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Que sont ils devenus ? Penda N’Diaye dite Pinpin : basketteuse et Onusienne

Ancienne basketteuse, ancienne fonctionnaire internationale et aujourd’hui entrepreneure, Penda N’Diaye dite Pinpin est une femme battante, qui s’est donnée les moyens de ses ambitions. L’ancienne sociétaire du Djoliba et de l’équipe nationale fait partie de cette génération qui a tracé les sillons de l’histoire des Rouges de Bamako avec les Adiza Maïga, Salamata Maïga dite Bébé. Les pressions familiales pour cause d’études ne l’ont pas empêchée de se faire un chemin dans le gotha du basketball malien. C’est une dame toujours coquette, en bonne santé, que nous avons rencontrée, à son complexe hôtelier Résidence Margot, sis à Badalabougou. Elle revient sur toutes les facettes de sa vie sportive et professionnelle, et dévoile son projet à l’endroit des anciens sportifs.  

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En s’entretenant avec Penda N’Diaye dite Pinpin, nous avons relevé que son histoire est partagée entre sa carrière au Djoliba et en équipe nationale, ses études et le duel à distance entre son oncle (soucieux de ses études), et Tiécoro Bagayoko (qui veillait à son assiduité dans le sport et ne voyait que le Djoliba AC et l’équipe nationale).

Mon oncle et Tiécoro

Pour cela, l’ancien directeur de la Sûreté nationale était prêt à persécuter quiconque s’opposait aux intérêts du sport malien en général et ceux du Djoliba AC en particulier. Ceux qui ont vécu ces moments du Comité militaire de libération nationale ne diront pas le contraire. Pourtant Pinpin a géré tous ces paramètres pour finalement s’en sortir avec un diplôme de l’école de Médecine et une riche carrière sportive. Penda N’Diaye appartient à cette génération de basketteuses qui a savouré le règne de l’ancien directeur des Services de sécurité. La seule ombre de Tiécoro Bakayoko qui planait partout où le Djoliba évoluait, constituait une motivation supplémentaire pour ces joueuses. Autant il cajolait ces dames, autant certains de ses agissements les agaçaient. Et pratiquement, Pinpin était la seule joueuse qui lui tenait tête. Et pour cause : une relation de cousinage la liait à une des épouses de Tiécoro. Voilà pourquoi elle n’avait aucune gêne, quand elle répliquait à certaines actions de celui qui était surnommé “Django“. La clarté du récit écarte tout doute, surtout que toutes les anecdotes de Pinpin sont liées aux relations tendues entre son oncle et l’ancien directeur des Services de sécurité.

Notre héroïne se rappelle comme si c’était hier qu’un jour à la veille des compositions, son oncle lui avait interdit le terrain. Malheureusement, le Djoliba devait jouer dans la semaine contre l’AS Réal. Pendant le match, le Djoliba était mis en difficulté. Assise dans les gradins pour assister à la rencontre, Tiécoro Bakayoko vint la voir et lui intima l’ordre de descendre pour s’habiller et renverser la tendance. Mais elle a refusé parce que convaincue que son oncle serait sans état d’âme, si jamais elle désobéissait à ses instructions.

Photo de groupe de l’équipe nationale en Chine où Pinpin porte le N 13 au bout à gauche

Une autre anecdote porte sur une affaire de moto. Pinpin raconte : “C’est encore mon oncle qui m’avait dit de laisser les entrainements pour préparer le BAC qui s’approchait. Je ne pouvais pas refuser, au risque d’un châtiment corporel exemplaire et Tiécoro ne serait pas là pour me protéger. Ayant constaté mon absence, Tiécoro m’a fait venir pour demander les raisons de mon boycott. Je lui ai dit que la distance entre ma maison et le terrain m’empêchait d’être régulière aux entrainements. Le lendemain, il a payé une moto pour chaque joueuse de l’équipe. Mon oncle, ayant appris cette nouvelle, m’ordonna de ne pas prendre la moto du Djoliba et m’en offrit une, achetée par ses propres moyens. Néanmoins, Tiécoro a gardé mon engin en lieu sûr. Après le BAC, je suis partie lui réclamer ma moto et il n’a pas hésité à me rappeler ma décision de rejeter ladite moto. Nous avons rigolé et j’ai récupéré le cadeau pour disparaitre. En réalité, la tension était très tendue entre mon oncle et Tiécoro. Il n’appréciait pas l’ingérence de celui-ci dans ma vie, ignorant que les mesures de Tiécoro valaient pour toutes les joueuses. Mais, je me suis toujours interposée entre eux pour éviter un clash. Tiécoro ne cessait de me dire qu’il allait mettre mon oncle en prison. Le sport est passionnant et il faut gérer tous ses contours.”

Destin calqué au basket 

Aujourd’hui âgée de 64 ans, avec son 1,82 m, la nature aurait commis une erreur, si elle n’avait pas calqué le basketball dans le destin de Penda N’Diaye dite Pinpin. A vue d’œil, tous les atouts sont là, pour justifier son parcours remarquable dans l’histoire du basketball malien : élégance, précision dans les gestes, dynamisme.

