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Demain le Mali : Appel aux patriotes maliens

Celui qui ne pense pas à l’avenir n’a pas d’avenir. «L’homme qui détermine sa conduite par la perspective la plus proche est l’homme le plus faible».

L’exaltation qui donne aux sentiments révolutionnaires la parure de l’absolu n’est souvent pas conforme à la réalité du terrain des luttes de classes.

Tout révolutionnaire aspire à changer le cours de l’histoire. Mais toute résolution de contradiction découle de la dialectique même du progrès historique qui ne peut se réaliser qu’en transformant, dans la lutte, les deux termes de la contradiction.

Il y a un Viel adage malien qui dit qu’au lieu de s’en prendre au lieu de sa chute, il faut en vouloir au lieu où on a buté. Ce n’est pas en 2020 que le Mali a buté, mais depuis 1992 pour ne pas dire, depuis 1968. La gestion dite démocratique a été une pratique kléptrocratique. Mais là aussi il faut avoir l’honnêteté de faire la part des choses. Les deux (02) Premiers ministres (PM) d’Alpha Oumar Konaré, à savoir M. Younoussi Touré et feu Abdoulaye Sékou Sow, étaient des hommes intègres. La corruption s’est révélée à visage découvert à partir du PM Ibrahim Boubacar Keïta (IBK): «L’Arrêté N°94-7849/MFC-CAB du 13 Juillet 1994 fixant le seuil à partir duquel les marchés des Sociétés d’État et des Établissements Publics à caractère Industriel et Commercial sont soumis aux dispositions du décret N°92-059/P-CTSP du 14 février 1992, portant réglementation des marchés publics».

«Article 1er: Le présent arrêté fixe à deux cent cinquante millions de francs CFA (250.000.000 FCFA) le seuil unique à partir duquel, les marchés des Sociétés d’État et des Établissements Publics à caractère Industriel et Commercial sont soumis aux dispositions du décret n°92-059/P-CTSP du 14 février 1992, portant réglementation des marchés publics.

Article 2: Le Directeur Général des Marchés Publics et les Présidents Directeurs Généraux des Sociétés d’État et des Établissements Publics à caractère Industriel et Commercial, sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent arrêté qui sera enregistré, publié et communiqué partout où besoin sera».

Ce qui signifie que tout Président Directeur Général (PDG) d’entreprise publique peut passer des marchés gré à gré jusqu’à concurrence de 250 millions de francs CFA. Un appel à concurrence n’intervient qu’à 250 millions plus un franc.

Auparavant ledit seuil était de 10 millions, soit une multiplication par 25 ! C’était le début de l’âge d’or de la corruption.

La volonté affichée du Président Amadou Toumani Touré (ATT) de ne pas humilier un voleur a été l’élément catalyseur de la Corruption en généralisant l’impunité. Aucun pouvoir ne peut avoir d’autorité sans sanctionner la faute et récompenser le mérite. Donner l’avantage à celui qui ne le mérite pas c’est troubler l’ordre et la Justice.

Dès que le Prince donneur d’ordre n’incarne plus les valeurs régaliennes de l’État, on peut dire adieu à la souveraineté et à l’intégrité du pays, tel est le cas du Mali depuis bientôt trois décennies.

Bâtir sur le vol (argent et élections) et le mensonge, c’est bâtir sur du sable mouvant.

Maliens, notre mal ne vient ni de la France, ni d’un quelconque manque de ressources: C’est notre inconsistance patriotique qui nous fait perdre nos valeurs d’honneur et de dignité au profit de l’argent sale. Les manœuvres de domination des puissances impérialistes ne sont que des contradictions externes qui ne peuvent opérer qu’à travers les contradictions internes.

Dans le cas précis du Mali, l’avènement de Mali Koura passe par une renaissance à nous-mêmes et au reste du monde. Une naissance ou renaissance ne se fait pas spontanément: il faut d’abord concevoir (projet de Société), porter la grossesse, ensuite mettre au monde le bébé; en évitant de s’abuser en oubliant que toute naissance se fait dans la douleur.

Dans notre cas précis, Mali Koura ne naîtra que dans la sueur de l’effort et de la persévérance. Dans cet effort de soi sur soi, interviennent des erreurs et des échecs qui impliquent la nécessité de veille citoyenne et d’actions correctives efficientes.

Le colonisateur français a mis quarante-trois(43) ans pour conquérir le Soudan (de la montée de Faidherbe de Saint Louis à Kayes-Médine, en 1855, à la capture de Samory en 1898). Ce même colonisateur français a mis dix-huit (18) ans pour pacifier le Soudan (de la capture de Samory, en 1898, aux assassinats de Firhoun et Barzani, en 1916), soit soixante et un (61) ans pour soumettre le Soudan pendant quarante-quatre (44) ans, de 1916 à 1960. Si nous ne nous assumons pas, à terme, le Mali sera divisé en trois (03) États:

– Le Nord-Mali qui représente les deux tiers du territoire.

