Le président et le vice-président de la transition du Mali qui durera 18 mois, respectivement Bah N’Daou et le Colonel Assimi Goïta, ont prêté serment, le vendredi 25 septembre 2020, au Centre International de Conférence de Bamako (CICB). Le Procureur Général près de la Cour Suprême du Mali, Boya Dembélé, a, dans son réquisitoire, relevé les multiples défis à relever qui attendent le duo Bah N’Daou et Assimi Goïta. Il les a invités à libérer les personnalités civiles et militaires détenues illégalement. Ou à défaut, les présenter devant un juge si on leur reproche quelque chose. Par ailleurs, dans son rappel de la charte de transition, il a réaffirmé que le vice-président remplace le président en cas d’empêchement temporaire ou définitif de ce dernier.
Dans son réquisitoire, Boya Dembélé a indiqué qu’au terme des articles 3,4,5,6,7,8,9 et 10 de la charte de la transition du 12 septembre 2020, les organes de la transition sont : le président de la transition, le conseil national de transition, et le gouvernement de transition. Selon lui, le président de la transition est secondé par le vice-président qui est désigné suivant les mêmes conditions que le président de la transition (choisi par un collège mis en place par le CNSP). Le vice-président est chargé des questions de défense et de sécurité). Le vice-président remplace le président en cas d’empêchement temporaire ou définitif. Les candidats à ces postes, dit-il, doivent être des personnalités civiles ou militaires, être de nationalité malienne d’origine, etc.
Boya a indiqué que le président et le vice-président de la transition, au vu de leurs parcours professionnels, ont servi la nation malienne avec honneur, dévouement, courage, probité morale et abnégation. Ces valeurs, dit-il, ont fait que le choix porté sur eux, a fait une quasi-unanimité au sein de la population malienne. « J’espère qu’ils pourront répondre aux espoirs placés en eux pour diriger la transition avec les autres organes de la transition »,a déclaré Boya Dembélé avec optimisme. Il a rappelé que la durée de la transition est de 18 mois et doit aboutir à une situation normalisée à la suite d’élections présidentielles et législatives transparentes et crédibles et à l’installation d’autorités dûment élus. C’est pourquoi, dit Boya, je vous invite à se mettre à la tâche pour relire les textes fondamentaux : la charte des partis politiques, la loi électorale, et bien d’autres textes nécessaires à la mise en place d’une démocratie véritable et d’institutions fortes à même de résister à tous les séismes possibles. Parce qu’à notre avis, dit le procureur général, le spectre de la prise du pouvoir autrement que par les urnes doit être circonscrit à jamais pour que le Mali connaisse véritablement une stabilité pérenne. La faillite de l’instauration de la démocratie et de l’État de droit, dit Boya Dembélé, a entrainé un désordre total dans le pays où toutes les règles du jeu sont faussées. Le foisonnement des partis politiques et l’élargissement des espaces de liberté, au lieu de constituer un levier de l’essor socio-économique, regrette le procureur, le politique a, au contraire, plongé davantage le pays dans une situation où personne ne respecte personne ; personne n’écoute personne. Et les arbitres sensés départager les protagonistes, déplore Boya, sont devenus eux aussi des acteurs de la scène. Vous devez saisir cette occasion, a conseillé le procureur à Bah N Daou et à Assimi Goïta, pour créer les conditions qui permettraient au pays de ne plus sombrer. Bref, insiste le procureur général près la cour suprême, de remettre le pays sur les rails. Pour ce faire, dit-il, il faudra véritablement une refondation même de l’État, ou poser les jalons qui permettraient une telle refondation. «Votre tâche est ardue et même très ardue. Vous êtes appelés à relever en si peu de temps, des défis énormes qu’un régime élu aurait mis des années à relever», a fait savoir le procureur général à l’endroit du duo Bah N’Daou et d’Assimo Goïta.
Défis à relever
Les défis à relever sont entre autres : ramener la paix et la sécurité sur l’ensemble du territoire national; lutter contre le terrorisme; mettre en œuvre l’accord pour la paix et la réconciliation nationale issu du processus d’Alger ; recoudre le tissu social et ramener le mieux vivre entre les populations ; gagner le pari de l’organisation d’ élections transparentes et crédibles ; lutter contre la corruption et les infractions financières économiques ; veiller à la bonne gestion des ressources publique, rendre la justice plus crédible et plus transparente ; redonner confiance aux citoyens à l’indépendance de la justice ; apaiser le climat dans l’espace scolaire et remettre les enseignants au travail ; améliorer les infrastructures routières ; respecter les revendications syndicales pour lesquelles l’État a pris des engagements ; réélire la constitution du 25 février 1992 en améliorant les faiblesses ; relire la loi électorale, la loi organique, la charte des partis politiques, l’organisation et le fonctionnement de la Cour Constitutionnelle ; créer un organe unique des gestions des élections. Boya a rappelé au duo, après prestation de serment, que l’État de droit implique que la force reste à la loi et non que la force commande à la loi. «Vous êtes engagés devant Dieu et le peuple malien de préserver en toute fidélité le régime républicain. De respecter et de faire respecter la constitution, la charte de transition et la loi », a-t-il déclaré.
Justice pour les victimes et détenues
En outre, il a ajouté que : « la constitution du 25 février 1992 dans son article 1er dispose que la personne humaine est sacrée et inviolable. Tout individu a droit à la vie, à la liberté, et à l’intégrité de sa personne. En son article 10 alinéa 2, la constitution dispose également que nul ne peut être détenu pendant une durée supérieure à 48 heures que par décision motivée d’un magistrat de l’ordre judiciaire. « Pour l’application de ces dispositions, je vous exhorte à libérer toutes les personnes civiles et militaires détenues depuis le 18 août 2020 et qui n’ont pas encore été présentées devant un magistrat de l’ordre judiciaire». Dans le même ordre d’idée, dit le procureur général, que justice soit rendue à toute les personnes qui ont perdu la vie dans les évènements d’avant 18 août 2020 et toutes les victimes d’avant et après cette date. « Il y va de la paix sociale et la réconciliation des cœurs et des esprits », a conclu Boya.
Hadama B. Fofana
Source: Journal le Républicain-Mali