L’effectif du Stade malien de Bamako des années 1992-1993 en termes de bons résultats, de sensations fortes et de cohésion est comparable à la génération du premier doublé en 1984. Celle-ci est le fruit du travail de feu Mamadou Kéïta dit Capi (il avait prédit le parcours triennal de cette équipe) pendant que l’autre était composé dans sa majorité de joueurs venus divers horizons. Une comparaison des deux générations permet de comprendre qu’elles ont chacune écrit l’une des meilleures pages du club : un doublé, trois Coupe du Mali (1984, 1985, 1986), une finale de Coupe Ufoa perdue. Les Seydou Diarra dit Platini, Yacouba Traoré dit Yaba, Lassine Soumaoro, Bréhima Guèye, Abdoulaye Kaloga, Aly Diarra, Mamadou Coulibaly dit Kouicy, Bafing Coulibaly, etc. ont fait ce beau parcours.
Le tableau de leurs cadets comprend une Coupe Ufoa (1992), une Coupe du Mali (1992). L’histoire sert parfois de repère pour s’inspirer du présent. Ce qui nous amène à annoncer notre héros de la semaine, qui appartient aux deux générations citées des Blancs de Bamako : ex-international Mamadou Coulibaly dit Brin. Il évoluait au poste de dépositaire, avant de finir sa carrière comme latéral droit. Au lendemain du sacre du Stade en Coupe Ufoa, il décide d’aborder une nouvelle page de sa vie et prend sa retraite footballistique. Pourquoi ? L’enfant de Banankabougou en Commune VI du district de Bamako, dans un long entretien, signe son passage dans la rubrique “Que sont-ils devenus ?”
amadou Coulibaly dit Brin refuse d’être un fataliste. Loin d’être têtu, il ne tombe jamais dans le complexe et ne cesse de croire en ses potentialités. Il affirme toujours que la peur, le complexe font de l’être humain une victime résignée. Toutes qui prouvent qu’il était un joueur très sérieux, qui n’a pas entravé sa carrière par des comportements négatifs.
A son transfert au Stade malien, lors de la saison 1985-1986, il avait déjà en poche son brevet de technicien en comptabilité et un Cap en banque. Les dirigeants en le sollicitant pour jouer dans leur club, ont dit que son recrutement à la BMCD ne souffre d’aucune ambiguïté parce qu’il a les diplômes requis. Malheureusement cette promesse n’est pas tenue. Mais, Brin, en raison de son sérieux, sa discipline et surtout son amour pour le Stade malien ne se plaint pas.
Nous l’avons connu dès ses premières semaines au club blanc, en son temps nous étions les cadets du centre de formation. Bon nombre de supporters se posaient la question de savoir comment il se frayerait un chemin dans une pléiade de vedettes et de cadres. Même son entourage ne partageait pas sa volonté de quitter une équipe communale pour directement intégrer un grand club.
Pourtant, c’est toute une crème de dirigeants du Stade malien qui va le chercher. Sociétaire de l’AS Commune VI, il brille et joue la finale de la Coupe corporative avec l’INPS, battue en finale par la Sonatam. Informé en retard d’un rendez-vous du président Kéké à son retour de la France, Brin opte plutôt pour son club de cœur, le Stade malien de Bamako.
Paradoxalement, sa première séance d’entraînement le décourage. Personne ne s’intéresse à lui. Il disparaît pendant une semaine au bout de laquelle les dirigeants formalisent tout et l’invitent à reprendre les entraînements. Le coach Molobaly Sissoko lui donne l’opportunité de présenter sa carte de visite. Il étale son talent en tant que dépositaire. La Super Coupe contre l’AS Réal fut son baptême du feu et le journal “Podium” le surnomme sur son poster “Mamadou Coulibaly dit Brin, un jeune super Star”.
Quel était son sentiment avant le match ? “C’était le début d’une épreuve difficile. Un novice, en l’espace de trois semaines, gagne une place de titulaire dans une finale de Coupe au milieu des cadres de l’équipe. Les tenants et les aboutissants d’un tel scénario n’étaient pas à négliger, pour éviter d’être une étoile filante. Au milieu de la semaine, c’est Abdoulaye Kaloga qui m’a révélé ma titularisation pour le match à venir. C’est dans les vestiaires que j’y ai cru, après le classement donné par l’entraîneur. Sur le terrain avant le coup d’envoi, le Stade, plein à craquer, m’a ému. Dans l’adolescence, j’avais de la peine à accéder au terrain, faute de billet. Aujourd’hui, je suis un acteur dans ce même stade Omnisports. Cela m’a beaucoup marqué.
