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Crise sécuritaire au Burkina : Un citoyen propose la mise en place d’une transition politique, avec une Assemblée nationale et un gouvernement de cohésion sociale

Dans cette “lettre ouverte aux Burkinabè”, Cyprien Ouédraogo estime que la crise sécuritaire met en péril l’existence du Burkina. D’après lui, il manque l’unité nationale nécessaire à la résolution du problème sécuritaire. Pour créer cette unité nationale, il suggère au Président du Faso et à tout le peuple burkinabè de créer une situation de transition politique, avec une Assemblée nationale et un gouvernement de cohésion sociale. Lisez plutôt.

“Ouagadougou, le 15 novembre 2021

Excellence Monsieur le président du Faso
Excellence Monsieur le Président de l’Assemblée nationale
Chers Burkinabè

Puisqu’il est du devoir de tout citoyen de contribuer à l’édification de son pays, permettez-nous, d’apporter ici la nôtre, au bon fonctionnement, à la gestion et au bien-être de notre pays, surtout en ce moment où il se trouve dans un imbroglio sans précédent. Puisque notre pays se trouve dans une situation critique de crise, et qu’une proposition concrète serait attendue, nous proposons une transition politique pour essayer de résoudre le problème. Car la situation de notre pays mérite une attention particulière de la part de chaque Burkinabè pris individuellement et tous les Burkinabè pris ensemble.

  1. La situation actuelle de notre pays est critique

Notre pays le Burkina Faso est encerclé, il est sérieusement menacé d’être pris. Au risque de nous faire traiter de prophète de malheur ou d’oiseau de mauvais augure annonçant l’apocalypse, nous voyons, poindre à l’horizon au Burkina Faso, une situation similaire à celle du Haut-Karabagh en 2020. Il y a que ceux qui ont été aveuglés par le pouvoir qui ne peuvent apprécier lucidement la situation. La crise sécuritaire va conduire à une prise de notre pays.

Le peuple Burkinabè a pris conscience de la situation, mais nous trouvons qu’il ne mesure peut-être pas encore assez les conséquences de ce qui va arriver (si rien n’est fait). De deux choses l’une : soit l’Etat burkinabè finira par consentir un « autre deal » à l’envahisseur en lui cédant une partie du territoire national, soit les Burkinabè se réveilleront un jour et trouveront que tout leur pays est pris. Donc, évitons les déclarations politiques de nature à envenimer la situation en voulant utiliser l’armée pour intimider le peuple lors de certaines sorties.

  1. Elle est déplorable et malheureuse la sortie du président du MPP.

Le régime en place n’a pas besoin d’intimider ceux qui pensent à un éventuel coup d’Etat. Il ne doit pas non plus attendre que plane l’ombre d’une insurrection pour résoudre un quelconque problème touchant le pays si vraiment il œuvre pour l’intérêt général de tous les Burkinabè. C’est dans ce sens que nous trouvons déplorable, malheureuse et scandaleuse la sortie du Président du MPP en réponse au CFOP à la date du 13 novembre 2021. Nous n’osons même pas répéter ses propos ici parce qu’ils contiennent une en soi une poisse. Comme quoi, « quand les dieux veulent vous punir, ils exaucent vos vœux ».

Nous dirons simplement ceci : Si une armée républicaine est une armée qui est juste capable de protéger un régime en place mais incapable de défendre son pays en danger, quelle armée avons-nous au Burkina Faso ! Quelle insulte à notre armée nationale ! Nous n’osons pas encore croire aux rumeurs qui circulent selon lesquels des éléments de notre armée seraient en train de faire « un deal » avec le régime en place par rapport à la situation sécuritaire. Nous craignons seulement, qu’un jour, si jamais il y avait une nouvelle insurrection, pendant que l’armée sera en train de protéger le régime en place, la population ne trouve l’ingénieuse idée de s’attaquer systématiquement aux familles des « corps habillés »…

En attendant, tout dépend toujours du régime en place. Il faut que le président du MPP se rappelle qu’il est le président de l’Assemblée nationale, une institution dont les assises dépassent les limites et le pouvoir du MPP. En tout cas, avec cette sortie du 13 novembre 2021, c’est le président du MPP lui-même qui semble remettre en cause l’unité nationale et nous fait douter gravement de la bonne foi du président du Faso (qui se rappelle certainement qu’il a la légalité du pouvoir mais pas la légitimité du peuple), qui a lancé un appel à l’unité nationale dans cette situation de crise sécuritaire.

  1. L’appel du président du Faso

En effet, dans cette crise, le Président du Faso n’a cessé d’inviter les Burkinabè à l’unité nationale. Dans sa conférence de presse du 27 octobre 2021, en prélude au 61ème anniversaire de l’armée nationale burkinabè, le ministre de la Défense de notre pays a déclaré que « l’action militaire seule ne viendra pas à bout du terrorisme si la nation ne participe pas. » Et le 1er novembre 2021, lors de la cérémonie marquant le 61ème anniversaire de l’armée nationale, le chef de l’Etat a relancé son appel à cette unité nationale. En écoutant l’appel répété et relancé à l’unité nationale, nous nous sommes dit qu’enfin, la vérité a été dite clairement au peuple.

