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« Les conditions posées par le Niger étaient inacceptables pour l’Allemagne »

L’Allemagne va fermer, d‘ici au 31 août, sa base aérienne au Niger. Une décision prise à la suite de l’échec des discussions menées avec les autorités de Niamey sur la sécurité des soldats allemands. Christina Gerhäusser a interrogé Christian Schmid pour lui demander son avis sur la question. Il est député du SPD et membre de la Commission Défense du Bundestag.

Départ du Niger

Au 31 août, tous les soldats de la Bundeswehr devront avoir quitté la base allemande de Niamey. Le rôle principal de cette base aérienne était d’effectuer des missions de transports pour le compte de la Minusma, la mission de l’Onu au Mali.

Christian Schmid, député social-démocrate, estime que la fermeture de la base présente certes un défi logistique, mais que celui-ci n’est pas insurmontable.

« La Bundeswehr et le ministère de la Défense ont montré lors du retrait du Mali qu’ils étaient en mesure d’organiser un tel retrait », déclare le député à la DW.

La Bundeswehr avait obtenu de maintenir sa base aérienne le temps de négocier avec les autorités nigériennes sur la suite de la présence militaire allemande au Niger, au-delà de la date du 31 mai dernier, qui marquait la fin de la participation des soldats allemands à la Minusma.

Le problème de la sécurité des soldats allemands

Depuis le putsch de juillet 2023, qui a porté des militaires au pouvoir à Niamey, le dialogue est plus difficile. Les autorités de transition nigériennes ont déclaré ne pas pouvoir garantir la sécurité des membres de la Bundeswehr au Niger.

C’est sur ce point que les négociations ont achoppé avec le gouvernement allemand, comme l’explique Christian Schmid, député SPD et membre de la Commission de Défense du Bundestag :

« Nous devons simplement nous demander jusqu’à quel point nous sommes prêts à accepter les conditions de régimes qui défendent des valeurs contraires aux nôtres. […] Nous ne pouvons pas laisser un gouvernement comme celui-là nous mettre la pression. Leurs conditions sont inacceptables de notre point de vue, c’est pourquoi nous partons. »

Un départ des militaires, souligne l’élu, qui ne marque pas l’arrêt de tous les échanges entre les deux pays.

Ne rien laisser aux mains des Russes

Du point de vue de l’organisation, Christian Schmid rappelle que l’Allemagne va devoir se pencher sur le matériel qui peut rester sur place et sur les installations trop sensibles pour être transmises aux soldats nigériens… et à leurs alliés.

« Nous savons que le régime en place au Niger, comme celui du Mali, est prêt à coopérer avec la Russie, déclare Christian Schmid. Le nombre de soldats, de membres de l’ancien Groupe Wagner, qu’on appelle maintenant Afrika Corps, n’est pas suffisant pour leur permettre de reprendre des bases militaires complètes. Mais nous devons partir du principe que les infrastructures que nous laisserons seront utilisées par l’armée nigérienne dans sa coopération avec des forces russes. »

Pour Christian Schmid, la plus grosse perte liée à la fermeture de la base allemande au Niger, c’est la confiance :

« Bien sûr, nous aurions voulu conserver là-bas une base logistique qui nous permette de réagir à toute éventualité, par exemple si une opération d’évacuation était nécessaire au Soudan. Pour avoir une base. Mais nous perdons surtout la base de confiance dans notre coopération. »

« C’est dommage pour nous, ajoute le député, mais aussi pour les autorités nigériennes qui ne se sont pas encore rendu compte, je pense, de cette confiance qu’elles sont en train de mettre à mal. »

Quel redéploiement dans le Sahel ?

Quant à savoir quels pays pourraient désormais abriter une telle base allemande dans la sous-région, le député allemand hésite.

« On avait songé au Sénégal, affirme-t-il, mais Dakar est moins bien placée géographiquement pour accéder aux foyers de crises en Afrique que Niamey. »

Selon lui, l’Allemagne va devoir désormais « examiner les conditions qui nous sont proposées, voir où une collaboration est possible sur une base de confiance avec les autorités en place et nous déterminer en fonction. Les responsables du ministère de la Défense devront faire ce grand écart, puis nous, les députés, examinerons très précisément leurs propositions. »

Ni le Mali ni l’Afghanistan

Pour Christian Schmid, le coût est secondaire :

« Il ne faut pas que nous commettions cette erreur d’opposer gestion de crise et partenariat de défense. Les deux sont importants. Et on voit bien que là où nous laissons un vide, il est rempli par les forces russes. Nous devons prendre en compte la stabilité internationale dans nos décisions, pas seulement le coût. Il s’agit d’établir une relation de confiance et d’être présent au bon endroit. Nous ne parlons plus de grandes missions comme en Afghanistan ou au Mali, mais d’une présence plus discrète, comme ce qui était prévu à Niamey. Donc l’aspect financier ne doit pas présider à nos choix, mais plutôt de savoir avec qui et où nous sommes en mesure de coopérer sous quelle forme ? »

Espoir pour l’avenir

Enfin, Christian Schmid relève que pour l’instant, les alliances avec la Russie n’ont pas permis de mettre un terme au terrorisme dans les trois pays de l’Alliance des Etats du Sahel, le Niger, le Mali et le Burkina Faso.

« A mon avis, la porte ne nous est pas totalement fermée. Dans un, deux ou trois ans, il se peut que ces pays se tournent de nouveau vers nous. Et alors nous devrons nous demander dans quelles conditions une coopération peut à nouveau être possible. »

Par ailleurs, Christian Schmid veut croire que l’Alliance Sahel, présidée par la ministre allemande de la Coopération, Svenja Schulze, et basée à Nouakchott, permet à l’Allemagne de « garder un pied dans la sous-région ».

Auteur: Sandrine Blanchard, Christina Gerhäusser

DW

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