Ça y est ! La fameuse rencontre entre Donald Trump et Kim Jong-un qui tient le monde entier en haleine depuis des mois, a enfin eu lieu. Les dirigeants américain et nord-coréen ont finalement échangé cette poignée de main historique qu’on attend depuis 1953. Archi-médiatisé en raison de son caractère historique, l’événement a été suivi aux quatre coins de la planète. Et contrairement à certaines appréhensions, les choses se sont déroulées plutôt normalement. Aucune sortie fracassante de la part de Trump. Aucun rebondissement non plus. Bref, la courtoisie, concept plutôt étranger aux deux personnages, était au rendez-vous. Bien entendu, l’Afrique aussi n’a pas voulu se laisser conter ce rendez-vous majeur de la diplomatie internationale. De Dakar à Maurice et du Cap à Tripoli, les Africains, quoiqu’à priori très peu intéressés par la rencontre, l’ont tout de même suivie. Il faut dire que pour eux, ce n’était pas non plus qu’un simple spectacle diplomatique.
Donald Trump qui rencontre Kim Jong-un dans un hôtel huppé de Singapour, c’est à priori le cadet des soucis des Africains. Surtout si l’on ajoute à tout cela le fait que la rencontre porte sur la dénucléarisation de la Corée du nord. Dans le meilleur des cas, ce n’est qu’un succès diplomatique de Trump qui ne changera rien au quotidien peu enviable du jeune chômeur africain. Sauf que cette perception des choses est à la fois étriquée et réductrice. En effet, en dépit de son poids plutôt négligeable dans la diplomatie mondiale, l’Afrique ne peut toutefois pas envisager le sommet de Singapour sous le regard d’un spectateur détaché. Par le jeu des alliances et des intérêts stratégiques, elle a également intérêt à ce que le processus de rapprochement en cours réussisse. D’autant qu’en cas d’échec, elle ne peut normalement se mettre à dos ni la Corée du nord, ni les Etats-Unis. En effet, se fâcher avec la première reviendrait à se brouiller avec la Chine, devenue un des principaux leviers diplomatico-économiques du continent. Quant aux Etats-Unis, ils demeurent encore très influents dans certains pays africains. Bref, l’Afrique prie pour que la rencontre soit couronnée de succès, pour ne pas avoir à faire un choix aussi cornélien.
L’autre motif qui justifiait que les Africains ne boudent pas le sommet, est en rapport avec les enseignements qu’ils peuvent en tirer. A propos, on a un enseignement principal à retenir. C’est l’effectivité même de la rencontre entre deux personnalités qui, il y a quelques mois encore, s’insultaient comme des gamins. Aussi imprévisibles et erratiques que soient l’un et l’autre, Donald Trump et Kim Jong-un ont su vaincre leurs égos et leurs humeurs pour donner la chance à la paix. En cela, ils ont déjoué tous les pronostics et s’immortalisent par la même occasion. En faisant montre de cette hauteur de vue, ils se donnent la chance de mettre fin à un bras de fer vieux de pas moins de 65 ans. Si on peut se féliciter du fait qu’au Kenya, Raila Odinga et Uhuru Kenyatta aient déjà fait montre du même sens de responsabilité historique, il y a que Riek Machar et Salva Kiir n’arrivent toujours pas à s’entendre de manière à faire cesser les hostilités au Soudan du sud. Et il en est de même de nombreux pays africains où entre l’opposition et ceux qui occupent le pouvoir, en lieu et place de l’adversité, il y a une redoutable animosité. Eh bien, à tous et à toutes, Donald Trump et Kim Jong-un semblent vouloir dire qu’aucun conflit n’est immuable. De même qu’aucune divergence n’est éternelle. Certaines fois, le renoncement est un signe de grandeur.
Boubacar Sanso Barry