La Cour d’Assises de Bamako, siégeant à Ségou a rendu le verdict de la plus grosse affaire du rôle. Il s’agissait de cette triste affaire qui a conduit les Diallo du village de Tondjilla, commune rurale Nièna, à saccager le quartier des Sangaré avec mort d’homme. Venons-en aux faits.
Depuis quelques années, les habitants du village de Tondjilla vivent en mésintelligence sur fond de litiges fonciers et de contestation de l’autorité de la chefferie traditionnelle. Ledit village est composé de deux quartiers.
L’un est habité par les familles essentiellement Diallo, dont les ancêtres seraient les premiers occupants des lieux et se considèrent donc comme les terriens et dépositaires de la chefferie.
L’autre quartier est habité par les Sangaré dont les aïeux, venus d’ailleurs, auraient été accueillis et installés par les Diallo. La chefferie du village était donc exercée par les Diallo. Tout allait bien, jusqu’à ce que les familles Sangaré, ayant connu un essor économique et démographique, tentèrent d’influer sur la dévolution de la chefferie et de défier l’autorité du chef de village.
Alors, les Diallo se fâchent et décident de retirer la terre aux Sangaré. Cette décision entraine un conflit qui se matérialise par la destruction des cultures et des arbres fruitiers entretenus par les familles Sangaré. Ces faits ont donné lieu à des poursuites judiciaires qui ont abouti à des condamnations par le tribunal correctionnel de Sikasso.
Malgré cette condamnation et des différentes médiations menées par l’Administration, les deux communautés cohabitent dans un climat délétère. C’est dans ce contexte tendu que, dans la journée du mardi 1er janvier 2013, la dame Nabintou Diarra du quartier des Diallo et la dame Konimba Diallo du quartier des Sangaré se battent à la suite d’une dispute.
Au cours du duel, Konimba du quartier des Sangaré terrasse Nabintou du quartier des Diallo.
Écoeuré qu’une femme de leur quartier ait été battue par une des Sangaré, le chef de quartier organise une expédition punitive contre le quartier des Sangaré. Il lance un appel aux Diallo de Nougounè, Zankorobougou et Sirakorani d’envoyer leurs bras valides pour la mission.
Le lendemain. Ils envahirent le quartier des Sangaré en saccageant, pillant les biens, incendiant les toitures en paille des cases et greniers. En plus, des coups de bâtons sont portés et des coups de feu son portés sur les Sangaré qui n’ont pas eu l’occasion de s’enfuir.
Un groupe d’assaillants s’acharnent sur le nommé Siaka Sangaré, en, l’assommant avant de le brûler. Après cette sale besogne, ils se réunissent chez le chef de village pour faire la fête autour d’un repas collectif.
La gendarmerie de Nièna, informée par des Sangaré qui ont pu échapper, se déploie sur les lieux. Plusieurs commanditaires de l’expédition punitive sur les Sangaré sont interpellés. C’est le nommé Yaya Diallo et 25 autres. Ils seront tous inculpés d’assassinat, incendie volontaire, coups et blessures volontaires, dommage à la propriété mobilière et complicités. Sous mandat de dépôt depuis janvier 2013, ils ont tous comparu devant la Cour d’Assises du mardi 10 septembre au vendredi 13 septembre 2013, à Ségou.
L’audience était présidée par Sidi Keïta. Idrissa Arizo Maïga occupait le banc du Parquet. A la barre, les accusés vont nier les faits en bloc. Le témoignage des témoins et victimes et le rapport de la gendarmerie militait en leur défaveur.
Le ministère public, dans un réquisitoire de 45 minutes, a demandé à la Cour de sanctionner à une peine exemplaire pour que cela serve de leçon. « Le Mali n’est pas une jungle. De tels agissements doivent cesser », a martelé le parquetier.
Le parquetier a surtout regretté que les vieux du village, censés apaiser la jeune garde, aient été de ceux qui ont incité à la violence en lançant l’expédition punitive. Après les débats, les peines suivantes ont été prononcées : 7 accusés condamnés à 5 ans de prison ferme; les nommés Moussa Diallo, Salia Sidi Diallo, Bintou Sanogo, Salia Yaya Diallo, Diakaridia Fousseyni Diallo, Daouda Guediouman Sanogo, Nouhoum Bakary Diallo, Abou Diallo et Drissa Sidi ont été condamnés à 20 ans de prison ferme chacun.
Quant aux autres accusés, ils ont été déclarés non coupables et acquittés. Il faut noter que plusieurs des condamnés sont âgés de plus 60 ans. Ainsi venaient d’être tranchée cette affaire qui, un moment, avait coupé le sommeil aux plus hautes autorités.
Une correspondance particulière
SOURCE: Soir de Bamako du 19 sept 2013.