Puisque le ridicule a cessé de tuer au Mali, les autorités de la Transition, du moins certains responsables, persistent encore et toujours dans le mensonge. Elles ont demandé «des supports» pour justifier ce qu’elles qualifient de «déclarations mensongères et calomnieuses». Eh bien, nous le leur offrons, ce «support» avec des détails croustillants. Et nous espérons qu’après cela, ces pseudos responsables auront le courage et la dignité de démissionner de leurs postes respectifs.
Dans un communiqué conjoint non daté et sans autres référence (encore une preuve de légèreté), deux ministres du Gouvernement (celui chargé des Transports et des Infrastructures et son homologue des Affaires foncières, de l’urbanisme et de l’Habitat), nous traitent littéralement de menteurs. Nous laissons les lecteurs apprécier et déterminer qui sont les véritables «menteurs», «calomniateurs».
«Pour éviter la proximité des habitions et respecter les normes internationales de l’aviation civile, le Gouvernement du Mali a défini en 1995 une zone de sécurité de 7.194 ha» affirment les auteurs du communiqué. Qu’on s’arrête-là un instant ! Quelles sont donc ces normes ? Et qui les a édictées? Nous les mettons au défi de produire les chiffres et les distances réglementaires imposées par, on ne sait qui.
Une chose est sûre : le secrétariat de l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) est formel sur sa page Web : «Nous ne pouvons pas fermer ou restreindre arbitrairement l’espace aérien d’un pays, fermer des routes ou condamner des aéroports ou des transporteurs aériens en raison de piètres performances en matière de sécurité ou de mauvais service à la clientèle… Les règles figurant dans les normes de l’OACI ne se substituent jamais à la primauté des exigences réglementaires nationales. Les règlements locaux et nationaux qui sont imposés par des États souverains sur leur territoire doivent toujours être respectés par les exploitants aériens utilisant l’espace aérien et les aéroports de ces États…
[…] Contrairement aux images déformées que véhiculent les médias à propos des organismes des Nations Unies, ces derniers n’ont aucune autorité sur les gouvernements dans les domaines de priorité internationale pour lesquels ils sont établis. Les critiques à l’encontre de l’ONU reposent souvent sur des allégations fondées sur des capacités et des pouvoirs imaginaires que des États souverains ne confieraient jamais à une organisation multilatérale.
L’OACI n’est donc pas un organisme international de réglementation aéronautique, de la même manière qu’INTERPOL n’est pas un service de police international. Nous ne pouvons pas fermer ou restreindre arbitrairement l’espace aérien d’un pays, fermer des routes ou condamner des aéroports ou des transporteurs aériens en raison de piètres performances en matière de sécurité ou de mauvais service à la clientèle» (source : https://www.icao.int/about-icao)».
En parlant donc de «normes internationales», nous invitons les deux ministres à fournir les chiffres y afférents, les distances présumées réglementaires et surtout, l’auteur de ces exigences. Il ne saurait, en tout cas, s’agir de l’Organisation de l’Aviation civile Internationale (OACI) laquelle a été, on ne peut plus claire.
Les mensonges d’État
En attendant la preuve des allégations des deux responsables, pour notre part, nous vous livrons les nôtres.
Contrairement à leur déclaration selon laquelle «le gouvernement du Mali a défini en 1995 une zone de sécurité de 7.194 ha», il s’avère que ce ne sont pas 7.194 ha qui ont été affectés à la zone aéroportuaire en 1995. Mais plutôt 8.720 ha par décret n°95/060/P/RM du 15 février 1995 (voir fac-similés). Comment donc deux ministres de la République peuvent se tromper à ce point ? S’agit-il d’une simple «erreur» de frappe ou de lecture ? Pas si sûr pour qui sait que le détail a une très grande répercussion sur l’affaire.
Précisions avant d’y revenir, que ce ne sont pas 7.194 ha qui ont été affectés à la zone aéroportuaire en 1995, mais plutôt 8.720 ha par décret n°95/060/P/RM du 15 février 1995. 1er mensonge donc !
Les deux ministres prétendent en outre qu’«aucune opération de déclassement partiel n’a été effectué ni au profit de la Mairie du District de Bamako, ni pour les besoins d’une quelconque collectivité». 2ème mensonge !
