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DIP : l’inclusion dans l’exclusion

Entre le passage en force et le respect de l’esprit et de la lettre du ‘’dialogue politique inclusif’’, le Gouvernement a fait le choix calculé de laisser à quai tous ceux qui sont considérés comme les empêcheurs de tourner en rond. C’est l’option du paradoxe d’un Gouvernement qui navigue à vue.

Sauf coup de tonnerre, le ‘’Dialogue politique inclusif’’ se tiendra selon les desiderata du prince du jour. Le triumvirat qui multiplie les rencontres, après celles du ministère de l’Administration territoriale et de l’Assemblée nationale, avec quasiment les mêmes acteurs politiques et de la société civile, semble travailler d’arrache-pied pour ce faire. On notera déjà à ce niveau le manque de vision total des organisateurs de ce dialogue un moment voulu par l’ensemble des acteurs nationaux et qui est à présent rejeté par une frange de plus en plus importante de la population. Que c’est affligeant de voir tout le monde faire la même chose!

Le recadrage
En reprenant à son compte le principe du dialogue politique inclusif, une émanation de l’URD, édulcoré pour les besoins de la cause d’amuser la galerie, le Gouvernement s’assure de le placer dans un canevas qui le vide de l’essentiel de sa substance. Ainsi, il rejette catégoriquement les notions de ‘’dialogue national’’, de ‘’dialogue national refondateur’’ considérées comme porteuses de pièges. C’est d’ailleurs pourquoi, le Gouvernement s’empresse de reformuler le concept du dialogue qui n’était à l’origine qu’une perche tendue par ses adversaires politiques lassés d’une gouvernance erratique, sur fond ‘’d’autisme’’ pour enfin sortir du creux de la vague.
Alors, il recadre, fixe une ligne rouge comme cela apparaît dans le projet de TDR du dialogue politique inclusif dont les organisateurs se sont vite démarqués: ‘’il faut cependant noter que le dialogue politique inclusif ne sera point une « conférence nationale souveraine », comme celle que le pays a organisée en1991. Elle ne sera pas non plus une porte ouverte à la mise en veilleuse des institutions actuelles et leur remplacement par un régime de transition. Le dialogue devra s’inscrire dans le strict respect de la Constitution et des lois de la République et être un atelier d’incubation d’idées nouvelles pour ramener la paix et la sécurité au Mali d’une part et rénover l’État d’autre part. Il s’agira d’un processus ascendant de partage de réflexions sur les défis existentiels de la Nation partant du niveau local et/ou régional au niveau national’’.

Le bridage
Manifestement, cette œillère était encore très large pour permettre aux participants de lorgner d’autres sujets indésirés et indésirables du Gouvernement. Le fameux Triumvirat apporte alors des restrictions encore plus drastiques. Il expurge de l’ordre du jour les sujets qui fâche : la conférence d’entente nationale ; l’Accord de défense militaire entre la France et Mali ; le mandat de la MINUSMA ; les questions liées aux hélicoptères cloués au sol, les fonds de l’UE pour la prise en charge régulière de nos FAMA au front qui ont disparu et l’exploitation des rapports du Vérificateur général ; les questions liées aux responsabilités des massacres dans les régions de Mopti et de Ségou ; la prorogation du mandat des députés ; l’évaluation de la Loi d’orientation et de programmation militaire ; le bilan de la démocratisation de notre pays ; le retour de l’administration dans toutes les régions du MALI comme préalable ; le système éducatif national ; le système sanitaire ; les perspectives sur l’exploitation minière au Mali ; les perspectives de la création d’emplois pour les jeunes ; les questions relatives à la diaspora malienne ; la gouvernance au Mali ; la justice.
Que reste-t-il après de la substance d’un dialogue dans un pays qui connaît une crise protéiforme ? En effet, il n’y a pas un seul segment de la société malienne qui ne soit pas en crise. Le Gouvernement lui-même connaît une grave crise d’atrophie et d’incompétence. Point besoin d’être un foudre d’intelligence pour comprendre que la résolution de la crise qui est nationale passe nécessairement par la résolution des crises sectorielles. C’est une Lapalissade.

