Dans une grande interview accordée à notre rédaction, le major du service de néphrologie du CHU du Point-G, Moussa Guindo, explique ce que c’est que la dialyse.
Le Flambeau : Qui est Moussa Guindo ?
Moussa Guindo : Je suis le major du service de néphrologie du CHU du Point-G, depuis un peu plus de 20 ans, ma vie est liée à celui des personnes souffrant d’insuffisance rénale.
Le Flambeau : Il existe combien types de dialyse ?
Moussa Guindo : Il existe deux techniques de dialyse : l’hémodialyse ou rein artificiel : Le sang est filtré à travers une membrane artificielle. Cette technique nécessite la réalisation d’un accès facile au sang qu’on appelle l’abord vasculaire. Elle se déroule à domicile ou dans une structure de dialyse. La gestion de la prise en charge peut être publique, privée ou associative. Pour ce qui est de la dialyse péritonéale, elle se déroule en général à domicile. Il est possible de passer, sous certaines conditions, d’une technique à l’autre.
Le Flambeau : A quoi sert la dialyse ?
Moussa Guindo : La dialyse est un traitement de suppléance qui n’assure qu’incomplètement le remplacement de la fonction rénale. Elle débarrasse le sang des déchets et de l’eau (ou toxines) accumulés en excès dans le corps. Elle est en outre associée à des contraintes, notamment celles de se soumettre aux séances de dialyse et à un régime alimentaire strict, limité notamment en apports d’eau, de sel, de potassium et de phosphore.
Le Flambeau : Quand débuter la dialyse ?
Moussa Guindo : Quand la vie de tous les jours est rendue difficile par des symptômes comme la fatigue, la perte de l’appétit, les maux de tête dus à l’hypertension artérielle, les œdèmes des chevilles et l’essoufflement dus à la surcharge en eau et sel, et à l’anémie, elle peut devenir nécessaire lorsque le débit de filtration glomérulaire (DFG) est inférieur à 15 ml/mn/1,73 m², c’est-à-dire quand les taux d’urée et de créatinine sont trop élevés. La dialyse sera beaucoup mieux supportée si elle est commencée tôt, c’est-à-dire avant que n’apparaissent des signes de dénutrition par manque d’appétit (dégoût de la viande, nausées, etc.) ou de surcharge en eau et en sel.
Le Flambeau : Pouvez-vous nous schématisez une séance d’hémodialyse
Moussa Guindo : Le générateur d’hémodialyse sert à préparer le dialysat et à faire circuler le sang et le dialysat dans le dialyseur. Des dispositifs de contrôle et de surveillance permettent d’assurer le bon déroulement de la séance en toute sécurité. Le dialyseur quant à lui, est un filtre comportant des fibres synthétiques creuses dans lesquelles le sang circule, alors que le dialysat circule à contre-courant à l’extérieur de ces fibres. Ce dispositif permet les échanges entre les deux compartiments intérieur et extérieur. Ce passage répété tout le long de la séance de dialyse débarrasse le sang des déchets toxiques, corrige les anomalies biologiques et élimine l’excédent d’eau accumulé dans l’organisme. Le dialysat ou bain de dialyse est une solution liquidienne, préparée par le générateur d’hémodialyse, à partir d’une eau purifiée, dont la composition en sels minéraux se rapproche de celle du sang. Le circuit extracorporel permet, grâce à la ponction de la fistule artério-veineuse ou le branchement sur un cathéter d’hémodialyse, de prélever le sang à épurer, qui est réinjecté par l’aiguille dite veineuse. Le sang passe à l’extérieur du corps à travers le dialyseur, et revient “nettoyé” dans le corps grâce à la pompe du générateur d’hémodialyse.
Le Flambeau : Qu’est-ce qu’une fistule artério-veineuse ?
Moussa Guindo : Les veines superficielles n’ont pas un débit suffisant pour permettre l’hémodialyse. Pour cette raison, le chirurgien doit créer, sous anesthésie locale, une fistule artério-veineuse (FAV). Il s’agit de relier une veine à une artère proche, de telle sorte qu’une partie du sang artériel soit détournée dans la veine. Celle-ci va se dilater, sous l’effet de la pression du sang, et assurer un débit sanguin suffisant pour être facilement “piquable”. On choisit le plus souvent une veine de l’avant-bras ou du bras. La fistule doit être réalisée suffisamment tôt pour être bien développée au moment de la nécessité d’être dialyser.
Le Flambeau : Qu’est-ce qu’un cathéter d’hémodialyse ?
Moussa Guindo : Lorsqu’il n’existe pas de fistule artério-veineuse utilisable pour réaliser l’hémodialyse, il est possible de poser, sous anesthésie locale, un cathéter (sorte de tuyau en matière plastique souple) dans une grosse veine. Il peut être utilisé immédiatement pour réaliser la dialyse et rester en place de quelques heures à plusieurs semaines selon le type. Il est placé en général dans un gros vaisseau du cou ou de la cuisse.
Le Flambeau : Comment ponctionner la fistule artério-veineuse ?
Moussa Guindo : Deux piqûres sont nécessaires sur la fistule, avec des aiguilles de gros calibre pour faciliter le débit du sang : une aiguille dit artérielle sert à aspirer le sang à épurer ; une aiguille dit veineuse sert à injecter le sang épuré. Il est possible d’utiliser une pommade anesthésiante locale si la ponction de la fistule est douloureuse. Ces deux aiguilles sont reliées au circuit extracorporel de dialyse, lui-même branché au générateur de dialyse.
Le Flambeau : Combien de temps dure une séance d’hémodialyse ?
Moussa Guindo : La durée de la séance est une prescription médicale. Les séances durent en général 4 à 5 heures et se renouvellent en général 2 fois par semaine au niveau du chu du Point-G. La durée et la fréquence des séances sont adaptées à chaque personne en fonction du poids, de la diurèse résiduelle éventuelle et de la prise de poids entre deux séances.
Le Flambeau : Qu’est-ce qu’un abord péritonéal ?
Moussa Guindo : Pour utiliser le péritoine comme filtre, il faut créer un abord péritonéal. Il est nécessaire pour cela d’introduire chirurgicalement, dans la cavité péritonéale, sous anesthésie locale ou générale, un petit tuyau en plastique très souple appelé “cathéter”. Le cathéter sort en partie à l’extérieur du ventre. Il ne risque pas de se déplacer ni de tomber lorsque l’on bouge, car il est fixé à l’intérieur de l’abdomen. Il ne fait pas mal et ne gêne pas les mouvements. A son extrémité, on adapte une tubulure permettant de faire la dialyse.
Le Flambeau : Comment effectue-t-on la dialyse péritonéale ?
Moussa Guindo : Une fois en place, ce cathéter sert à introduire dans le ventre un liquide de dialyse, appelé “dialysat” contenu dans des poches plastiques stériles que l’on adapte à la tubulure. La cavité péritonéale peut contenir jusqu’à 3 litres de dialysat. Les échanges entre le dialysat et le sang permettent d’éliminer les déchets et, l’eau en excès. En quelques heures, ce dialysat est saturé. C’est pourquoi il faut renouveler régulièrement le liquide contenu dans la cavité péritonéale.
Réalisé par Kantao Drissa
Source: Le Flambeau