliorer le bien-être de nos concitoyens.
C’est à ce prix que nos Etats seront en mesure de prévenir l’adhésion de leurs citoyens aux messages, idées et activités de déstabilisation des groupes criminels… C’est également la meilleure façon de combattre l’économie criminelle qui alimente la plupart des crises que nos Etats traversent.
Par ailleurs, notera Moussa Mara, les menaces et les atteintes à la sécurité dans nos pays ont de plus en plus des dimensions régionales et internationales. Il faut par conséquent la mutualisation de nos efforts de lutte contre ces menaces. « Aucun Etat seul, fut-il puissance économique ou militaire, ne peut faire face à ces défis », a martelé Moussa Mara. C’est pourquoi, les pays du Champ (Mali, Algérie, Mauritanie et Niger) ont mis en place des dispositifs conjoints comme les patrouilles mixtes, le droit de poursuite sur leurs territoires, le partage des renseignements, la mise sur pied d’un centre de commandement conjoint. Cependant, ces dispositifs ont besoin d’appui pour être pleinement opérationnels.
« Je pense que ces mécanismes conjoints de coopération doivent être multipliés sur le continent, afin d’assurer la sécurité, condition première de développement. A l’échelle continentale, il nous faut diligenter la mise en place et l’opérationnalisation de la Force en attente de l’Union africaine. C’est à ce prix que nous aurons les capacités militaires adéquates pour répondre aux situations d’urgence. L’UA doit tirer les leçons des situations récentes au Mali, en République Centrafricaine, au Soudan du Sud », a exhorté Moussa Mara.
Ces analyses du Premier ministre ont été jugées pertinentes et réalistes par les panelistes qui ont suivi avec une attention soutenue ses trois interventions.
Envoyé spécial
A. M. CISSE
EN FAMILLE AVEC NOS COMPATRIOTES DU NIGERIA
Respectant une tradition bien de chez nous, le Premier ministre Moussa Mara en fin de séjour à Abuja a rencontré vendredi après midi les représentants de nos compatriotes installés dans ce pays. Estimés à près de 10 000, nos frères, s’en sortent tant bien que mal dans le petit commerce. Moussa Mara accompagné des ministres en charge du Commerce Abdel Karim Konaté et des Investissements, Moustapha Ben Barka, leur a porté le message de salutation et d’encouragement du président de la République Ibrahim Boubacar Keita.
Le chef du gouvernement qui effectue son premier voyage à l’étranger depuis sa nomination, leur a donné les nouvelles du pays. Le bateau « Mali » se met debout et s’est lancé depuis quelques mois à la recherche de solutions durables aux maux qui l’assaillent. La politique générale du gouvernement récemment adoptée à l’Assemblée nationale donne le top départ de cette transformation promise a assuré Moussa Mara.
Nos ressortissants ont expliqué au chef de gouvernement qu’ils sont quelques fois victimes de préjugés. Ils sont souvent assimilés à tort au groupe armé islamiste Boko Haram. Le Premier ministre les a invités à bien choisir leur fréquentation et à aider le pays hôte à sécuriser ses populations. En cas de difficulté, conseille-t-il, il ne faut pas hésiter à contacter l’ambassade.
Nos compatriotes ont aussi évoqué des difficultés liées au commerce entre le pays d’accueil et le pays d’origine. Les tracasseries routières reviennent en boucle dans leurs plaintes. « Nous en sommes conscients. C’est pourquoi, nous envisageons des mesures pour mettre fin à ces pratiques qui ne nous honorent pas » a indiqué Moussa Mara. Mais, avertit le Premier ministre, si les commerçants ne sont pas en règle, qu’ils changent d’attitude. Que les versements de pots de vin soient arrêtés immédiatement pour aider le gouvernement à lutter efficacement contre la corruption.
