Les Maliens se sont endormis. Assoupis, comme frappés de la maladie du sommeil. Alors que, c’est l’existence même de leur pays, qui est menacée par un double péril : impérialiste et djihadiste.
Le Malien d’aujourd’hui peut être peint en peu de mots : inconscience, insouciance et fatalisme. « Tais-toi et détourne le dénier public. Et s’il en reste, la nation pourrait en profiter », disent les uns. Et les autres : « Le pays ne profite qu’à ses dirigeants et à leurs ayants-droits. Nous, on n’a rien à en tirer. Alors que le Mali se développe ou pas, on s’en foot ! ». Et la troisième catégorie, celle des fanatiques, d’ajouter : « Si nous sommes pauvres, misérables, c’est que Dieu l’a voulu ainsi. C’est notre destin. Nul ne peut changer son destin ».
Un fanatisme entretenu à dessein
Entretenu par des prêcheurs aux connaissances discutables, ce fanatisme a fini par gagner l’écrasante majorité de la population. Laquelle est, soit transformée, en « bétail électoral » par des politicards, dont l’objectif est de jouir des avantages liés à leur poste. Soit, en « vache laitière » par des leaders religieux, qui se construisent des immeubles. Et roulent carrosse sur le dos de leurs semblables.
L’inconscience et l’insouciance font, désormais, partie de l’ADN même du Malien, devenu au fil des ans un « individu génétiquement modifié ».
Pendant que le Mali est menacé de partition – par les impérialistes, qui entendent le diviser en deux pour faire main basse sur les ressources naturelles dont regorge le Nord et de disparition, par les djihadistes qui s’apprêteraient à hisser sur notre sol un « Etat Islamique du Sahel » – Les Maliens, eux, s’adonnaient à leurs plaisirs. Comme si de rien n’était. Les cortèges de mariage, les bâptêmes princiers et les manifestations folkloriques… n’ont pas baissé d’un iota. Bien au contraire. Alors que notre pays est en guerre pour sa survie.
Pendant que le Mali est menacé de disparition, par les terroristes, les leaders religieux, eux, se livrent à des querelles de chapelle. Convaincus qu’ils sont, que Dieu descendra, les jours à venir, sur terre pour libérer notre pays à notre place. Combien de prières collectives ont-elles été financées, à grands frais, par le gouvernement ? Et pour quels résultats ? Personne ne viendra libérer le Mali à la place des Maliens. Ni la France, ni la Minusma, ni le G5 Sahel, encore moins Dieu. Qui ne semble plus répondre à nos prières.
Chaque jour que Dieu fait, le Mali se réduit à sa portion congrue. Avec, à la clé, des centaines de morts par semaine. Et des populations transformées en réfugiés dans leur propre pays. Sans sécurité, elles fuient – par centaines – leurs localités. Avant de se retrouver, sans assistance, dans les centres urbains.
Après le Nord, devenu le terrain de jeu des bandits et barbus de tout poil, c’est le tour du Centre de tomber aux mains des terroristes.
Les forces internationales peinent à contenir la vague djihadiste, qui se propage à dose homéopathique dans le Sud du pays. Avec les conséquences qu’on connaît. Plusieurs écoles sont fermées, notamment, à Banamba, dans la région de Koulikoro, par les djihadistes. Qui menaçaient les « gens- saignants » de mort.
Avec les moyens de bord, l’armée tente – avec un certain succès ces derniers temps – de faire face à son rôle régalien.
Une classe politique défaitiste
Censée faire l’union sacrée autour du Mali, la classe politique, elle, se contente de protéger son beafteak. Votée à l’unanimité, à l’Assemblée nationale, la prorogation – pour la deuxième fois consécutive – du mandat des députés en est la parfaite illustration. Aucun ministre, ni député, encore moins les fonctionnaires n’ont proposé qu’une partie de leurs indemnités soient affectées à l’armée pour lui permettre de faire face à ces deux périls, qui menacent l’existence de notre pays.
Pire, aucun leader politique n’a eu le courage de dénoncer le « double jeu » de la France, ni son échec au Mali. Comme ce fût de Chérif Sy, ministre burkinabè de la Défense, qui disait dans une interview accordée, récemment, à nos confrères du « Sahélien du Faso » : « La France n’a pas intérêt à chasser les djihadistes. Pourquoi ? Parce que ses contrats militaires vont s’arrêter ; les ventes d’armes vers l’Afrique vont baisser… Les conflits sont maintenus, artificiellement. Car le pillage des matières premières ne sera plus possible ou sera très couteux ».
C’est pour toutes ces raisons, que les Maliens doivent se mettre débout, comme un seul homme, pour défendre leur pays. Soit, en obligeant la communauté dite « internationale » – à jouer franc jeu avec notre pays. Soit, en obligeant le gouvernement à mettre plus de moyens au service de nos forces armées et de sécurité.
A ton appel, Mali
Le Mali est à un tournant décisif de son histoire. Ce n’est plus une question d’IBK, de Soumaïla Cissé, de parti ou d’idéologie politiques ; il s’agit, désormais, du Mali, l’héritage que nous ont légué Soundiata Keïta, Tiéba et Babemba Traoré, Askia Mohamed, Firhoun, Samory Touré et autres Banzani Théra… Ils ont choisi de se battre jusqu’à la mort, plutôt que de voir leur nation tomber aux mains de l’envahisseur blanc ? « La mort plutôt que la honte ! », disaient-ils. Et nous ?
Débout, Maliens ! Car, l’heure n’est plus aux critiques stériles, aux incantations, encore moins aux querelles politiciennes ; mais à la mobilisation générale autour du seul héritage qui nous est commun : le Mali.
Si nous nous couchons, nous sommes morts. Et le Mali, avec.
Oumar Babi
Source: Canard Déchainé