– La région de Mopti, plus les cercles de Macina et de Niono (dans la Région de Ségou) afin de séparer géographiquement le Sud du Nord qui est l’objet des convoitises des puissances étrangères.

– Le Sud-Mali avec les Régions d’avant réforme de Kayes, Koulikoro, Sikasso et le reste de la Région de Ségou.

Les concepteurs de la partition du Mali ont une vision et un agenda de trente (30) ans. C’est peu par rapport aux quarante-trois (43) ans de la conquête du Soudan.

Depuis 2013, avec la situation qui prévaut à Kidal, le Mali est dans un processus de partition qui lui fera perdre les deux tiers de son territoire au profit des industries minières et pétrolières de la France. La conquête du Soudan, au 19ème siècle, a été menée au nom d’ouverture de marchés pour les produits français, mais en réalité, elle visait les ressources naturelles du Pays. Quelques années plus tard, le Méga projet d’aménagement de l’Office du Niger a été conçu pour donner à la France ce que l’Égypte donnait à l’Angleterre.

Le Mali est engagé dans une lutte de reconquête de sa souveraineté culturelle, politique et économique qui ne peut être gagnée qu’en la concevant d’abord à travers une vision et un projet cohérent reflétant les aspirations profondes de notre peuple; ensuite, seulement ensuite, battre les ennemis internes et externes par une lutte menée intelligemment et intensément à travers l’organisation, l’éducation et la mobilisation de toutes les forces vives.

Les actions menées sur les réseaux sociaux et dans les manifestations publiques sont nécessaires pour la prise de conscience, mais rien, absolument rien ne peut remplacer le travail collectif d’organisation politique. Les partis politiques sont discrédités aujourd’hui, mais cela ne fait que compliquer la tâche des patriotes qui doivent faire preuve d’innovation et de créativité pour trouver une nouvelle forme d’organisation de lutte menant à la libération de notre peuple des chaînes de l’impérialisme et de ses courroies internes de transmission que sont les pratiques politiques des acteurs locaux. Ne demandons pas seulement le départ des troupes françaises; organisons-nous et battons-nous pour mettre à la tête du pays des responsables capables, avec le peuple, de concevoir, d’organiser et de réaliser le départ des troupes étrangères (françaises et compagnie), mais aussi une coopération gagnant-gagnant avec la France et tous nos partenaires.

Nous sommes sidérés devant le constat de l’éparpillement, de la faible structuration et du manque de moyens des forces patriotiques, face à l’armada des troupes adverses.

Pour transformer tant de faiblesses en forces efficientes, nous devons avant tout:

Avoir l’honnêteté et le courage de mettre à l’écart nos égos en constituant un front patriotique capable de porter la charge d’avènement de Mali Koura.

À défaut de cela, nous n’aurons que nos yeux pour pleurer, quel que soit l’issue de la transition. Après les batailles épiques du M5, les patriotes vont encore travailler, comme des serfs, au profit de ceux qui n’ont d’autre agenda que de gouverner et s’enrichir sur la rente de la domination impérialiste.

Malheureusement le comportement de ceux qui ont choisi le camp de la soumission est plus cohérent que celui de nous autres patriotes qui sommes incapables de conformer notre pratique en fonction d’une analyse concrète de la situation concrète, à chaque étape déterminée de l’évolution des rapports de forces. Chacun (jeune et vieux) veut faire la révolution, mais autour de sa personne. Nous devons savoir et pouvoir unir toutes les forces susceptibles de contribuer à l’avènement de Mali Koura: pour être libre il faut savoir s’enchainer. Jadis, à la sortie des vestibules bambaras, on voyait 100 bâtonnets attachés pour rappeler aux membres de la famille que, unis, ils sont invincibles. C’est ce symbole que j’ai baptisé le Bouquet Synergique. L’union permet de résister à de puissants adversaires, mais aussi de donner un impact multiplicateur aux actions collectives convergentes. L’effet synergique se caractérise par la formule: 1+1=3 au lieu de 2 !

Pour inverser le rapport des forces défavorable qui pousse notre pays vers le chaos, chacun de nous doit avoir un comportement stratégique prospectif. Ainsi, il faut refuser de continuer à subir la gouvernance de prédation. La capacité de résistance d’un peuple est fonction de sa capacité d’indignation.

