L’espoir était principalement né du fait que les cinq chefs mandatés par leurs pairs avaient recueilli le maximum d’informations auprès de toutes les parties concernées et s’étaient abstenus d’émettre des recommandations dans la précipitation.
Devant les situations complexes comme celle du Mali, se donner un temps d’écoute et de réflexion permet le recul nécessaire pour prendre des décisions informées.
Est-ce que les recommandations du Sommet sont à la hauteur de nos espérances?
La première réaction qui nous vient à l’esprit c’est que la CEDEAO n’a rien proposé qui n’ait pas déjà été muri au niveau national.
De multiples contributions faites par des nationaux: personnes ressources, associations, partis, groupements de partis, avaient déjà offert ces pistes au lendemain de l’arrêt de la cour.
Le 5 mai 2020, nous publiions que pour éviter les troubles sociaux, il fallait rapidement remettre dans leurs droits ceux dont les votes ont été spoliés et démettre les neuf conseillers de la cour constitutionnelle.
Nos propositions de l’époque s’étaient affinées en mesure que la situation se détériorait, que nos craintes devenaient réalité.
Il a fallu aller trouver la CEDEAO pour que le pouvoir accepte allègrement les mêmes propositions. Cela est dommage, car il dénote un manque de confiance en les capacités endogènes. Pour peu qu’on leur eût fait confiance, nous aurions peut être épargné le pourrissement et les tueries qui s’en sont suivis.
Concernant les recommandations, je constate que M5 ne s’identifie pas elles.
Afin d’éviter davantage de complications, une structure paritaire pouvoir/M5 devrait être mise en place sans délai pour affiner plus avant les termes des recommandations afin de les rendre acceptables et applicables.
Une rencontre entre le PR et le M5 est un préalable nécessaire avant ce travail. Elle contribuerait à détendre la situation et favoriserait l’écoute de part et d’autre.
Elle pourrait porter sur les questions à discuter et sur le sort à réserver aux modalités qui seront convenues, ainsi que le chronogramme.
Les discussions au sein de la structure paritaire pourraient être facilitées par la représentation de la CEDEAO à Bamako.
Les éléments à discuter pourraient concerner:
1-les modalités de nomination des futurs conseillers de la cour constitutionnelle. Il faut choisir des modalités qui mettent toutes les parties en confiance;
2- les modalités de rétablissement des droits des députés spoliés. Là également il est important de donner l’assurance que les tripatouillages du passé ne se reproduiront pas à l’occasion des partielles proposées ou s’il faut aller à une dissolution pure et simple en l’absence de l’acceptation de démission par les 31 députés concernés;
3- le choix du PM de consensus et des membres du gouvernement de consensus. Il est important de rassurer toutes les parties que les hommes et les femmes seront choisis en fonction du mérite et ce qu’ils peuvent apporter du sang neuf à la recherche de solutions pour le pays et non pas sur des rapports familiaux et partisans;
4- L’identification des priorités, y compris les résolutions et recommandations du DNI, devant constituer l’ossature d’un programme.de gouvernement ;
5- la détermination du sort à réserver aux conclusions de l’enquête sur les tueries, y compris les mises en accusation qui en découleront et l’indemnisation des victimes ou de leurs familles;
6- les efforts déployés pour ramener l’Honorable Soumaila Cissé sain et sauf, les obstacles qui se dressent sur le parcours et comment impliquer d’autres personnes ressources pour appuyer les efforts en cours.
Ne nous berçons pas d’illusion, vouloir faire appliquer au forceps les recommandations de la CEDEAO sans ces concertations en amont pourrait conduire à des résistances, et c’est là un euphémisme.
J’ai écrit ceci et je l’offre comme contribution au débat.
Bamako, le 28 juillet 2020
Cheick Sidi Diarra
Source: L’indicateur du Renouveau