Le Premier ministre, le Général de Division Abdoulaye Maïga, s’est plié à l’exercice républicain de présentation du Programme d’Action du Gouvernement ce vendredi 16 mai 2025 devant le Conseil National de Transition (CNT). Une cérémonie solennelle d’envergure nationale, présidée par le Président du CNT, le Général de Corps d’Armée Malick Diaw.
Un moment décisif, dira le Premier ministre dans son allocution, avant d’énoncer les huit axes de priorités de la lettre de cadrage du Président de la Transition: le renforcement de la défense et de la sécurité; les réformes politiques et institutionnelles; la satisfaction des besoins fondamentaux de la population; l’amélioration de la carte sanitaire ; l’amélioration du système éducatif ; l’apaisement du climat social; le renforcement de notre diplomatie; la création de conditions pour des élections transparentes et apaisées.
Ce Plan d’Action du Gouvernement découle des orientations des documents stratégiques, notamment la feuille de route de la Transition, les recommandations issues des Assises nationales de la Refondation, le Dialogue inter-Maliens, la Vision « Mali Kura ɲɛtaasira ka bɛn san 2063 ma » et la Stratégie Nationale pour l’Émergence et le Développement Durable : SNEDD 2024-2033. Ce nouveau référentiel et soubassement de la gestion socio-économique du pays tient compte de l’évolution du contexte actuel, en phase avec la Confédération des États du Sahel. Dans sa présentation, le Chef de l’exécutif a dessiné la silhouette du PAG avant de se pencher sur chaque axe avec des données chiffrées, des projections réalistes, avec une aisance inédite.
D’entrée de jeu, à l’axe premier, le Gouvernement prévoit le recrutement de 15 000 militaires et 9 000 agents des forces de sécurité. Des camps militaires seront construits dans six localités (Bougouni, Koutiala, San, Kita, Diéma, Nioro du Sahel), ainsi qu’un hôpital militaire à Banakoroni. L’opération « Dougoukoloko » vise à déployer des plateformes opérationnelles. L’objectif est de renforcer la présence de l’État dans les zones à forte insécurité, d’assurer la sécurité des personnes et des biens, et de lutter contre le terrorisme et la criminalité transnationale.
L’exécutif poursuit la mise en œuvre de la nouvelle Constitution adoptée en juillet 2023 à l’axe 2. L’opérationnalisation du Système Intégré de Gestion des Ressources Humaines (SIGRH) permettra une meilleure maîtrise des effectifs et de la masse salariale. La lutte contre la corruption sera renforcée avec des enquêtes systématiques, le gel des avoirs illicites et la relecture de la loi sur les associations.
À l’axe 3, dans le domaine agricole, une production de 11 millions de tonnes de céréales est attendue pour 2025–2026. Le Gouvernement prévoit de reconstituer les réserves alimentaires stratégiques à hauteur de 84 000 tonnes, d’équiper 380 exploitants agricoles, de fournir 261 406 tonnes d’intrants et 28 400 tonnes de semences améliorées. En matière de soutien social, 17 666 tonnes de céréales seront distribuées gratuitement à 1 115 000 personnes vulnérables. Dans le secteur de l’élevage, 22,5 millions de têtes de bovins seront vaccinées et 20 000 vaches inséminées. L’importation de 300 000 tonnes de riz, 200 000 tonnes de sucre et 30 000 tonnes de graines de coton est programmée. En énergie, la construction de 4 centrales solaires et hydroélectriques est prévue, ainsi que 2 588 km de lignes de transport et 1 378 km de distribution, pour porter l’électricité à 19 heures par jour. En matière d’eau, deux stations de traitement de 76 000 m³/jour chacune seront réalisées. Les infrastructures routières seront améliorées, notamment avec l’aménagement de 138 km sur le corridor Bamako–Dakar. Les services publics seront digitalisés et les représentants de l’État installés dans toutes les circonscriptions.
Il est prévu à l’axe 4, 45 000 stages de formation professionnelle, 1 200 stages de qualification, le soutien à 4 160 projets jeunes. En matière de santé, sept cliniques modulaires, trois centrales d’oxygène, 102 incinérateurs dans les CSCOM et un laboratoire médical P2 seront mis en place. Pour l’assainissement, 677 656 mètres de caniveaux seront curés et 5 stations de traitement de boue de vidange seront construites. Sur le plan foncier, 810 000 parcelles seront immatriculées, 429 hectares réservés pour le logement social, avec 2 789 logements achevés.