La mascarade
Mais, en présentant et en imposant cette vision étriquée du dialogue politique inclusif, le Gouvernement fait le choix de laisser à quai tous ceux qui, comme Modibo SIDIBE, pensent qu’il faut « s’inscrire dans la durée, parce que la sortie de crise est dans la durée », tous ceux qui, comme Ali Nouhoun DIALLO, pensent qu’il ne faut pas mener ce dialogue « à la hussarde », tous ceux qui ne sont pas inscrits dans une logique de préservation d’un pouvoir personnel ; en somme, tous les empêcheurs de tourner en rond. Parce qu’il est évident que le Gouvernement prépare un grand folklore.
Sinon, les réticents et les points de réticence sont connus. Des partis politiques, tels le MPR l’ont clairement dit : ils ne participeront pas à ce qu’ils considèrent comme une mascarade. Comment peut-on réunir des Maliens pour parler de la paix, alors que le facteur déclencheur de tout le bazar auquel nous assistons est la rébellion touareg et que l’Accord qui y a mis un terme est loin de faire l’unanimité ? Comment peut-on voter une Loi d’orientation et de programmation militaire (LOPM) qui prévoit un investissement d’un montant de 1 230 563 972 349 FCFA (argent du contribuable malien) pour la période de 2015 à 2019 aux fins de sécuriser les populations qui meurent néanmoins par centaine et qu’on n’en parle pas ?

Une peur justifiée
Le Gouvernement a raison d’avoir peur, parce qu’au regard des scandales à répétition, le dialogue politique pourrait se transformer en tribunal populaire pour mettre au pilori les auteurs de détournement et complicité de détournement de fonds publics par l’engagement irrégulier des finances publiques ; d’utilisation frauduleuse et au détournement de deniers publics ; de délit de favoritisme ; de faux et usage de faux ; de trafic d’influence, dans les affaires d’acquisitions de matériels militaires. Quand on investit 1 230 563 972 349 FCFA dans la sécurisation des populations, il faut des résultats. À défaut, le peuple a droit à des explications, surtout après les révélations de kleptomanie financière.
Il y a aussi le refus systématique d’aborder la question très controversée de l’Accord pour la paix et la réconciliation, parce que la CMA a promis de ne pas prendre part au dialogue, si ce point était inscrit à l’ordre du jour ? C’est vrai qu’après avoir baissé le pantalon, on ne peut que faire de la pantalonnade, parce qu’il est clair qu’un groupe armé dépourvu de toute légitimité est en train de dicter l’ordre du jour d’un dialogue à portée nationale. Ainsi, quelques rebelles en imposent à la République, ils sont préférés à partis politiques constitutionnellement reconnus.
Sans être le prophète de malheur de la Bible, ce dialogue dit ‘’inclusif’’ organisé avec une désinvolture déconcertante ne fera que diviser davantage les Maliens en étant davantage au grand jour le vrai visage d’un régime qui semble avoir fait un deal avec des mouvements armés, certainement contre les intérêts du Mali. On ne construit pas avec le mensonge. Or, tout l’échafaudage qui se met en place est bâti sur du mensonge. La plus parfaite illustration est le chef d’orchestre qui tend la main à la rompre à Soumi champion qui finit par la saisir et qui va dans les colonnes de Jeune Afrique pour le mettre à l’encan : « il n’y a pas eu de crise post-électorale, mais la bouderie d’un seul homme, inconsolable de pas être entré au palais de Koulouba ». Il va sans dire que cela brise toute dynamique de dialogue. D’où, de sérieuses interrogations sur sa participation à ce dialogue auquel il a ouvert la voie en janvier dans son message de Nouvel An.
PAR BERTIN DAKOUO

Source: info-matin

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