Ce lundi 13 juin marque un tournant décisif pour l’avenir de la Minusma sur le sol malien. En effet, le renouvellement du mandat de cette mission onusienne sera au centre des débats au Conseil de sécurité de l’ONU, en présence du ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale. Selon des sources, les autorités maliennes soumettront à l’ONU plusieurs amendements concernant le mandat de la Minusma. Fort d’un effectif pléthorique de plus de 14 000 hommes (militaires, policiers et personnel civil) et d’une impressionnante armada de guerre (avion, hélicos, engins blindés et drones), la Minusma assiste impuissante aux massacres des populations maliennes, à la destruction des villages et hameaux et l’occupation des localités maliennes par des meutes de terroristes. Conséquence : des voix s’élèvent de plus en plus au sein des populations maliennes pour réclamer le départ de cette mission.
Pourquoi la Minusma ne s’implique-t-elle pas dans la protection des populations maliennes ? Pourquoi cette mission ne s’engage-t-elle pas pour lutter contre le terrorisme ? Pourquoi n’assiste-t-elle pas les FAMA pour libérer les localités maliennes occupées par des djihadistes ? Que fait la Minusma contre des groupes terroristes comme Aqmi, GSIM, l’EIGS et autres qui se sont implantés dans le nord du Mali ? La Minusma est-elle au Mali pour sécuriser le pays ou faire du tourisme ? Ce sont là autant de questions qui reviennent aujourd’hui sur les lèvres des maliens. Cependant, dès le départ cette « mission de paix » n’a jamais eu de mandat pour lutter contre le terrorisme. Or, le grand problème qui se pose au Mali et au-delà à certains pays de la sous-région, c’est la présence des groupes terroristes et djihadistes.
Pour preuve, il ne se passe plus de semaine sans que des populations civiles innocentes ne fassent l’objet d’attaques barbares de la part de groupes armés qui souvent se déplacent en grand nombre malgré la présence des avions et drones des Nation-Unies. Des villages Ogossagou, Sobane Da, Ganganfani ont été détruits et leurs populations massacrées malgré la présence de la Minusma sur le sol malien. Pour toutes ces raisons et face à l’inertie de mission onusienne les populations maliennes expriment leurs colères et réclament le départ des soldats onusiens. Ailleurs, du côté des autorités l’on indique que ce départ n’est pas à l’ordre du jour actuellement. Cependant, Bamako envisage de soumettre à l’ONU beaucoup d’amendements dans le mandat de la Minusma. Aussi, le Mali par la voix du Premier ministre n’acceptera plus que la Minusma sert de couverture à certains pour des « missions d’espionnages » et/ou de déstabilisation.
Rappel : La Minusma est la neuvième mission avec un mandat de protection des civils. Elle est autorisée à prendre tous les moyens nécessaires pour assurer la protection des civils immédiatement menacés de violences physiques. Cette responsabilité s’entend comme complémentaire de celle de l’Etat hôte, qui a la responsabilité première de la protection de sa propre population.
Il faut préciser que le Conseil de sécurité a créé la Minusma par sa résolution 2100 (2013), du 25 avril 2013. En vertu de cette résolution, la Mission a été chargée d’appuyer le processus politique. Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité, a autorisé la Minusma à prendre toutes les mesures requises pour s’acquitter du mandat qui lui a été confié. Aussi, le Conseil de sécurité a demandé à la Minusma d’aider les autorités de transition maliennes, à stabiliser le pays et à appliquer la feuille de route pour la transition, en accordant une attention prioritaire aux principales agglomérations du Nord et aux axes de communication, en protégeant les civils, en surveillant la situation des droits de l’homme, en mettant en place les conditions indispensables à l’acheminement de l’aide humanitaire et au retour des déplacés, à l’extension de l’autorité de l’État et à la préparation d’élections libres, ouvertes à tous et pacifiques.
Dans sa résolution 2164 (2014) du 25 juin 2014, prorogeant le mandat de la Minusma pour une année supplémentaire, le Conseil a décidé d’axer le mandat sur des tâches prioritaires telles que la sécurité, la stabilisation et la protection des civils, l’appui au dialogue politique national et à la réconciliation nationale, ainsi qu’à l’appui au rétablissement de l’autorité de l’État dans tout le pays, à la reconstruction du secteur malien de la sécurité, à la promotion et la protection des droits de l’homme, ainsi qu’à l’aide humanitaire.
Par une autre résolution 2227 (2015), le Conseil de Sécurité a renouvelé le mandat de la Minusma et l’a essentiellement réorienté sur la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale au Mali et la supervision du cessez-le-feu. Outre les tâches spécifiques assignées à la Minusma, le Conseil de Sécurité établit (résolution 2227) les obligations incombant aux parties maliennes à l’Accord de paix et de réconciliation nationale et des acteurs internationaux concernés, y compris le Comité de Suivi de l’Accord (CSA) et ses membres.
