Face à la dure réalité de la vie, les manifestations monstres, les déclarations fracassantes, les grands débats sur les plateaux de télévisions ont cédé la place au découragement. Et les langues commencent à se délier du côté des animateurs des associations, organisations et mouvements de soutiens à la transition. Ils sont très critiques envers les autorités de la transition qu’ils accusent de s’écarter de la revendication principale qui a eu raison du régime d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK), le 20 août 2020, à savoir le changement.
Depuis un certain temps, l’atmosphère semble polluée entre les dirigeants de la transition et leurs soutiens de taille. Qu’ils soient animateurs des réseaux sociaux ou des organisateurs des manifestations grandioses, les flèches partent de tous les côtés sans pourtant atteindre encore les cibles. Ils ne ménagent plus les autorités de la transition sur lesquelles ils avaient placé une confiance aveugle pour l’avènement d’un véritable changement de comportement, en rupture avec les mauvaises pratiques instaurées par les démocrates prédateurs. Ils les accusent d’ailleurs de mauvaise gouvernance ou de pilotage à vue des affaires de l’État, moyen par lequel les politiciens de carrière du Mouvement démocratique sont passés pour piller le Trésor public.
Les dernières sorties du porte-parole du mouvement Yèrèwolo- Débout sur les remparts, Adama Diarra dit Ben le Cerveau, attestent que le clash est imminent entre la transition et ses soutiens les plus fidèles. Dans des vidéos relayées sur les réseaux sociaux ou sur des ondes des radios FM de la place, il plante le décor du climat délétère qui prévaut désormais entre les amis d’hier. Il dénonce avec force les maux qui minent aujourd’hui la gestion de la transition. Parmi ceux- ci, il cite entre autres les recrutements à la police, à la Caisse nationale d’Assurance Mmaladie (CANAM), la corruption au sein du Conseil national de transition (CNT), dont lui-même est membre, du gouvernement et à Koulouba, siège de la présidence de la République du Mali. Il invite par ailleurs le gouvernement à abandonner son projet de port obligatoire de casque dont l’application entrera en vigueur, en janvier 2023. Il qualifie la décision gouvernementale de mesure impopulaire à un moment où l’État est incapable de fournir le marché national en denrées de première nécessité pour soulager la souffrance des Maliens.
Le porte-parole du mouvement Yèrèwolo- Débout sur les remparts, sur un ton menaçant, dira que ceux qui s’adonnent à la corruption, n’auront pas d’autres choix que de mettre fin à cette pratique. Il déclare que leur lutte, c’est pour le Mali et non un soutien à un régime. Avant de conclure que de gré ou de force l’avènement du Mali Koura sera une réalité.
D’autres soutiens de la transition, pas des moindres, ont déjà sifflé la fin de la récréation. Ils projettent des manifestations de protestation, de dénonciation pour exiger du gouvernement un retour aux valeurs du M5-RFP (Mouvement du 5 juin-Rassemblement des forces patriotiques): le changement. Ils se plaignent du retour en force des anciens dignitaires des régimes déchus qui sont à l’origine de l’effritement de notre pays. Ils dénoncent avec véhémence aussi l’augmentation du nombre des membres du CNT. Une autre hémorragie financière à leurs yeux du budget national. Ils se disent trahis par les auteurs du coup d’État d’août 2020 sur lesquels ils avaient placé beaucoup d’espoir pour donner une nouvelle à la nation malienne qui a tant souffert de la gestion clanique des pseudo-démocrates.
À ce rythme, le clash est inévitable entre la transition et ses soutiens. Il intervient à un moment où le peuple malien supporte mal la mauvaise gouvernance liée à la cherté de la vie, à la boulimie foncière des tenants du pouvoir, à la corruption des nouveaux venus au pouvoir, à la justice à la tête du client, à une lutte contre la corruption au point mort, braquages, vols des biens, assassinats ciblés,. Bref, la souffrance est là. Aussi, assiste-t-on à la reprise des grèves par certains syndicats et de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM). Le clientélisme, le népotisme et le favoritisme ont de beaux jours devant eux.
Rien ne sert de maintenir une telle tension dans un pays confronté à d’énormes défis. Il est du devoir des autorités de se ressaisir pour désamorcer cette bombe sociale. Au grand bonheur du peuple malien. Sinon, les aigris et les frustrés de la transition qui ne rêvent que d’un tel scénario pour satisfaire leur souhait de vengeance sur les femmes et hommes qui prônent le changement pour nettoyer leur souillure démocratique des trente dernières années de l’histoire politique de notre pays.
Yoro SOW