Des experts français et de l’ONU appuyaient les enquêteurs maliens dans leurs investigations sur l’attaque meurtrière contre un grand hôtel de Bamako, dont les auteurs ont bénéficié de l’aide de complices, toujours recherchés selon la justice lundi, au premier des trois jours de deuil national.
Signe visible de recueillement, les drapeaux étaient en berne à travers la capitale, où la sécurité a été renforcée aux abords des grands hôtels. Un rehaussement de sécurité plus discret était également visible devant des mairies d’arrondissement et des banques.
Par solidarité avec le Mali, le Sénégal, la Mauritanie et la Guinée, trois pays voisins, ont également décidé d’observer un deuil jusqu’à mercredi en mémoire des 19 morts (dont au moins 14 étrangers), selon le bilan du gouvernement malien, la Mission de l’ONU au Mali (MINUSMA) ayant évoqué «22 personnes tuées, dont deux assaillants».
Une décision prise d’un commun accord par ces États pour montrer que «le Mali ne sera jamais seul dans ce combat», avait expliqué le président sénégalais Macky Sall lors d’une brève visite de soutien dimanche à Bamako.
Son homologue béninois Thomas Yayi Boni est attendu lundi à Bamako pour le même motif, a indiqué la présidence béninoise à l’AFP à Cotonou.
Sur le terrain, «l’enquête avance», a assuré Boubacar Sidiki Samaké, procureur du pôle juridique spécialisé de lutte contre le terrorisme à Bamako, qui dirige les investigations.
«Ce qui est évident, c’est qu’ils ont bénéficié de complicités pour venir à l’hôtel» Radisson Blu, «et ils ont bénéficié de complicités pour commettre le forfait», a déclaré M. Samaké à la presse internationale, dont l’AFP.
Dans le hall de l’hôtel, les enquêteurs ont mis la main sur une valise contenant des grenades et appartenant aux assaillants, a-t-il indiqué.
Selon lui, des perquisitions et «fouilles domiciliaires» ont été effectuées à Bamako. Des spécialistes français en criminalité sont arrivés pour aider à l’identification des corps. La MINUSMA participe également à l’enquête.
Belmokhtar, «colonne vertébrale» des djihadistes
Le Radisson Blu a été attaqué le 20 novembre au matin par des hommes armés qui y ont retenu environ 150 clients et employés. Les forces maliennes, appuyées par les forces spéciales françaises et par des agents des États-Unis et de la MINUSMA, sont intervenues et ont «exfiltré» 133 personnes, selon le ministère de la Sécurité.
D’après des sources policière et de sécurité maliennes, l’enquête s’oriente vers «plusieurs pistes», sans certitude sur le nombre et la nationalité des auteurs de l’attaque, dont deux groupes Djihadistes distincts s’attribuent la responsabilité.
L’attentat a été revendiqué dès le 20 novembre par le groupe Djihadiste de l’Algérien Mokhtar Belmokhtar, Al-Mourabitoune, «avec la participation» d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Al-Mourabitoune a affirmé dimanche que les assaillants étaient uniquement au nombre de deux et laissé entendre qu’ils étaient maliens.
Dans un enregistrement en arabe diffusé par la chaîne qatarie Al-Jazeera, un porte-parole du groupe les a identifiés comme Abdelhakim al-Ansari et Moez al-Ansari, le qualificatif «al-Ansari» désignant dans la terminologie djihadiste des combattants autochtones.
Un groupe djihadiste du centre du Mali, le Front de libération du Macina (FLM), a revendiqué à son tour dimanche l’attentat, dans un communiqué adressé à l’AFP.
Il a été exécuté «avec la collaboration d’Ansar Dine», groupe djihadiste de l’ex-chef rebelle touareg malien Iyad Ag Ghaly, et perpétré par un commando de cinq membres dont «trois sont sortis sains et saufs» de l’attaque, selon ce communiqué.
Selon le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian, Mokhtar Belmokhtar, recherché et plusieurs fois donné pour mort, est toujours vivant. Selon la mission (qui leur est assignée), un nom de groupe est utilisé, mais les acteurs restent sensiblement les mêmes», a affirmé à l’AFP lundi une source au sein du renseignement malien.
D’après elle, les deux assaillants tués n’étaient «pas seuls», c’étaient «bien des étrangers» à la peau noire – de nationalité indéterminée. «Trois à quatre complices» locaux les auraient aidés à se fondre dans la population avant de passer à l’acte.
Des rescapés de la prise d’otages, dont le chanteur guinéen Sékouba Bambino Diabaté, ont affirmé avoir entendu sans les voir les assaillants se parler en anglais, sans pouvoir identifier leur accent.