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Mali – Musique : Kassé Mady Diabiaté, le djeli de Kela

La discrétion de Kassé Mady Diabaté n’a d’égal que son talent. À Paris, il va enchanter le festival Africolor et le Café de la danse avec son nouvel album “Kiriké”.

Kassé Mady Diabaté artiste chanteur musicien kora guitariste

À Bamako, dans le quartier de Sebenikoro, peu après la maison du président de la République du Mali (IBK, rappelons-le, ne réside pas au Palais présidentiel en travaux sur la colline de Koulouba), vit au milieu des siens un homme de 65 ans, à la voix d’or, de velours, de rêve, magie d’hier et de toujours. Il s’appelle Kassé Mady Diabaté. Moins connu du public français que son compatriote Salif Keita, Kassé Mady est une révélation pour qui ne l’a jamais entendu, un choc, une surprise aussi : comment un tel talent n’est-il pas plus célèbre ? Le premier concerné évoque (en bambara plus souvent qu’en français) le fait qu’il est moins alphabétisé que d’autres, certains parlent d’une carrière accidentée avec une période française moins heureuse qu’elle n’aurait pu l’être, et un accident de la route, bien réel celui-là, dont heureusement Kassé Mady Diabaté s’est remis. Vu d’ailleurs, à commencer par l’Angleterre, en Afrique de l’Ouest, sans parler du Mali où il est un trésor national. L’artiste a depuis longtemps fait rayonner la mesure de son talent. De quoi le faire figurer dans le coffret-mémoire des dix ans du studio Bogolan de Bamako.

Un vrai djeli de Kela

Il habite au pied de la chaîne des monts mandingues, toujours relié à Kela, sa ville natale, haut lieu de la culture des djelis (griots) Diabaté, où la tradition veut qu’on célèbre non loin de là, à Kangaba, la version “officielle” de l’épopée de Soundiata, fondateur de l’empire du Mali. Kela tradition est d’ailleurs le titre du second album solo du chanteur. Auparavant, Kassé Mady Diabaté a chanté dans l’orchestre régional de Kangaba, puis au sein de l’orchestre “Maravillas du Mali” devenu “Badema national”. Il retrouvera le chemin de Cuba avec Toumani Diabaté, dont il a été plus d’une fois le compagnon de route, via le Symmetric orchestra dans l’albumAfrocubism.

Chez lui, la cour est accueillante, la famille nombreuse. Le maître des lieux – qui a quatre épouses – est tout sourire. Les déboires administratifs autour du visa, dont les artistes africains sont malheureusement coutumiers ne lui ôtent pas sa sérénité. Autour du thé, Kassé Mady raconte comment il a été placé très jeune sous le signe de son grand-père qu’on surnommait “Fama Diabaté”, Fama signifiant “celui qui a le pouvoir”. “Il est mort avant ma naissance mais dès que je me suis mis à chanter, il m’a été dit que ma voix était à la hauteur de la sienne”, dit-il.

Sous la lumière grâce à un jeune label

À l’écoute, par exemple, de “Sadjo” (l’hippopotame, qui signifie Mali), dans son cinquième album solo Kiriké (qui signifie “en selle”), il est difficile de contenir son émotion. Ce disque a tout pour porter la reconnaissance du chanteur malien à la hauteur de son art, comme l’ont souhaité le grand joueur de Kora Ballaké Sissoko et le violoncelliste et producteur Vincent Segal qui en sont à l’origine et apportent leurs talents à cette réalisation. Tout comme Lansiné Kouyaté, balafoniste, et Makan Tounkara, dit Badié, joueur de ngoni. Ces anciens compagnons de l’Ensemble instrumental du Mali sont issus, comme Kassé Mady, de grandes familles de musiciens depuis des générations. Il fallait l’audace d’un label comme No format pour remettre à sa juste place cet artiste malien si modeste, avec des chansons reprises du répertoire classique et d’autres.

“J’ai commencé ici à les écrire, puis les ai complétées ensuite en enregistrant près d’Angoulême”, précise Kassé Mady Diabaté qui travaille dans cette cour, avec sa guitare. “Je reçois souvent la visite de jeunes qui cherchent des conseils. Si la nouvelle génération est attirée par le rap, il y a d’autres chanteurs parmi la jeunesse qui continuent à suivre mon style”, précise-t-il. Et c’est à lui que l’on vient aussi demander de chanter l’hymne à la photographie africaine, écrite par Simon Njami pour un clip mémorable d’une édition de la Biennale des rencontres photo de Bamako !

Hera, vivre en paix

Kassé Mady fait donc figure d’ancien, très impliqué dans la fonction de conseil du griot, chacune de ses chansons sur l’amitié, la rumeur, ou la paix le prouve. “Hera”, c’est à dire “vivre en paix” ne doit pas être un vain mot pour son pays, à lui d’abord de l’incarner. “D’autant qu’ici”, remarque Violet Diallo (personne ressource de taille dans le paysage musical bamakois et qui a traduit les chansons du bambara pour le livret du disque), la cité qui abrite la maison se nomme “Kayira”, ce qui signifie aussi cette paix. Le chanteur fait les louanges de celui qui lui a offert cette maison dans un disque qui célèbre l’importance des liens entre les êtres. Dans sa nombreuse descendance, l’artiste entend déjà les voix de demain, celles de ses filles, à commencer par Awa, et de son neveu Zoumana Diabaté.

Ancien ? Certes. Mais il a gardé une malice au fond des yeux, et tout autour de lui une aura perceptible, qu’il diffuse depuis sa cour bamakoise jusqu’aux coeurs de ceux qui découvriront Kiriké, écrin musical pour sa voix.

Remerciements à Violet Diallo, Mamadou Diabaté de l’institut français du Mali, et à Salif Traoré photographe pour leur aide à la traduction lors de cette rencontre.

Deux dates pour Kassé Mady Diabaté : le 21 novembre, dans le cadre d’Africolorqui fête 25 ans. C’est au théâtre du Garde-chasse, aux Lilas ; le 2 décembre au Café de la danse Paris XI pour les 10 ans du label No Format.

 Source: afrique.lepoint.fr
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