Mondoro, commune située dans le cercle de Douentza, région de Mopti (au centre du Mali), est de nouveau frappé. Le poste de sécurité des Forces armées maliennes de cette localité, frontalière avec le Burkina Faso, a subi, vendredi 4 mars 2022, une attaque au véhicule piégé. Le bilan provisoire communiqué par les autorités maliennes de la transition fait état de 70 terroristes et de 27 militaires tués, de 33 blessés et de 7 portés disparus du côté de l’armée malienne ainsi que des dégâts matériels. Le plus lourd bilan depuis le début de l’année 2022. Un deuil national de trois jours, à compter du samedi 5 mars 2022, a été décrété par le président de la transition Assimi Goïta.
Après une visite de dix jours, du 8 au 18 février 2022, au Mali, Alioune Tine, expert indépendant des Nations unies pour la situation des droits de l’homme au Mali, avait pourtant constaté l’amélioration de la situation sécuritaire dans le pays pour la première fois depuis 2018. « Pour la première fois depuis le début de mes visites en 2018, on note une amélioration tangible dans le domaine sécuritaire, sur la question des personnes déplacées, des droits humains et des dynamiques de paix endogènes, surtout au Centre du Mali », a-t-il écrit dans sa déclaration de fin de mission.
Le même constat est fait par plusieurs citoyens dans les zones, jadis sous le contrôle des groupes armés terroristes. Des zones dans lesquelles les déplacés commencent d’ailleurs à retourner s’installer, selon les déclarations du Premier ministre Choguel Kokalla Maïga.
Départ des partenaires
Cette montée en puissance « tangible » de l’armée malienne intervient alors que certains partenaires du pays, notamment la France et d’autres pays européens de la Task Forces Takuba, ont annoncé leur départ du pays en raison de certaines incompréhensions avec les autorités maliennes de la transition au sujet des textes qui régissent leur présence.
L’attaque du vendredi dernier survenant dans un tel contexte est interprétée par bon nombre d’internautes comme une conséquence claire de ce divorce, notamment entre la France et le Mali, en termes de coopération militaire. « Les militaires maliens n’ont pas pu bénéficier d’appui aérien Barkhane pour repousser comme ce fut le cas le 23-24 janvier 2021 », a twitté sur son compte un journaliste-analyste français qui fait référence à l’attaque simultanée du camp de Mondoro et de Boulikessi en 2021. Une attaque au cours de laquelle « la force Barkhane a déclenché une patrouille d’hélicoptères Tigre qui s’est rendue sur place afin d’appuyer les FAMa ».
Pour mémoire, en novembre 2019, l’attaque contre le camp d’Indélimane (à la frontière nigérienne), au nord-est du Mali, a fait 49 morts du côté de l’armée malienne. Et cela malgré la présence du partenaire à l’époque, mais aussi de celle des autres forces militaires étrangères opérant sur le sol malien. Suite à cette attaque, TV5 Monde soulignait : « Une nouvelle attaque meurtrière qui montre que les djihadistes gagnent chaque jour du terrain ».
Situation dans des pays voisins
Cette nouvelle attaque contre le camp de Mondoro mérite dès lors d’être traitée sous d’autres angles que celui du seul départ des forces étrangères, qui ne collaboraient plus avec les forces armées maliennes dans quelques mois — en raison des tensions diplomatiques entre Bamako et Paris.
Ce qu’il ne faudrait pas perdre de vue aussi dans cette « tragédie » de Mondoro, commune située à la frontière burkinabè, c’est surtout la recrudescence de la crise sécuritaire dans le pays des hommes intègres depuis quelques mois. On se rappelle aussi des attaques au Bénin qui ont fait neuf morts et douze blessés, en février 2022. Des attaques à la bombe artisanale, dont des auteurs ont tués plus tard par l’armée française au Burkina Faso. Ce qui laisse comprendre l’irrésistance des frontières à la menace terroriste.
Dans la même dynamique, l’incident de Mondoro peut être également tributaire de la libération des chefs terroristes par le Niger, en fin février 2022. Les pays dépendent les uns des autres, surtout sur le plan sécuritaire. Les États du Sahel doivent intégrer cette évidence dans leur plan de lutte contre cette menace sécuritaire, notamment pour l’efficacité des opérations de la force conjointe G5 Sahel.
Chiencoro Diarra