Et nous entendions résonner en nous (comme si c’était le Président du Faso qui le disait) ce que le Président Abraham Lincoln avait dit : « j’ai une grande confiance dans le peuple. Si on lui dit la vérité, on peut compter sur lui pour faire face à n’importe quelle crise nationale. L’important est de lui présenter la réalité des faits. » Et encore : « on peut tromper une partie du peuple tout le temps et tout le peuple une partie du temps, mais on ne peut pas tromper tout le peuple tout le temps ».

Oui, il était temps de dire clairement la vérité au peuple burkinabè pour ne pas continuer à lui mentir. L’armée seule, c’est-à-dire l’Etat Burkinabè (entendez par ici, le Gouvernement de la partie majoritaire présidentielle) ne viendra pas seul à bout du terrorisme. Il faut la participation de la nation burkinabè tout entière. Voici une manière de dire : le Burkina Faso avec ses valeurs humaines africaines, est notre bien commun et c’est la seule chose qui nous restera en commun lorsque nous aurons tout perdu. Mais pourquoi, jusque-là, cet appel ou ce vœu n’a-t-il pas été suivi par une décision, un engagement qui soit à la hauteur de l’attente ? Parce qu’il y a quelque part un blocage.

  1. Ce qui bloque

D’abord ce qui retarde la réponse à cet appel, ce sont la position et la situation crispées de la classe politique politicienne burkinabè qui est en train de faire ses calculs par tous les moyens. Le chef de l’Etat appartient à un bord politique, ce bord politique le chante haut et fort ; il n’est donc pas des autres bords politiques et ces autres bords politiques le renient haut et fort. Le pauvre peuple lui il est abusé. La sortie du Président du MPP est venue tout gâcher.

Les terroristes nous battent et nos politiciens se battent en plus. Encore faut-il qu’il nous reste un territoire où s’établir et un peuple à gouverner ? Ensuite, les vraies Organisations de la Société Civile (OSC), de plus en plus gardent le silence et n’osent plus entreprendre une action pour un quelconque changement. Pourquoi ?

Parce que simplement les faits montrent qu’il n’y a pas eu le changement qualitatif espéré (en tout cas pas à la hauteur des attentes) depuis l’insurrection de 2014. Ce dont on est sûr, c’est que le crime jusque-là n’a profité et ne profite qu’à quelques-uns et non à tout le peuple burkinabè. Conséquence : personne n’est prêt à se sacrifier encore une fois juste pour que les autres en profitent.

Enfin, pour ne pas être lâche ni téméraire, mais pour être courageux, il faut oser dire ceci : dans la situation actuelle, tant que le Président du Faso continuera à porter la casquette MPP pour lancer son appel à l’unité nationale, il ne pourrait avoir un écho favorable. Le peuple burkinabè refuse désormais d’être au service d’un parti politique, et nous le sentiment que beaucoup de politiciens burkinabè sont vomis par le peuple, parce que la plupart a montré ses limites et sa mauvaise foi au peuple.

Par conséquent, le Président du Faso doit prendre la décision historique qui s’impose ou bien tout le peuple périra. En tout cas, il manque nous l’unité nationale, pour que le problème sécuritaire soit résolu. Mais nous pouvons encore créer cette unité nationale en débloquant ce qui bloque, en détruisant ce qui nous désunit. Tout n’est pas encore perdu.

  1. Comment débloquer la situation et créer l’unité nationale ?

Pour débloquer la situation et créer l’unité nationale, nous proposons au Président du Faso et à tout le peuple burkinabè de mettre en place une forme de gouvernance qui implique la nation burkinabè tout entière : une gouvernance participative qui ne s’appuie pas sur les partis politiques, mais qui fait appel à tous les Burkinabè, dans leurs diversités, sans distinction.

Car, dans l’état actuel où nous sommes, il semble urgent et impérieux de changer de paradigmes au niveau de la gouvernance politique. Il faut rebattre les cartes pour une nouvelle partie dans le jeu politique. C’est en cela, en partie, que nous pouvons espérer œuvrer ensemble à sortir notre pays le Burkina Faso de l’imbroglio dans lequel il se trouve actuellement. C’est le travail de fond à faire.

Concrètement, puisqu’il faut, au pire, créer une situation de transition politique, il y a deux options à faire. La première consisterait à ce le Président du Faso procède à la dissolution de l’Assemblée nationale et du Gouvernement. La deuxième, il s’agirait pour le Président du Faso de démissionner afin que le Président de l’Assemblée nationale (de droit) devienne Président du Faso (sans la casquette MPP).

Dans les deux cas, le but visé serait de former une Assemblée nationale et un Gouvernement de cohésion sociale, c’est-à-dire, une Assemblée nationale et un Gouvernement inclusifs avec tous les Burkinabé, dans leurs diversités culturelles, intellectuelles, professionnelles, religieuses et traditionnelles, en faisant fi des partis politiques.