Lors du troisième renouvellement du mandat de la Minusma, à travers sa résolution 2295 (2016), le Conseil de Sécurité a décidé que la priorité stratégique de la Mission consiste à appuyer la mise en œuvre par le Gouvernement, les groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination, ainsi que par d’autres parties prenantes maliennes, de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, en particulier ses dispositions relatives au rétablissement et à l’extension progressive de l’autorité de l’État. Il autorise la Mission à utiliser tous les moyens nécessaires pour accomplir son mandat, dans les limites de ses capacités et dans ses zones de déploiement et demande à la Minusma d’adopter une démarche plus proactive et robuste afin de mener à bien son mandat.
Aussi, la résolution 2364 (2017) maintien l’effectif de la Minusma à un maximum de 13 289 militaires et 1920 policiers. La priorité stratégique de la Mission demeure l’appui à la mise en œuvre par le Gouvernement, les groupes armés des coalitions Plateforme et Coordination, ainsi que par d’autres parties prenantes maliennes, de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Et ce, en particulier dans ses dimensions politiques et ses aspects liés à la sécurité, notamment le rétablissement et l’extension progressifs de l’autorité de l’État.
Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, le Conseil de Sécurité décide que le mandat de la Minusma comportera les tâches prioritaires, comme l’appui à la mise en œuvre de l’Accord. Ainsi la mission devait appuyer les efforts du gouvernement pour rétablir et étendre effectivement et progressivement l’autorité de l’État et l’état de droit sur tout le territoire ; soutenir le cantonnement, le désarmement, la démobilisation et la réintégration des groupes armés. Et, par ailleurs, elle a aussi pour mission d’assurer, sans préjudice de la responsabilité première des autorités maliennes, la protection des civils menacés de violences physiques; en soutien aux autorités maliennes, stabiliser les principales agglomérations et les autres zones où les civils sont en danger, notamment dans le nord et le centre du Mali, et, à cet égard, renforcer les moyens d’alerte rapide, anticiper, écarter et contrer les menaces, notamment les menaces asymétriques, et prendre des mesures actives et robustes pour protéger les civils, y compris en effectuant activement et efficacement des patrouilles dans les zones où les civils sont en danger, et empêcher le retour d’éléments armés dans ces zones, en ne menant d’opérations directes qu’en cas de menaces graves et crédibles; contribuer à créer les conditions de sécurité indispensables à l’acheminement sûr de l’aide humanitaire sous la direction de civils, conformément aux principes humanitaires, et au retour volontaire, en toute sécurité et dans la dignité, des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et des réfugiés, ou à l’intégration locale ou à la réinstallation des déplacés et des réfugiés, en coordination…
La résolution 2423 (2018) reconduit pour un an le mandat robuste que le Conseil de sécurité a confié à la MINUSMA. Ce mandat est hiérarchisé et orienté en priorité vers le soutien à la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation, qui demeure l’objectif premier pour la stabilisation du Mali, mais aussi l’appui au retour de l’Etat dans le centre du Mali, marqué par un cycle croissant de violences.
Ensuite, une autre résolution 2480 (2019) du Conseil de sécurité des Nations unies, a renouvelé pour un an le mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).
Cette résolution 2480 insiste sur la nécessité de progrès urgents dans la mise en œuvre de l’accord de paix, avec des réalisations précises attendues dans l’année à venir et un message clair : ceux qui bloquent la mise en œuvre de l’accord s’exposent à des sanctions.
L’ONU a également appelé les autorités maliennes à mettre en œuvre sans délai une stratégie globale pour mettre fin aux violences et assurer le retour de l’État et encourage la MINUSMA à renforcer son action dans cette zone, qui constitue désormais la deuxième priorité stratégique de la mission.
En adoptant la résolution 2531 (2020), le Conseil de sécurité autorise la MINUSMA à utiliser tous les moyens nécessaires pour prioritairement appuyer la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali par les parties maliennes et faciliter l’application par les acteurs maliens de la Stratégie de stabilisation du centre du Mali, dans le cadre d’une action globale à orientation politique, afin de protéger les civils, réduire les violences intercommunautaires et de rétablir l’autorité et la présence de l’État ainsi que les services sociaux dans le centre du pays.
Enfin, le mardi 29 juin, 2021 le Conseil de sécurité de l’ONU a prolongé jusqu’au 30 juin 2022 sa mission de la Minusma. Ce texte a été adopté à l’unanimité des 15 membres du Conseil de sécurité, mais a fait l’objet de plusieurs explications.
Mémé Sanogo
Source : L’Aube