C’est dire que le Guinéen Oury Diallo ne s’est point trompé en l’amenant au Djoliba, où tout est allé si vite. Aussitôt arrivée, Pinpin a commencé les entrainements avec les Rouges de Bamako. Oury Diallo a décelé les qualités de Pinpin au cours des séances d’éducation physique à l’école fondamentale de Missira. C’est le directeur d’école, un Français du nom de Richard, qui leur apprenait les techniques du basketball. Il n’y avait pas une équipe type pour l’établissement, mais il leur inculquait spontanément les notions de la balle au panier avec plaisir. L’initiative du professeur a contribué, sinon a été un facteur déterminant pour créer le désir du basketball chez les jeunots. C’est cet amour primaire qui a facilité d’ailleurs l’intégration de Pinpin au Djoliba AC, lors de la saison 1969-1970.

La même année, elle est admise au DEF et orientée au Lycée notre Dame du Niger. En même temps, Adiza Maïga et Ténin Awa Thiéro sont au lycée de jeunes filles et Salamata Maïga dite Bébé étudie à l’Ecole Normale. Ce qui a créé une relation tripartite entre elles. En d’autres termes, ces joueuses se rencontraient dans les compétitions inter scolaires, au niveau des clubs et à l’équipe nationale.

En 1971, Pinpin fait son premier saut en équipe nationale, à l’occasion du tournoi de la Zone II à Dakar, où pour la première fois le Mali a mis fin au mythe en s’imposant contre les équipes masculines et féminines du Sénégal.

Pinpin a raté certaines campagnes des Aigles, en raison de ses études, parce qu’elle venait d’être admise au BAC et orientée à l’Ecole de Médecine, de Pharmacie et d’Odontostomatologie. Les contraintes de cette nouvelle aventure et la surveillance d’un oncle l’ont éloignée parfois du plancher. Sinon elle a été toujours convoquée en équipe nationale, et toujours active au Djoliba.  La complaisance de l’entraîneur du Djoliba de la faire évoluer sans compétition dans les jambes, faisait grincer des dents dans l’effectif où d’autres plus régulières aux entrainements et plus en jambes, étaient mises sur la touche.

Avec les Aigles, Pinpin a participé aux différents tournois de la Zone II, celui de l’Oers avec les Salimata Dembélé, Aïssata Guinto, qui étaient d’ailleurs à leurs débuts en équipe nationale, aux championnats d’Afrique Féminin de 1974-1976, où elle a été élue meilleure marqueuse et meilleure joueuse du tournoi. L’édition de 1978 fut sa dernière participation à cette compétition de haut niveau.

Le premier panier du match

Parmi toutes ces campagnes, le voyage de Chine à l’occasion d’une invitation de la République Populaire de Chine, constitue l’un des meilleurs souvenirs de sa carrière. C’était vraiment la crème du basketball malien composée à l’époque de Koudédia Sidibé, Fanta Konaté, Salamata Maïga dite Bébé, Ami Fofana dite Panthère ou la Panta, Salimata Dembélé, Aïssata Guinto, Aminata Coulibaly dite Waraba 10. L’équipe malienne a passé un mois de détente à travers les villes de la Chine, sanctionné par quatre victoires et quatre défaites. Qu’est-ce qui explique la particularité de cette aventure des Aigles dames ? Pinpin revient sur ce qui l’a marquée : “La Chine avait été frappée par un tremblement de terre ; l’événement a défrayé la chronique dans le monde entier. Nos parents à Bamako étaient très inquiets, pendant que nous n’étions au courant de rien, compte tenu de la position géographique de la Chine. Comment nous joindre pour avoir nos nouvelles ? Certains parents ont cherché par tous les moyens le numéro de téléphone de l’Ambassade du Mali en Chine. L’ambassadeur les avait rassurés que la délégation malienne se portait bien. C’est le remue-ménage de l’aéroport qui nous a alertés et nous finirons par comprendre que la situation est confuse quelque part. Les autorités chinoises nous ont demandés de ne rentrer à l’hôtel que pour prendre nos bagages, parce que l’éventualité d’un deuxième tremblement de terre planait. Pour la circonstance, nous avons déménagé sous les tentes pendant deux nuits. C’étaient des moments d’émotion très forts, où seuls l’amour du basketball et de la patrie nous tenait en vie avec comme prime de match 10 000 Francs maliens. Parfois, Tiécoro Bakayoko ajoutait 5 000 F pour nous encourager. C’est la première fois aussi où l’équipe nationale féminine a eu son survêtement personnel et trois jeux de maillots différents. Sinon, avant ce voyage, nous portions de ceux des garçons. C’est pourquoi, sur certaines photos, on remarque que certaines joueuses ont retroussé les manches des survêtements. C’était vraiment beau cette aventure chinoise.”

Avec le Djoliba, Penda N’Diaye a raflé des coupes du Mali et des trophées mis en jeu par des sociétés et entreprises d’Etat.