Nous devons aussi refuser la rétroactivité qui est actuellement le comportement de ceux qui attendent qu’on fasse la révolution avant de s’impliquer dans la lutte ; ils font le pari qu’on fera ensuite appel à eux pour gérer le pays. Nous ne devons pas attendre, mais agir pour changer le cours de l’histoire.

En refusant la rétroactivité, nous ne pouvons qu’agir en réunissant les moyens et les conditions du changement social. Savoir et pouvoir dépasser les stades de révolution de Palais et de révolution politique, en créant les conditions et les moyens d’une révolution sociale au profit du peuple. Là se pose la capacité intergénérationnelle de créativité et d’organisation de la classe politique malienne.

Notre mission de passage du flambeau aux jeunes doit ainsi consister à organiser, armer idéologiquement et politiquement les forces montantes. Par des actes, il faut les aider à acquérir moyens et conditions nécessaires pour poursuivre efficacement la lutte patriotique. Toute autre démarche n’est qu’imposture et trahison.

Le Bouquet Synergique ne peut être efficient que s‘il est sous tendu par la volonté de soumettre nos rapports avec l’extérieur aux exigences de notre développement interne. Se soustraire des contraintes et exigences des puissances extérieures n’est qu’un aspect de la problématique de la «déconnexion». L’environnement de la dynamique du développement de l’Afrique est constitué de toutes les parties prenantes (externes et internes) pouvant influencer le développement du continent.

Or, les Africains ont tendance à rejeter sur l’Occident la responsabilité de tous les maux dont souffre notre continent, ce qui est faux. Par rapport à la culture du développement (recherche, accumulation et formation de capital, etc.) notre passé culturel et nos pratiques sociales sont à revoir à la lumière d’un monde dominé par la science et la technologie.

Si nous n’avons pas le courage de nous remettre en cause, nous ne pourrons pas changer la direction du train de développement de l’Afrique, encore moins porter la charge du triple réarmement culturel, politique et économique qui est la condition sine qua non du développement du continent africain en ce 21ème siècle.

Nos tâches Immédiates

Au-delà de nos contradictions internes et celles externes, le problème malien peut être ramené à:

– Un Enjeu majeur: la survie de la Patrie malienne en tant que pays souverain dans son intégrité territoriale, sa diversité ethnique et culturelle.

– Un Défi: au-delà des discours, prouver notre capacité stratégique et tactique à sauver la Patrie de la partition, et la maintenir debout culturellement, politiquement et économiquement sur le sentier du progrès dans la mouvance d’un monde où l’économie et la société sont à base de savoir.

–  Le Défi dans le Défi: pour relever le défi de sauvetage de la Patrie, nous rappelons que «les peuples tiennent leur libération dans leurs mains, et leur destinée dans leur volonté».

Mais les mains et la volonté agissent sous la capacité de compréhension et de création, d’où toute la problématique de notre capacité à nous assumer à travers la conception et la réalisation de solutions à hauteur de nos difficultés. Cela est dix fois plus difficile à réaliser qu’on le pense.

Si notre agenda est vraiment le Mali, rien ne nous empêchera de nous entendre pour sauver la Patrie.

«L’homme qui détermine sa conduite par la perspective la plus proche est l’homme le plus faible». Le développement d’un pays est une question de générations. L’histoire effacera de la mémoire collective tous ceux qui n’agissent qu’en fonction de leurs intérêts personnels. Elle retiendra pour l’éternité, comme les preux du Manding, ceux qui agiront en fonction des Objectifs Globaux du Projet Alternatif Africain de Renaissance et de Mutation de l’Afrique au 21ème siècle (REMA 21), se déclinant localement en Mali Koura.

À l’ère des grands ensembles de la mondialisation d’une part, et de la chasse en meute de l’impérialisme libéral d’autre part, il est illusoire de concevoir l’avenir du Mali en dehors de la dynamique de l’intégration africaine, en clair:

Face à l’ampleur titanesque des tâches de la REMA 21, les acteurs africains de la REMA 21 doivent être guidés par «les quatre (04) vertus qui, rattachées à la force, donnent de la grandeur aux personnes comme aux nations:

– La Magnificence qui fait voir grand malgré les difficultés de l’entreprise;

– La Munificence qui fait voir grand malgré le coût des opérations à engager;

– La Magnanimité qui fait voir grand sans souci d’en tirer égoïstement du profit».

Enfin et surtout La MUTATION scientifique et technologique découlant des apports nouveaux de l’Afrique à la socialisation et au progrès de l’humanité au 21ème siècle. Pour paraphraser Machiavel, nous dirons que misérable et vaincu d’avance est le peuple qui nourrit de médiocres projets.

Bamako, le 15 mai 2022

Diatrou DIAKITÉ, Espoir Mali Koura (EMK)

 Source: Inter De Bamako

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