Le premier coup de sifflet dissipe ce rêve lointain. Le Stade malien menait par deux buts à un, dont l’un portait ma signature. Malheureusement, notre gardien dans sa relance servit Amadou Pathé Vieux Diallo aux abords de la surface de réparation. Pour qui connait ce joueur, c’était l’égalisation. Le Stade s’est incliné aux tirs aux buts. Cette défaite m’a choqué, mais il fallait l’accepter et se projeter sur l’avenir”.
Six saisons
Comment comprendre que le secrétariat du Stade de façon inexplicable mette du temps pour formaliser son transfert. Finalement le délai est expiré. Brin ne pouvait pas participer aux compétitions officielles. Il se contente seulement du tournoi de l’amitié auquel les Blancs sont invités à Ouagadougou. C’est pratiquement en fin de saison que sa situation fût régularisée. Ce qui sonne le déclic pour la carrière de Mamadou Coulibaly, qui dure six saisons, avec un bilan de trois coupes du Mali (1988, 1990, 1992), deux titres de champion (1987, 1989) et une coupe Ufoa (1992). Il avait déjà été convoqué en équipe nationale, à plusieurs reprises pour les phases de présélection.
Sa véritable sélection date de 1990 quand l’entraîneur Kidian Diallo fonde un réel espoir sur lui. Coup de théâtre ou coup de foudre, Brin commet l’imprudence de jouer dans la rue à quelques heures du départ des Aigles pour le Cameroun, comptant pour les éliminatoires aller de la Can Sénégal 1992. Kidian Diallo mis devant le fait accompli, suite à la blessure de Brin, se rabat sur l’un des meilleurs latéraux du moment, Malamine Touré dit Mala de l’AS Réal. Certes, il réintègre l’E. N. après le départ de Kidian, mais c’était pour le Tournoi de la Cédéao au Nigeria.
De l’AS Commune VI au Stade malien, Brin a toujours évolué au poste de milieu offensif. A partir de 1990, il est devenu latéral droit moderne. A l’issue de la présélection des juniors en 1989, par le plus pur des hasards Salif Keita dit Domingo au moment de constituer les compartiments, le fait jouer en défense.
Brin joue tellement bien à ce poste que Salif demande à l’entraîneur du Stade de le maintenir au poste de latéral. Et contre sa volonté Brin devient pour toujours un as de la défense. Le problème se pose au niveau de l’âge qui ne peut être modifié parce que Brin et Paul Abiad ont joué des compétitions internationales avec le Stade malien. Donc leurs identités sont fichées à la Caf. Ils rejoignent leur club, la mort dans l’âme.
Brin par dépit prend sa retraite. “Au lendemain du sacre du Stade malien en Coupe Ufoa, les joueurs ont reçu chacun 80 000 F CFA. Cela m’a beaucoup déçu. Dès lors j’ai mûri l’idée d’arrêter. Pendant que nous observions la saison morte, le Stade est invité pour un match amical contre l’Africa Sports d’Abidjan. Le président de ce club remet à chacun 100 000 F CFA, avant même le match. Cela m’a exacerbé davantage. Au cours du match, j’ai stimulé une blessure pour ne plus réapparaître sur un terrain de football”.
La page de la carrière sportive se referme à ce niveau. Il s’exile au Danemark pour quatre ans. A son retour, en 1998, Brin crée une entreprise de prestation de services. Parallèlement, il ouvre une boutique de pièces détachées importées. A présent il est dans le business. Ce qui lui permet d’assurer son indépendance.
Mamadou Coulibaly est marié et père de sept enfants. Dans la vie, il aime le football, le jeu de Scrabble, le Maracaña. Il et déteste l’hypocrisie, l’injustice et le mensonge. Pour parler de ses bons souvenirs, il retient : son premier match avec le Stade malien, sa première sélection en équipe nationale et la Coupe Ufoa.
Son seul mauvais souvenir est relatif à sa blessure en équipe nationale.
O. Roger
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Source: Aujourd’hui-Mali