Au-delà, sa première sélection en équipe nationale et la première victoire du Mali sur le Sénégal constituent les bons moments de sa carrière. Au Djoliba, elle se dit nostalgique aujourd’hui de cette ambiance qui caractérisait leur groupe. Malgré le décès de Salamata Maïga dit Bébé, elle se rappelle leur complicité, où l’ancienne secrétaire générale de la Fédération lui demandait toujours une seule chose : le premier panier du match. Les faux pas de l’équipe nationale au Championnat d’Afrique féminin de 1974 à Tunis, et au tournoi de la Zone II à Dakar en 1977, font partie des mauvais souvenirs de Penda N’Diaye. Parce qu’elle est convaincue que le Mali méritait la coupe à ces deux compétitions.

C’est en 1979 que Penda N’Diaye a pris sa retraite au Djoliba et en équipe nationale. Le mariage et la préparation de sa thèse sont passés par là.

Dans le système des Nations-Unies

Contrairement à beaucoup de ces anciennes basketteuses, Pinpin n’a pas totalement décroché avec le basket. Elle assistait aux séances d’entrainement de son club pour voir dans quelle mesure elle pouvait apporter sa touche à l’encadrement. Le comportement indiscipliné de certaines de ses héritières l’a obligée à se retirer définitivement pour se consacrer à son mémoire. Sinon, en 1984 elle a occupé les postes de DTN et de médecin au sein de l’équipe nationale. Surtout qu’elle avait déjà fait un tour aux Etats-Unis pour ses études de spécialisation.

Nantie du diplôme de l’école de Médecine, Penda N’Diaye dite Pinpin n’aura travaillé que deux années dans la Fonction publique malienne. En Décembre 1986, pour cause de grève, comme tous les chefs de service de la santé, elle a été relevée du poste de chef de Division Santé Familiale (Dsf) qu’elle occupait à l’ancienne Pmi centrale. Les Américains, à travers le projet Intrah, la suivaient de très près. Ils ne lui ont pas donnée le temps de souffrir de cette mesure dictatoriale du président Moussa Traoré. Pinpin est recrutée par l’Ong américaine pour servir à Abidjan au Bureau régional de Intrah pour l’Afrique de l’Ouest.

Après cinq ans et épuisée par les voyages et tous ces cours qu’elle a dispensés pour former les médecins sur le Planning familial, Penda N’Diaye démissionne. Décision acceptée, mais elle est retenue à partir de Bamako comme Consultante, le temps pour l’Ong Intrah de trouver son remplaçant. Un an après avoir quitté Intrah, une autre Ong, Population Council, la sollicite pour former dans la sous-région, sur la recherche opérationnelle et l’introduction de nouvelles technologies contraceptives.

Après ce contrat, pendant qu’elle voudrait vraiment se consacrer à ses projets, notamment la construction d’une clinique privée, le projet de CAN 2002 la fait changer d’avis, surtout que des exonérations sont accordées aux entrepreneurs. La voilà gestionnaire d’hôtel, mais le  Fnuap la contraint en 2005 à se dévêtir de cette couverture de chef d’entreprise pour rejoindre son Bureau régional pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre à  Dakar. Pour la dernière fois, elle accepte de travailler et cela pendant neuf ans.

Le mois de décembre de l’année 2014 consacre sa retraite sur décision personnelle, et son retour définitif au pays pour s’occuper de ses affaires.

Pinpin rassure qu’elle commençait à sentir la fatigue, à cause de tous ces voyages et mouvements à travers le monde. C’est pourquoi, elle a même demandé qu’on lui paie ses droits de pension, afin de les investir dans son pays.

Aujourd’hui, elle dirige un grand hôtel qui porte d’ailleurs le nom de sa mère et une salle de gymnastique de haut standing multidisciplinaire.

Au cours de notre entretien, le sort regrettable des anciens sportifs s’est invité dans le débat, avec l’article sur l’ancien sociétaire de l’AS Réal et de l’équipe nationale, Seydou Traoré dit Guatigui (Aujourd’hui NO 88 du vendredi 13 octobre 2017).

Sur la question Pinpin nous a surpris par sa réaction. Elle est en train de monter un projet, pour l’insertion des anciens sportifs. Cela leur permettra de se prendre en charge et d’éviter la mendicité. Elle a déjà commencé cette belle initiative, avec le recrutement d’une ancienne joueuse de football qui occupe la réception de son hôtel.

Pinpin est-il le diminutif de Penda ? Notre héroïne dit qu’elle a hérité ce surnom de son homonyme de grand-mère. A sa naissance, en septembre 1954, celle-ci a instruit à ce que son homo soit appelée Pinpin. Penda en ignore les raisons. Mais tout ce qu’elle sait, c’est que ce sobriquet l’a suivie partout et que les doyens Demba Coulibaly, Mamadou Kaloga, Djibril Traoré, Karim Doumbia et Papa Oumar Diop savaient tellement manier son nom, que ses parents en étaient fiers. Même très fiers.

O. Roger Sissoko

 

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