La gouvernance économique sera renforcée par la digitalisation des services (Douane intelligente, Trésor Pay), un contrôle strict des dépenses et une meilleure mobilisation des ressources internes. Le secteur minier bénéficiera d’un nouveau Code, d’un encadrement accru des exploitations artisanales et d’un guichet unique du foncier.
Le Gouvernement a placé l’éducation et la formation au cœur de sa stratégie pour bâtir un capital humain de qualité. En 2025-2026, 5 188 apprenants seront pris en charge dans des filières porteuses, en réponse aux besoins du marché du travail.
Dans l’enseignement supérieur, la formation des formateurs à l’ingénierie pédagogique se poursuivra, avec l’appui d’une plateforme numérique nationale et de bibliothèques virtuelles accessibles à tous.
L’offre éducative sera renforcée par la construction de 85 écoles fondamentales et 11 lycées, dont 2 lycées d’excellence. Les universités de Ségou et Sikasso bénéficieront de la réhabilitation de leurs laboratoires pédagogiques.
Le contrôle de qualité sera assuré à travers l’évaluation de 1 144 établissements privés.
L’axe 6 du Plan d’Action mise sur l’amélioration du climat social, la qualité des ressources humaines publiques et l’équité. Pour cela, 200 cadres de dialogue social seront activés dans les secteurs public et privé, et 60 accords syndicaux non exécutés seront relancés. Le Conseil National du Dialogue Social (CNDS) deviendra pleinement opérationnel.
Dans une logique d’inclusion, 90 personnes vivant avec un handicap seront recrutées dans la fonction publique. Le Gouvernement veillera également à la mise en œuvre du cadre juridique de rémunération des agents de l’État. Face à une crise qui a fragilisé la cohésion sociale, le Gouvernement s’engage dans des actions de réconciliation concrètes. 600 jeunes issus des zones touchées par les conflits seront réinsérés socio-économiquement. Le processus d’intégration de 34 000 ex-combattants se poursuivra. Des lieux de mémoire seront aménagés pour les forces armées de défense et de sécurité, et 2 000 victimes de violations graves des droits humains recevront une assistance.
La dimension religieuse est intégrée dans la politique de cohésion, avec 1 000 prêches et sermons encadrés, des dialogues inter et intra-religieux, et un recensement national des édifices de culte.
Un centre national de désendoctrinement sera construit, complété par les centres de Gao, Mopti, San et Ségou contre la radicalisation.
La jeunesse, moteur du développement, sera mobilisée avec le recrutement de 20 000 jeunes volontaires et l’engagement citoyen d’un million de jeunes. Des programmes de formation patriotique et la Biennale du sport seront organisés.
Le programme Olympiade 2024–2028 accompagnera 30 sportifs de haut niveau.
Déclarée Année de la culture, 2025 marquera la relance du secteur culturel. L’État mettra en valeur les patrimoines, soutiendra les artistes et organisera des événements majeurs comme la Biennale artistique et culturelle prévue à Tombouctou. L’objectif est de renforcer l’identité nationale et de faire de la culture un levier de développement.
Portée par l’axe 7 du Plan, la diplomatie malienne défendra les choix souverains du pays et intensifiera ses partenariats stratégiques. La mise en œuvre de la feuille de route de la Confédération des États du Sahel (AES) sera une priorité, tout comme la mobilisation de ressources financières et la promotion de cadres maliens dans les institutions internationales.
Avec 700 milliards de FCFA transférés en 2023 (soit 5,6 % du PIB), la diaspora malienne joue un rôle majeur. Le Gouvernement valorisera cette contribution via des dispositifs de soutien aux projets économiques, un accès facilité aux documents administratifs et une assistance renforcée aux Maliens de l’extérieur.
Le Gouvernement entend garantir des élections crédibles en renforçant le cadre juridique électoral. En lien avec l’AIGE, il poursuivra l’élaboration et la mise à jour des textes législatifs et réglementaires, en assurant une prise en compte des réalités politiques, sécuritaires et techniques.
Sous des applaudissements nourris des membres du Conseil National de la Transition, une suspension de 48h est observée par son Président, le Général de Corps d’Armée Malick Diaw. Les échanges, sous forme de questions-réponses, se poursuivront dans la journée du lundi 19 mai 2025.
CCRP