Les motos taxis créées il n’y a guère longtemps à Bamako, ont bouleversé le transport en commun. Les minibus appelés sotramas et les taxis sont les plus touchés. Certaines sociétés comme Teliman, Ziggi Go et Bolt pratiquent cette activité de façon formelle, mais beaucoup de particuliers ou organisations privées le font dans l’informel. “Moi je suis maçon, mais quand je n’ai pas de marché, je transforme ma moto Djakarta en taxi pour pouvoir joindre les deux bouts. Ce n’est pas facile de nos jours”, déclare un particulier sous l’anonymat.
Un autre ajoute : “J’ai quitté mon village parce qu’il n’y a pratiquement rien à faire chez nous chez maintenant. Au lieu de rester là-bas sans rien faire, j’ai décidé d’amener ma moto et de m’adonner à cette activité. Je m’en sors bien”.
Pendant que certains clients apprécient ceux de l’informel, d’autres préfèrent ceux qui sont en règle. “Je trouve qu’ils roulent trop vite et ils ne respectent pas le Code de la route”, signale un usager. Un autre déclare : “Je ne sais pas où me plaindre si quelque chose m’arrivait. C’est pourquoi je préfère ceux du formel. Il y a juste une semaine, un chauffeur de moto taxi (Djakarta) a violé sa cliente vers Lassa, sur la route de Kati”, a-t-il fait savoir.
Au-delà de ces cas, d’autres clients de motos taxis ont été victimes de braquage.
Notre pays traverse un moment difficile de son histoire, accentué par la crise sanitaire aggravant ainsi que le chômage et la sous-employabilité des jeunes. Cette initiative des startups ne pouvait être que salutaire s’ils étaient tous en règle parce qu’elle permet de résoudre de nombreuses difficultés liées au transport et à la livraison. Mais la plupart d’entre eux exercent ce métier dans l’informel. Ils sont généralement des ruraux ou des jeunes diplômés sans emploi. Mais il ne faut pas oublier que des sociétés ont été légalement constituées pour s’adonner à cette activité et elles respectent les règles du métier.
Au départ, ces motos taxis étaient faites pour les quartiers et zones non couvertes par les transports en commun. Tout se faisait dans la transparence avec une application sur le téléphone des chauffeurs contenant le kilométrage, la tarification, en plus du GPS pour l’indication de l’endroit, nous explique Bourama Cissé, agent de Teliman.
Chez nous, le prix est abordable. On peut transporter un client à 1000 Fcfa et pour le même trajet un autre chauffeur de moto taxi dira 1500 Fcfa. Ce qui fait que les gens disent que les motos taxis sont chers”.
Les chauffeurs de motos taxis teliman possèdent tous un permis de conduire. «On passe par une auto-école pour la maîtrise de l’engin et de la circulation. Quand mes dossiers ont été acceptés à la société Teliman, un jour, ils m’ont appelé pour l’apprentissage de l’engin et j’ai rigolé parce que je faisais le trajet Bamako-Ségou avec ma moto. Mais lorsque j’ai été à ce rendez-vous, j’ai su que faire déplacer une moto et conduire une moto sont deux choses différentes. J’ai appris beaucoup de techniques. Il y a une vitesse qu’on ne dépasse pas. Par contre, certains se faufilent entre les véhicules et font des accidents», souligne-t-il.
Lassine Coulibaly, chef d’agence de la société de moto taxi “Bolt” enfonce le clou : “Il y’en a qui ne savent pas conduire, d’autres font du support à trois”.
Cette prolifération des motos taxis est un manque à gagner pour les conducteurs de taxis. Cet état de fait les inquiète beaucoup, comme l’affirme Mamadou Kouyaté : “Je suis chauffeur de taxi depuis 20 ans, mais je n’ai jamais souffert comme cette année. Non seulement on n’a plus de clients, mais aussi les policiers nous fatiguent et les pièces du véhicule sont chères. Il faut que les autorités prennent cette situation en main pour qu’on puisse survivre”, lance-t-il.Un autre taximan, Dramane Sinayoko, explique : “Si les autorités ne diminuent pas le prix de nos vignettes cette année, on ira aux villages pour cultiver. Ces chauffeurs de motos taxis sont des Maliens comme nous. On ne peut pas les empêcher de mener leur activité, mais on demande à l’Etat de nous traiter sur le même pied d’égalité. Ils doivent se mettre en règle en payant leurs vignettes et assurances aussi”.
Modibo Fomba, taximan, ajoute : “Moi je peine même à avoir le prix du gasoil à plus forte raison la recette. Si la situation continue sur cette lancée je finirai par abandonner et faire autre chose”, s’attriste-t-il.
Dans cette situation, il faut la communication entre les différents protagonistes et une prise de dispositions de la part des autorités compétentes pour mieux réglementer le secteur.
Marie DEMBELE