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Mohamed Ousmane Ag Mohamedoun: «il faut que les gens comprennent que nous ne pouvons pas engager nos communautés comme des chair à canons»

Mohamed Ousmane Ag Mohamedoun, président de la Coalition pour le peuple de l’Azawad (CPA), fait partie des trois responsables des groupes armés accusés par les Nations unies d’entraver l’application de l’accord au Mali. De ce fait, il a été placé sur la liste de personnes visées par les sanctions de l’ONU le 21 décembre dernier. Dans une interview qu’il a accordé à Nord sud journal, Mohamed Ousmane, se dit victime.        

Nord sud journal : Quel est votre réaction après avoir vu votre nom sur la liste de personnes qui entravent l’application de l’accord de paix ?

Mohamed Ousmane Ag Mohamedoun: J’étais très surpris. Il y a quelques mois nous avons rencontré le comité de sanction, nous avons discuté avec eux en toute transparence. Nous sommes convaincus qu’ils n’ont pas la bonne information. Nos positions étaient très claires et n’ont aucune ambiguïté même si ces positions ne nous ont pas fait que des amis. On nous reproche le fait de signer l’accord de paix le 15 mai 2015, sans l’avis de la CMA. Nous avons refusé de lutter contre le terrorisme avec la casquette communautaire comme d’autres l’ont fait. Aujourd’hui, on essaye de nous exclure de l’accord de paix.

Il faut que les gens comprennent que nous ne pouvons pas engager nos communautés comme des chair à canons. Nous voyons ce qui se passe à Ménaka, par contre dans le cadre de l’accord de paix, oui, on est d’accord de lutter contre le terrorisme à travers des unités spéciales de lutte contre le terrorisme.

Vous ne pouvez plus voyager maintenant. Comment vous allez faire ?

On verra avec le Comité de suivi de l’accord (CSA) et avec les acteurs de ce qu’il faut faire. Nous attendons la vérité, et si le conseil de sécurité se rend compte qu’il s’est trompé, il peut revenir sur sa position.

« Je ne connais aucun responsable terroriste »

En réalité ces sanctions montrent aux vrais acteurs du blocage de l’application de l’accord de paix que les sanctions sont possibles, même si dans mon cas c’est injuste.

On vous reproche d’avoir des liens avec des djiahdistes.

C’est grotesque !  Je ne connais aucun responsable terroriste et nos mouvements sont républicains. On parle des liens avec les terroristes et on me qualifie même d’intermédiaire, mais je suis dirigeant de mon mouvement, que je représente au comité de suivi de l’accord de paix. Je suis au-dessus de cette qualification.

Si on me dit que je suis en lien avec les terroristes, il faut qu’on me dise avec le quel. Nous sommes sidérés par le fait que des règlements de comptes d’un mouvement se reflètent dans des rapports de l’ONU. Nous espérons que cela va changer.

A soumpi dans la région de Tombouctou, l’armée malienne a été attaquée près de votre mouvement et certains pensent même que votre chef d’Etat-major a pris part à cette attaque.

Nous sommes ouverts au débat en ce qui concerne ces attaques. Le camp militaire dont il est question est situé à 4 km de la ville de Soumpi, alors que nous, nous sommes basés dans la ville et les attaques se passent souvent la nuit. Donc nous ne savons pas ce qui se passe.

Ceux qui écrivent des résolutions le font souvent avec beaucoup de partialité et de passion. Le conseil de paix de l’ONU doit être vigilant. Quand on accuse quelqu’un, il faut citer les sources qui donnent ces informations au lieu de se cacher derrière les anonymats pour salir les noms des honnêtes gens.

Dans une vidéo qui circule sur les réseaux sociaux, vous appelez vos combattants à arrêter les voleurs et les remettre aux cadis, parmi lesquels vous citez le nom de Houka houka, que certains pensent qu’il est membre d’Aqmi dont les combattants attaquent la MINUSMA.

Houka Houka est un cadi avant même la crise de 2012. Il a été arrêté puis libéré et est aujourd’hui directeur de son école et reçoit régulièrement son salaire (payé par l’Etat, Ndlr) et rencontre régulièrement les soldats de Barkhane.

« Négociation permanant au sujet de notre inclusion dans le processus de l’accord de paix »

Je vous rappelle que dans l’accord de paix, il est mentionné que le rôle de cadi doit être renforcé. Donc je ne vois pas de problème quand je dis à mes hommes d’arrêter les voleurs des voitures des ONG humanitaires et de les remettre aux cadis pour les juger.

Quels sont vos liens avec les mouvements de la CMA et de la Plateforme ?

Un lien de négociation permanant au sujet de notre inclusion dans le processus de l’accord de paix. Au mois d’octobre dernier, aussitôt après le pacte pour la paix signé entre toutes les parties impliquées dans l’application de l’accord de paix, nous avons mis en place une commission composée de Ould Sidatti de la CMA, Harouna Toureh de la Plateforme et moi-même pour trouver une solution. Mais jusque-là nous n’avons pas pu se réunir pour trancher définitivement cette question. Il faut dire que tout le monde n’a pas cette volonté de régler définitivement cette question.

On vous reproche très souvent, lorsque vous étiez membre de la CMA, le fait d’avoir signé l’accord de paix le 15 mai 2015 alors que la CMA n’avait pas donné encore son feu vert.

Nous n’avons pas signé l’accord au nom de CMA. La médiation internationale a invité les mouvements séparément ou collectivement à signer l’accord de paix et nous avons signé au nom de la CPA.

Contrairement aux autres mouvements qui ont été chassés par Aqmi, le vôtre est le seul qui a encore des bases dans le grand nord, notamment à Zouera et qui n’ont jamais été attaquées.

On a maintenu ces bases à nos risques et périls pour protéger nos populations. Nous nous attendons à des attaques à tout moment par ceux qui créent l’insécurité.

Quelle est la situation sécuritaire dans la région de Tombouctou ?

Depuis quelques mois, elle est relativement calme. Généralement c’est dans le cercle de Goundam qu’il y a beaucoup d’attaques mais depuis que nous avons mis en place un mécanisme de communication avec la population pour signaler tout mouvement de voleurs. Ce mécanisme a porté son fruit. Nous avons même réussi à avoir les numéros de téléphone de voleurs qu’on appelle pour les menacer et ils restituent matériels volés. Mais avec le DDR, nous allons arrêter ce travail.

Dans la ville de Tombouctou, les attaques et les vols sont récurrents, comment expliquez-vous cela?

D’après ce que nous avons compris, il s’agit plutôt de règlements de compte entre individus et ce n’est pas forcément le Mécanisme opérationnel de coordination (MOC) qui est ciblé. En tout cas c’est l’une des versions évoquées.

Propos recueillis par Baba Ahmed et Mohamed Salaha

Source: nordsudjournal

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