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Éditorial : Allez, messieurs les juges !

Sans applaudir des deux mains, il nous faut néanmoins tirer le chapeau aux juges. L’interpellation, la semaine passée, suivie de la mise sous mandat de dépôt de l’ancien président de l’Assemblée nationale et de son comptable pour concussion portant sur la bagatelle de 17 milliards de franc CFA, a surpris beaucoup, qui croyaient que la lutte contre la corruption et la délinquance financière n’avait été qu’un effet de mode, une mise en scène, un feu de paille. Ce n’est évidemment pas le seul gros dossier en la matière, mais le réveil des juges pour ces deux cas remet l’urgence de la tâche à nettoyer tous les écuries d’Augias. Il appartient au Chef de l’Etat, garant des biens de l’Etat qui ne sont autres que les propriétés des citoyens, de veiller farouchement à ce que tous les malfrats paient durement leurs forfaitures ; il a d’ailleurs invité, en septembre 2021, les magistrats à prendre, s’il le faut, des risques dans la lutte contre la corruption et la délinquance financière. Mais c’est d’abord la mission sacrée des magistrats professionnels, consciencieux et compétents d’agir afin que l’impunité ne soit jamais la règle là la corruption se bat pour être en perpétuelle demeure. Le premier magistrat de la République, Chef de l’Etat et clé de voûte de toutes les institutions républicaines, doit être au coude à coude avec eux, c’est évident, dans cette lutte. Le refus de sanctionner la corruption est la forme la plus aggravée de la corruption, il faut s’en convaincre.

 

Il faut espérer qu’avec la création du nouveau Pôle économique, il y aura une lutte implacable contre ceux qui ont, sans souci aucun, dilapider les deniers publics par diverses techniques véreuses. Comment récupérer tous les fonds détournés au détriment de la nation ? Grande question qui mérite d’être posée sans cesse. Les dossiers, on les connaît, ils sont costauds pour ne pas interpeller la conscience de tous. Covid-19,  la Loi d’Orientation et de Programmation Militaire (LOPM), les délinquances foncières, les crapuleries minières, etc. A propos singulièrement des fonds de la Loi d’Orientation et de Programmation Militaire, quelle est la situation des milliards détournés au moment où la transition est en train d’investir des milliards pour la sécurité ? Certes, la justice a déjà mis le grappin sur des officiers supérieurs et des généraux pour les détournements dans le cadre de cette LOPM, donnant à croire qu’il n’y aura plus jamais de quartier pour personne, mais les subsides détournés ont-ils été récupérés pour servir à l’armée qui en a bien besoin aujourd’hui ? Ces arrestations d’officiers de haut rang ont sonné effectivement comme un avertissement aux prédateurs de tout acabit, mais il faut éviter la justice sélective, celle qui épargne des délinquants identifiés, au grand dam de l’opinion publique nationale. Si j’en fais partie, voici ma main, coupez-la ; si j’en fais partie, voici ma tête, coupez-la sans aucune pitié. Il ne faut en effet pas le paradis pour certains délinquants et l’enfer pour d’autres.

Il y a eu des cas effarants. Les gestionnaires de l’AGEFAU ont lancé un pseudo appel d’offres pour des prestations déjà effectuées et des achats déjà faits. Il était impératif que la justice se saisisse de cette rocambolesque affaire, un cas inédit de délinquance. En l’occurrence, le procureur du parquet spécialisé du Pôle économique aurait dû s’autosaisir de l’affaire pour la tirer au clair puisqu’elle a été ébruitée et traitée dans la presse, sans démenti possible. Rien ne justifie que cette pratique demeure impunie. Mais rien n’a été fait jusqu’à ce jour, même pas la régularisation  qui consiste à rattraper une opération faite en violation des règles. Il y a eu aussi ce qui a été appelé EDM-gate par l’achat de grosses cylindrées coûtant des centaines de millions alors que la société qui gère l’électricité broyait du noir. Timide changement à la tête de la société, c’est tout. Et il y a eu l’affaire de l’acquittement de Bakary Togola et co-accusés, qui a défrayé la chronique. Le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, a même diligenté une enquête contre les magistrats qui ont rendu la surprenante décision. Silence-radio depuis. Allez quand-même, Messieurs les juges !

Amadou N’Fa Diallo

Le National

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