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Diéma : IL ETAIT UNE FOIS LE CONTE

En voilà une autre de nos bonnes coutumes qui disparait. Chaque jour, nous assistons impuissants à l’effritement, voire à la disparition d’une de nos coutumes. Dans quelques années, les veillées de contes tomberont sans doute dans les oubliettes sans laisser la moindre trace matérielle.

filles femmes rurale village brousse ville pauvrete developpement scolaire etude educationPourtant jusqu’à une période récente, les soirées de contes en groupe autour du feu avaient un grand impact sur le développement social et mental de l’enfant. Les récits faits par un grand-père ou une grand-mère, contribuaient au développement intellectuel de l’enfant et à parfaire son éducation. Ils inculquaient à l’enfant le réflexe de dire la vérité, d’être brave pour affronter les épreuves de la vie.
Les contes stigmatisent la trahison, la lâcheté, l’hypocrisie et prônent l’esprit de tolérance, de solidarité et d’entraide. Bref, cette forme d’expression cultuelle véhicule des leçons de morale.
Autrefois, dans chaque famille ou presque, il y avait un vieil homme ou une vieille femme qui racontait des légendes aux enfants autour du feu de bois ou à la lumière d’une lampe à huile. Les moments propices pour les contes étaient le soir après le dîner. Les femmes en profitaient pour filer du coton, décortiquer de l’arachide ou éplucher des légumes, aidées dans leurs tâches par les enfants.
La doyenne Safoura rencontrée dans un village du cercle de Diéma, est une bibliothèque de contes. Mais aucun enfant ne veut l’approcher, à plus forte raison écouter ses contes. Retranchée dans sa chambre, elle donne l’impression d’être plongée dans un état de somnolence permanente. Elle s’empresse de se plaindre de sa solitude au premier visiteur venu. « Les enfants me traitent de sorcière. Aucun ne veut s’approcher de moi », confie-t-elle.
M. D. se rappelle avec nostalgie les temps où le conte rythmait les soirées des enfants. «  C’est notre mère qui nous narrait des contes, à mes frères et moi. Lorsqu’après le dîner, elle s’installait sur sa natte de roseaux pour filer le coton, nous accourions vers elle pour écouter des contes. D’autres enfants se joignaient à nous. C’était le moment le plus excitant de la journée pour nous. Quand on commençait à faire du bruit, maman menaçait d’arrêter. Notre mère se gardait de nous narrer des récits épouvantables de crainte que nous fassions des cauchemars dans notre sommeil. Nous apprenions beaucoup de choses sur la vie, la société, les animaux, la nature… ».
S. S. constate que les veillées de contes n’intéressent pas les enfants d’aujourd’hui. « Ils n’en n’ont d’ailleurs pas le temps. Voyez-les, ils ont des écouteurs toujours vissés aux oreilles. Et à peine ont-ils fini de dîner qu’ils sont déjà dans la rue », s’offusque-t-il.
La dame Makamoussou ne supporte pas l’arrêt des soirées de contes. Il faut dire qu’elle en tirait aussi bénéfice puisqu’en écoutant ses contes, les enfants l’aidaient en même temps à décortiquer ses arachides. « Ils ont tous fui. C’est la faute à la télé ! », lance-t-elle. « Nous, nous avons abandonné toutes nos bonnes pratiques pour imiter les Blancs. Eux, sont malins, ils gardent toujours les leurs », regrette pour sa part Hady. Yaya, transporteur, témoigne : « Je voyage beaucoup. Je sillonne le pays. Partout, j’ai fait le constat que le conte, c’est fini. Ce n’est pas seulement à Diéma ».
Sotigui Coulibaly, le secrétaire général de la marie de Gommintradougou, confie que leçons qu’il a tirées des contes appris dans son enfance lui ont été très utiles. « Elles m’ont vraiment servi quand je faisais mes études à Bamako. Encore jeune et loin de mes parents, j’ai su échapper à beaucoup de pièges et de tentations ». Drissa Touré, superviseur RAVEC, enchaîne : «  Les contes permettent à l’enfant de vaincre la peur, d’apprendre à devenir un homme, à surmonter les difficultés. Un enfant qui écoute les contes devient sage et développe des comportements positifs ».
Le constat général est donc que le conte qui était jadis une des valeurs sûre de notre culture, semble condamné à disparaître chez nous. Le développement fulgurant des technologies de l’information et de la communication n’est évidemment pas pour arranger les choses. A moins que l’on ne saisisse l’opportunité qu’offrent ces technologies pour redonner le goût du conte aux enfants.
O. BA
AMAP-Diéma

source : Essor

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