Car sans l’existence des partis politiques, il n’y a plus de divisions qui tiennent lieu dans le contexte actuel où nous nous trouvons. La nation Burkina retrouve son unité et pourrait se sauver de la situation. Le peuple Burkinabè semble divisé à causes des partis politiques ; ce qui fait que la nation se trouve désunie. Pour aller à l’unité nationale tout en évitant une nouvelle insurrection, il faudrait aller vers la formation d’une Assemblée nationale et un Gouvernement de cohésion sociale.
L’Assemblée nationale pourrait être composée :

De représentants des organisations de la société civile et des organisations syndicales
De représentants des autorités et communautés coutumières et religieuses
De représentants du secteur privé, des entrepreneurs, des employés et employeurs et des opérateurs économiques
De représentants de chaque ministère
Du président national de l’Enfance burkinabè
Du président national de la Jeunesse burkinabè
De la présidente nationale des Femmes

De deux experts dans chacun de ces différents domaines [Diplomatie, Défense, Sécurité, Droit juridique, Droit constitutionnel, Droit public, Politique, Éducation, Santé publique, Économie, Finances, Enseignement supérieur, Développement, Communication, Agriculture, Aménagements hydro-agricoles, Eau et de l’Assainissement, Infrastructures, Énergie, Mines et carrières, Transports, Commerce, Industrie , Ressources animales et halieutiques, Urbanisme et Habitat, Environnement et économie verte, Culture, Arts et Tourisme, Sports et Loisirs, Sociologie, Anthropologie, Philosophie, Théologie(islamique, catholique, protestante et de la religion traditionnelle)].

Quant au Gouvernement, l’Assemblée nationale proposera au Président du Faso, des personnes ressources compétentes pour sa formation.

Si une telle Assemblée nationale et un tel Gouvernement sont mis en place, le digne et vaillant peuple burkinabè répondra illico presto, dans un sursaut patriotique, à tout appel pour le bien de tous. Sinon…

NB : Pendant que la nouvelle Assemblée nationale et le nouveau Gouvernement seront concentrés à réfléchir et à travailler à répondre aux questions posées par les crises sociopolitique, économique, identitaire, religieuse et culturelle (ce sont ces crises qui engendrent à n’en pas douter la crise sécuritaire,) on laissera les mains libres et on donnera l’ordre à nos braves et vaillantes Forces de défenses et de sécurité pour qu’elles s’occupent proprement de la situation sécuritaire : elles en sont capables. C’est leur travail. Elles savent que les régimes passent, mais l’armée reste.

Quant à la nouvelle Assemblée nationale et du nouveau Gouvernement nous attendons que de leurs réflexions et du travail soit accouché un modèle de Gouvernance adapté à la réalité socio-politique, économique, culturelle et religieuse de notre pays.

Faut-il conclure ?

La vraie conclusion se trouve dans l’engagement ferme et solidaire de tous les Burkinabè afin de prendre leur destin en main en œuvrant pour un changement significatif car l’essentiel n’est pas ce qu’on a fait de nous mais ce que nous faisons de ce qu’on a fait de nous.

C’est maintenant que notre pays, le Burkina Faso se trouve véritablement à la croisée des chemins au plan sociopolitique, économique, culturel et religieux. Pour choisir la bonne direction, cela nécessite un travail de fond (sans fonds à exploiter) : changer de paradigmes dans la Gouvernance politique.

Ce travail de fond se fera sur fond d’une bataille militaire engagée à fond. Si chacun fait sa part de travail qui lui revient, tout rentrera dans l’ordre et tout ira bien. Nous osons espérer que cette lettre ouverte ne nous donnera pas l’occasion de confirmer cette vérité sortie de la bouche de Georges Bernanos : être informé de tout et condamné ainsi à ne rien comprendre (et à ne rien faire), tel est le sort des imbéciles… !

En tout cas si nous sommes toujours là, à nous « amuser dans des fêtes », c’est parce que nous n’avons pas encore perdu la totalité du territoire national… Nous écrivons cette lettre au Président du Faso et à tous les Burkinabè pour que cela n’arrive pas. Et pour notre pays, nous nous engageons !

Veuillez agréer, Monsieur le Président du Faso, et chers Burkinabè, l’expression de notre respectueuse considération.

P.S : Nous n’avons pas écouté nos prophètes Thomas SANKARA, Norbert ZONGO, Joseph KI-ZERBO…. Et nous voilà entre les mains de charlatans et de vendeurs d’illusions… Mais tout n’est pas finit. N’oubliez pas de prendre un de nos prophètes qui nous reste le Pr Laurent BADO comme président de l’Assemblée Nationale ou si la situation tourne autrement comme président de la transition. Ce ne serait pas un conseil de trop !

La patrie ou la mort, nous vaincrons !

Cyprien OUEDRAOGO

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Source : Lefaso.net

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