Le décret N°99 P-RM du 15 Septembre 1999 extrait une surface de 381 ha de la zone portant sur les 8.720 ha et non sur les 7.194 ha !
L’article 1er du document indique en effet : «est classée la parcelle de terrain d’une superficie de 7.194 hectares environs sur une longueur périmétrique précise de 47.021,83 mètres… ».
Pour tout dire, une superficie de 381 hectares a été déduite des 8.720 ha pour ramener la zone aéroportuaire à 7.194 ha. Et c’est justement là que la déclaration des deux ministres faisant allusion à «7.194 ha en 1995» prend toute son importance. Et pour cause.
Le décret N°99 P-RM du 15 Septembre 1999 abroge celui antérieur (n°95/060/P/RM du 15 février 1995) portant sur 8.720 ha après déduction des 381 hectares. Il s’avère que les deux ministres ont procédé à leur destruction massive sur la base d’un décret abrogé. Ils ont donc abusivement détruit les constructions érigées sur les 381 ha extraits des 8.720 ha par le décret N°99 P-RM du 15 Septembre 1999. Une faute gravissime !
Comment, interrogions-nous, deux hauts responsables, des ministres de surcroit, peuvent se tromper à ce point? Sont-ils de bonne foi ? Le doute est autorisé dans la mesure où les deux décrets comportent les coordonnées GPS de la zone initiale et ainsi que de la partie extraite (381 ha) ! L’institut géographique du Mali (IGM) a pourtant bien fourni les données à qui de droit. Mais nos deux démolisseurs, semble-t-il, n’en ont cure. Mais par pitié, qu’ils arrêtent au moins d’insulter l’intelligence de leurs compatriotes.
Les non-dits d’une démolition
De sources bien introduites, il nous revient que les deux ministres sont parvenus à convaincre le Président de la Transition du bien-fondé de leur opération de destruction. A tort ! Ce qui est dommage, le même Bah N’Daw avait reçu le maire Adama Sangaré qui lui a montré tous les documents . Il avait dit à ce dernier qu’on l’avait trompé. Informé quatre jours après cette rencontre de la démolition des lieux par les services de la mairie du District, il n’a pu rien faire !
Des personnages dans les rouages, selon les mêmes sources, auraient des visées personnelles sur les lieux. Ce qui expliquerait les «erreurs».
Comment expliquer cette ignorance délibérée des décrets comportant les coordonnées GPS légales de la zone aéroportuaire, et aller au-delà des limites de l’espace prescrit nonobstant les mises en garde et les preuves évidentes ? Bien évidemment, il n’y a pire aveugle que celui qui ne veut voir et pire sourd que celui qui ne veut entendre !
Dans un État sérieux, disions-nous, une enquête serait ouverte et les coupables de ces bavures voire ces tentatives d’usurpation, arrêtés, jugés et condamnés. Dans un État sérieux, disons-nous ! Ceci est d’autant évident que par leurs maladresses et actes d’injustice, ils viennent d’exposer l’État du Mali au paiement des casses et préjudices afférents, et surtout, priver injustement des citoyens Maliens de leurs biens, certainement, parmi les plus importants.
Par ailleurs, dans la culture malienne, on s’abstient de démolir surtout lorsqu’on n’est pas un bâtisseur comme c’est le cas de nos deux ministres. Ici, à défaut de ne pouvoir construire, on ne démoli point. Amy Kane l’a fait et c’est le régime IBK tout entier qui en a pâti.
En tout état de cause, puisqu’ils ont demandé des supports de nos «mensonges» et «calomnies», ils sont servis. Qu’ils s’assument donc en démissionnant ! C’est le moins ce que les Maliens attendent d’eux ! Et puisque le courage n’est pas la vertu la mieux partagée ici, qu’ils soient donc démis !
Rappelez-vous, la délimitation de la zone aéroportuaire a été faite sous Alpha Oumar Konaré qui a longtemps rêvé briguer un 3ème mandat, notamment lors de l’occasion ratée de la Can 2002. Aujourd’hui, c’est Dionké Diarra qui n’est autre que le factotum du Président Konaré qui démolit les 351 ha. De là à penser qu’il est en mission de son ami qui avait des projets sur les lieux comme à l’ACI 2000, est un pas que les initiés ont franchi allégrement. Nous y reviendrons
Batomah Sissoko et A.D
Source: Sphinx Mali