D’autres ont demandé la création d’empois au pays pour faciliter leur retour à la maison. Des fonctionnaires en poste dans les instances de la CEDEAO ont déploré la décroissance du nombre de cadres maliens au sein de cette instance sous régionale. Pour eux, il est temps d’y remédier par une redynamisation de notre diplomatie. A ce sujet précis, notre ambassadeur Mahamane Amadou Maiga a clairement indiqué qu’il s’agit plus d’une compétition individuelle qu’une défaillance diplomatique. Les postes statutaires dédiés à notre pays, dit-il, sont bien pourvus. Pour les postes techniques nécessitant un appel à concurrence internationale, il faut être à niveau pour les décrocher par voie de concours.
Le chef du gouvernement a pour sa part souligné que cette difficulté pose à nouveau le problème de formation. Concernant les autres difficultés soulignées, Moussa Mara a promis de travailler à améliorer les conditions de vie et de travail de tous les Maliens, y compris ceux de la diaspora.
Avant de prendre congé de nos compatriotes, le chef du gouvernement a insisté sur le respect des lois et des consignes de sécurité du pays hôte. « Ne prêtez surtout pas le flanc » leur a t-il dit. Il a salué l’ambassadeur Maiga en raison de la bonne entente avec nos compatriotes du Nigeria. Dernière recommandation de Moussa Mara : n’acceptez jamais de corrompre un agent en service. « Si vous avez raison, ne donnez pas un sou aux agents en poste quand vous voyagez».
A. M. C
DES RENCONTRES FORT UTILES
En marge du 24 ème Forum économique mondial qui s’est déroulé à Abuja, le Premier ministre Moussa Mara a rendu une série de visites de courtoisie et a eu des rencontres d’échanges avec de nombreux investisseurs intéressés par notre pays.
Première personnalité rencontrée, c’est le Premier ministre ivoirien, Daniel Kablan Duncan. Les deux personnalités ont parlé de sujets qui « leur tiennent à cœur », selon le Premier ministre ivoirien qui s’est dit très honoré de la visite de Moussa Mara. A l’issue de leur conversation, les deux chefs de gouvernement ont décidé d’activer très rapidement la commission mixte des deux pays. « Nous avons parlé d’oléoducs, de chemins de fer, entre autres» a confié le chef du gouvernement ivoirien qui a préconisé une rencontre très prochaine des ministres des Affaires étrangères des deux pays pour booster la coopération sous régionale. Il a remercié son «cadet » pour l’honneur qu’il lui a fait avant de renouveler sa disponibilité à tout mettre en œuvre pour consolider les liens d’amitié et de fraternité entre Yamoussokro et Bamako.
Le Premier ministre Moussa Mara poursuivi son ballet diplomatique avec la visite rendue à son homologue nigérien Brigi Rafini. Au chef du gouvernement du Niger, le Premier ministre Moussa Mara est allé porter un message de gratitude de notre peuple. Le Niger est en effet l’un des pays amis qui n’a jamais fait mystère de son engagement à nos côtés dans la résolution de la crise sécuritaire du nord. C’est justement à cause de cet engagement « invariable » et « les efforts de médiation » que les autorités de notre pays ont tenu à remercier et féliciter le Niger, a dit le chef du gouvernement.
Troisième personnalité et non des moindres que Moussa Mara a rencontrée : le Premier ministre chinois, Li Kiqiang. Les promesses de ce côté sont tout simplement à la hauteur des relations amicales et fraternelles unissant les deux pays. Le Premier ministre chinois a donné l’assurance à Moussa Mara que tous les engagements que son pays a pris avec le nôtre seront respectés. Et dans les délais. Mieux la rencontre à surtout permis de donner corps à un autre projet d’envergure : la construction du chemin de fer Bamako-Conakry. Cette infrastructure servira notamment à l’exploitation du gisement de fer de Kita qui disposerait d’une réserve de 500 millions de tonnes avec une teneur encourageante.
De son côté, le Premier ministre Mara a reçu la visite d’hommes d’affaires japonais, allemands ainsi que d’investisseurs de plusieurs autres contrées. Ils sont venus échanger avec le chef du gouvernement et lui dire leur disponibilité de travailler avec notre pays. Moussa Mara les a assurés qu’ils se sentiront chez eux dans un pays en chantier où toutes les conditions sont en train d’être réunies pour la promotion de l’investissement.
A. M. C