Tout ceci pour rien, peut-on avoir l’audace de le dire ? Sinon, quelle peut être l’image de la nouvelle équipe de Moctar Ouane II ? C’est la question que beaucoup d’observateurs se posent depuis vendredi dernier.
En effet, le Premier Ministre, Moctar Ouane a présenté vendredi la démission de son gouvernement et a été chargé de former un nouveau cabinet de « large ouverture » dans un climat social dégradé et à moins d’un an d’importantes échéances électorales.
Moctar Ouane, lui, un ancien diplomate, dirige le gouvernement de Transition mis en place fin septembre après le putsch du mois d’août après avoir présenté dans la matinée la démission de son équipe au président de la Transition, Bah N’Daw, a été immédiatement reconduit dans ses fonctions.
« Les échanges entre le président et le Premier ministre ont commencé hier soir sur une éventuelle ouverture du gouvernement », selon un conseiller du président. Moctar Ouane « doit former un gouvernement de large ouverture en tenant compte de certaines recommandations du président, qui a écouté la classe politique, les forces vives et les leaders religieux, la semaine dernière », a-t-il ajouté. Le Premier Ministre, au sortir de cette rencontre avec le président, a entamé les consultations pour la formation de la nouvelle équipe gouvernementale. Toutes les forces vives de la nation ont été consultées et même le Mouvement du 5 juin-rassemblement des Forces Patriotiques (M5-RFP) avec qui le président s’est récemment entretenu. Le M5-RFP a été sollicité pour fournir Cinq (5) noms pour le nouveau gouvernement, selon une source proche du mouvement de contestation.
Le M5-RFP ne rentrera pas au gouvernement
Le Mouvement du 5 juin qui a exigé à cor et à cri la “rectification’’ de la Transition ne semble pas prêt à faire son entrée dans la nouvelle équipe gouvernementale, qui sera mise en place dans les prochains jours.
“Le Comité Stratégique du M5-RFP prend acte de cette démission, et rappelle qu’il n’a été ni consulté ni associé à ce changement, qui, de toute manière, ne répond ni à ses attentes ni à ses dix (10) mesures formulées le 6 mai 2021, lors de sa rencontre avec le président de la Transition, Bah N’Daw’’, lit-on dans un communiqué du M5-RFP en date du 15 mai 2021.
Pour le M5-RFP, les mesures énoncées resteront lettre morte aussi longtemps que la réalité du pouvoir sera détenue par la Junte militaire. Le mouvement pointe du doigt également la problématique du Conseil National de Transition (CNT), qu’il qualifie “d’illégitime et d’illégal’’, qu’il faut dissoudre.
Choguel et ses camarades de lutte maintiennent leur position quant à la mobilisation annoncée après le Ramadan. “Le M5-RFP, conformément à son programme de mobilisation et de manifestations populaires déjà annoncé, invite toutes les Militantes et tous les Militants, et au-delà tout le Peuple malien de l’intérieur et de la Diaspora, à rester mobilisés et attentifs à ses mots d’ordre jusqu’à l’atteinte des objectifs de Rectification de la Transition pour la Refondation du Mali’’.
Il convient de rappeler que le Mouvement du 5-Juin fut en 2020, le fer de lance de la contestation achevée par le putsch, a réclamé la semaine passée, lors de sa rencontre avec le président Bah N’Daw, la « dissolution » du gouvernement de Transition, ou encore la « relecture » d’un important accord de paix avec certains groupes armés.
Cependant, le front social n’est pas du reste. Celui-ci est en ébullition depuis un moment avec la plus grande et vieille centrale syndicale. Le plus grand syndicat, l’UNTM a, pour sa part, déposé un préavis pour une grève de cinq jours à partir de ce lundi, reconductible.
Rappelons également que cette situation se produit après le départ du médiateur de la CEDEAO dans la crise malienne, l’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan. Il a indiqué mercredi à Bamako que les autorités risquaient de devoir fixer des priorités étant donné le peu de temps qui leur reste pour mener à bien cette Transition appelant tous les acteurs à travailler « main dans la main ».
La politique de la chaise vide est-elle la bonne ?
Il est bien vrai que la situation du pays est critique en cette période de Transition. Mais peut-on, au regard du temps qui est imparti, nommer un nouveau Premier Ministre ? Ce qui certainement va falloir du temps au nouveau patron du gouvernement à tout recommencer. Mais ce qui est un peu flou dans la demande du M5-RFP, c’est la dissolution d’un gouvernement dont on refuse la participation dans la future équipe gouvernementale. Le M5 voulait-il la Primature ?
En tout cas, du côté M5, Choguel a donné quelques explications sur lesquelles nous y reviendrons. Il faut dire que la politique de la chaise vide n’a jamais arrangé une partie, cependant le plus grand perdant pourrait être le camp M5 qui sera désormais mis de côté et même perdre sa légitimité auprès du peuple dépassé par la souffrance.
Bourama Kéïta
Source: LE COMBAT