Le 19 juin dernier, la tension est montée d’un cran à Kidal, fief des rebellions du Nord du Mali – en particulier du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA) et du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Ce jour-là, des combattants du Groupe autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia) du général El Hadj Ag Gamou érigent deux check-points à Kidal, aux entrées nord et sud de la ville. En guise de protestation, les combattants du HCUA répliquent par des tirs de sommation avant de menacer de démanteler par la force les nouvelles positions du Gatia.
« Lorsque l’accord de paix a été signé, le Gatia n’était pas à Kidal, mais leur présence ne nous pose pas de problème ; ce qui nous pose problème, ce sont les mouvements de leurs troupes et leurs check-points improvisés », explique Almouzamile Ag Mohamed, porte-parole du HCUA. Une commission de bons offices est cependant rapidement mise sur pied pour régler le différend à l’amiable.
La présidence du conseil régional dans le viseur
Le Gatia accepte alors de lever le check-point sud, mais garde celui de l’entrée nord de la ville. Cela ne permet pas de faire baisser la tension car le fond de problème est politique : pour le Gatia, il faut coûte que coûte avoir une présence militaire à Kidal afin de peser de tout son poids dans le règlement de la crise. Son chef, le général El Hadj Ag Gamou, qui est retranché avec quelques-uns de ses combattants à Takalote, à 30 km au sud-est de Kidal, vise en fait le poste de président du conseil régional de la future administration intérimaire, prévue par l’accord de paix.
Dans le cercle des notables du nord du Mali installés à Bamako, il se dit que le général Ag Gamou est déterminé, cette fois-ci, à aller jusqu’au bout, à tel point qu’il serait prêt à quitter l’armée malienne en abandonnant son grade de général malien. « Nous pensons que le gouverneur nommé par Bamako à Kidal est proche de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), donc nous souhaitons que le président du conseil régional revienne au Gatia pour un réel partage du pouvoir à Kidal », confirme Fahad Ag Almahmoud, porte-parole du mouvement à Bamako. « Le Gatia se base sur les pactes d’honneurs signés au mois d’octobre 2015 à Anéfis entre les tribus touarègues pour demander ce partage de pouvoir à Kidal. Celui-ci est effectif dans toute la région sauf à Kidal même », ajoute-t-il.
« Nous pensons au contraire que le gouverneur nommé a Ménaka est un proche de la Plateforme (mouvements pro-Bamako), et que nous ne sommes pas assez représentés dans cette région ni même à Gao et Tombouctou mais nous n’avons jamais érigé de barrages sur des positions de la Plateforme ou de l’armée malienne dans cette région », explique Almouzamile Ag Mohamed, porte-parole du HCUA. Qui ajoute : « Nous souhaitons que le Gatia cesse ces nouvelles conquêtes pour permettre l’application de l’accord de paix ».
Le Niger sollicité
Face à l’inquiétude suscitée par ces tensions persistantes, deux ministres maliens, Zahabi Ould Sidi Mohamed (Réconciliation) et Mohamed Ag Erlaf (Réforme de l’État) ont rencontré le premier ministre nigérien, Brigi Rafini, en marge de sa visite à Bamako, le 2 juillet dernier, pour lui demander de mener une médiation à Kidal. Celui-ci connaît bien le général Gamou, depuis l’exil de ce dernier au Niger avec ses troupes suite à la rébellion des mouvements du nord en 2012.
Ainsi, mardi 5 juillet, le premier ministre nigérien, Brigi Rafini appelle Gamou pour lui demander de venir discuter à Niamey avec les autorités maliennes et la CMA, qui sera représentée par Bilal Ag Acherif, pour trouver une solution. Le général accepte mais pose une condition.
« Il a demandé la présence de Mahamadou Diagouraga, le haut représentant de l’État dans le processus de paix », confie Fahad Ag Almahmoud. Le président malien Ibrahim Boubacar Keita, approché par les autorités nigériennes à ce sujet, a accepté d’envoyer son haut représentant à la rencontre d’abord fixée pour la fin de la semaine puis reportée. Les délégations maliennes sont attendues à Niamey le 11 juillet pour tenter de concilier les différents points de vue.
Source : jeuneafrique