C’est un «dialogue national inclusif» qui est souhaité par les forces vives de la nation comme un outil indispensable de la prévention et de la gestion des crises politiques et sécuritaires. Et leurs attentes vont au-delà des réformes institutionnelles.
Cette initiative doit viser à faire l’inventaire des problèmes auxquels le pays est confronté avec l’ensemble des acteurs afin de proposer des solutions avec un chronogramme et un plan d’actions de mise en œuvre. Mais fort heureusement le Premier ministre, suivant une résolution de l’atelier de la société civile, a rectifié le tir samedi dernier (14 septembre 2019) à l’ouverture de l’atelier de validation des TDR.
Le dialogue se distingue de la discussion et du débat. Il réfère à un mode de conversation comportant nécessairement raison, discernement, exactitude et sagesse ainsi qu’une interpénétration des arguments convergents et convaincants, au fur et à mesure que le dialogue se déploie parmi les interlocuteurs. Un dialogue consiste donc en un examen croisé de différentes paroles qui engagent toutes leur auteur. Un dialogue réussi produit un diagnostic intégrant tous les arguments des participants et une conclusion dans laquelle ils se retrouvent tous.
Dialogue politique inclusif ou dialogue national inclusif ? Le pouvoir avait opté pour le premier avec sans doute beaucoup d’idées derrière la tête. En fait, ce n’est pas juste qu’une question de nuance lexicologique ou sémantique, mais d’enjeux pour la nation. Le dialogue politique est assez limitatif par rapport à ce que les Maliens attendent des futures assises nationales. Selon notre propre sondage, pour la majorité de nos interlocuteurs, il s’agit d’un dialogue politique est un conclave entre les politiciens.
Ce qui remet en cause son inclusivité ne pouvant alors viser que la classe politique et non l’ensemble des forces vives de la nation. On comprend alors qu’ils aient légitimement des doutes sur ses chances de nous conduire au bout du tunnel. Et cela d’autant plus que c’est parce que les politiciens n’ont plus de solutions à leurs préoccupations (depuis feu le président Modibo Kéita) que le pays a progressivement basculé vers le chaos.
Il faut rappeler que le dialogue politique était une exigence de la communauté internationale face à la crise consécutive à la réélection contestée du président Ibrahim Boubacar Kéita en août 2018. Pour les Nations unies, IBK devait prendre langue avec ses opposants pour apaiser la tension politique afin de pouvoir créer les conditions de la révision constitutionnelle indispensable à la mise en œuvre intégrale de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale. Et à notre humble avis, la signature de l’Accord politique pour la gouvernance le 2 mai 2019 marque la fin de ce processus.
Penser l’avenir de la nation au-delà de la révision constitutionnelle
Le dialogue national inclusif est une revendication de l’ensemble des forces vives de la nation (partis, syndicats, organisations de la société civile…). C’est une quête qui va au-delà de la révision constitutionnelle, donc de la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation. L’objectif visé doit être la refondation même de l’Etat malien sur une base solide à partir d’un état des lieux sans complaisance et sans concession sociopolitique aucune.
Et comme l’a si pertinemment souhaité le président du Conseil national de la société civile, Bouraïma Allaye Touré à l’ouverture de l’atelier de réflexion tenu les 07 et 08 septembre 2019 au CICB, «le Mali traverse une période difficile de son existence. Il est donc important de poser toutes les difficultés sur la table afin d’y trouver des solutions». D’où toute son importance. Et les consultations menées en amont par le Triumvirat de facilitateurs vont dans le sens d’un dialogue national. Et ce triumvirat a comme mission d’assurer l’inclusivité de ce dialogue avec l’ensemble des forces vives de la Nation par une meilleure orientation du dialogue afin de connaître les attentes de tous et toutes.
Malgré la rectification faite par le Premier ministre Boubou Cissé samedi dernier (14 septembre 2019), à l’ouverture de l’atelier de validation des TDR, les participants aux phases communale, régionale et nationale doivent être surtout prudents par rapport à la terminologie utilisée lors des débats de ces assises. La vigilance doit être de mise car le pouvoir à plus à perdre dans un dialogue national que politique parce que les politiciens se battent pour avoir leur part du gâteau alors que les forces vives de la nation veulent non seulement sortir le pays de l’impasse actuelle, mais aussi et surtout le remettre sur la voie sûre de son émergence par une meilleure gouvernance de tous les secteurs.
Dan Fodio
Source: Le Matin