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Débat de la laïcité au Mali: le divorce consommé entre l’imam Dicko et le Cherif de Nioro

Le week-end dernier,   le mouvement CMAS du puissant leader a repris du service par une sortie médiatique remarquée au CICB. Une activité qui pourrait symboliser le fossé qui se creuse de plus en plus entre deux guides religieux ayant finalement des positions  tranchées vis-à-vis du pouvoir en place.

Samedi matin, en effet, les soutiens de Mahmoud Dicko ont surplombé la convergence d’une vingtaine d’associations islamiques réunies au CICB pour brandir avec plus de redondance leur hostilité à la laïcité définitivement maintenue dans le projet de nouvelle constitution avec la convocation du collègue électoral par décret expressément pris en conseil des ministres extraordinaire. Les accusations n’ont pas manqué de pleuvoir pour la circonstance. Pas en direction du pouvoir militaire en place mais à l’adresse du mouvement démocratique que LIMAMA prend pour responsable d’une dynamique anti-islamique insufflée dans le sillage de la démocratisation du Mali, en 1992. Tout en se gardant d’affronter ouvertement les autorités de la Transition, lesdites associations n’ont fait aucun mystère de leur détermination à combattre avec la densité énergie la consécration de la laïcité au Mali. C’est à coups de «Non à la laïcité» qu’ils ont manifesté leur hostilité à un projet qui consacre une division quasi irréversible – si ça n’est du pays entier – du monde musulman, au regard des frustrations inhérentes à la compétition quelle qu’en soit l’issue.

Le malaise est d’ailleurs perception à l’ampleur de la divergence qui prend forme entre les leaders de diverses obédiences musulmanes, qui s’attendaient comme larrons en foire naguère autour de cette Refondation destructrice de la convivialité inter-islamique.

Nul n’ignore par exemple que Mahmoud Dicko est ce leader charismatique et représentatif ayant fait chuter le régime IBK et par qui les jalons de Transition ont été posés. Au demeurant, pendant la présidence de Bah N’daw, il fut d’un apport considérable à leurs côtés avec ministres et conseillers acquis à sa cause.

La Cmas comptait à l’époque l’Imam Oumarou DIARRA dans ses rangs et ne s’opposait nullement à la laïcité. Ce dernier, aujourd’hui ministre délégué en charge de la solidarité, s’était exprimé sur la question en juillet 2020 es qualité chargé des affaires religieuses et des légitimités traditionnelles de la CMAS en ces termes : ” Je demande à tous les amis de l’imam Mahamoud Dicko et de la CMAS de ne répondre à personne. Nous ne  sommes en guerre contre aucune tendance religieuse, mais juste nous voulons combattre l’injustice, la corruption, la mauvaise gouvernance, faire du Mali un pays de dignité. La CMAS est un et restera un mouvement politique qui respecte la diversité culturelle et la laïcité du Mali. Nous avons du respect et de la considération envers tout les leaders religieux et coutumiers du Mali”. Cette position tranche manifestement avec celle des animateurs actuels de la Cmas, qui ont visiblement perdu de leur superbe avec un Mahmoud Dicko discret mais toujours à l’affût d’éventuelles gaffes de la Transition. Depuis que le débat constitutionnel a pris forme, il ne s’est pas formellement et définitivement prononcé sur la question

de la laïcité mais laisse faire son mouvement qui prend fait et cause pour l’imam de Badala en même qu’il prend parti pour le principe de religion dominante.

Durant le mouvement de soutien contre la laïcité, Boubacar KABA, actuel Président des jeunes de la CMAS a ainsi lâché ceci : ” Apprendre la religion est un acte obligatoire pour un musulman. La laïcité à l’école tue l’éducation des enfants musulmans. La laïcité est un frein pour l’éducation de nos enfants.”. Une perception à peine distincte de celle de Boko Ahram, quoique la Cmas reste dans les débats d’idées et non les tueries aveugles.

Sauf que le Cherif de Nioro – dont l’imam Dicko revendiquait jadis la proximité et louait avec emphases les qualités – ne l’entend plus de cette oreille depuis que par «repli tactique» le pouvoir a conquis son aval. En clair, Bouillé Haidara ne s’en cache plus et affiche formellement son adhésion à la laïcité. Sur la question, à propos des bourdonnements des tendances opposées dont Dicko, son ancien ami, il dira ceci : 《J’aurais appris que certains veulent d’un État islamique et que la laïcité soit biffée dans le nouveau projet de constitution.  Si d’autres veulent d’un État islamique, ceci n’est pas mauvais en soi vu que nous sommes déjà des musulmans. Mais, nous avons plus de 60 ans de pratique de laïcité ; changer cela, du soir au lendemain, serait difficile même pour le peuple dont une frange (même si peu) n’est pas musulmane. En plus, l’ordre mondial actuel tient tant aux principes de la laïcité》.

Il est donc clair que les positions sont distendues et que le fossé s’élargit entre les deux leaders dont celui de Nioro qui semble en position de force. C’est d’ailleurs après son aval final que le gouvernement formalisera le référendum à la date du 18 juin. Par contre, Dicko reste opposé au régime actuel dont il était le soutien naturel au départ. En ne soufflant plus dans la même trompette que le Cherif, pourra-t-il mobiliser comme en 2020 et avec le même monopole de la rue ? A-t-il encore du monde à même de faire fléchir le pouvoir ou conduire à un vote sanction pour que le non l’emporte ? Pour sûr, le coup est déjà parti et le duel Dicko/Bouillé à déjà débuté sans qu’on sache lequel des deux va tomber.

A. KEÏTA

Source : Le Témoin

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