Le rêve de voir tous les Maliens s’asseoir autour de la même table pour sauver le Mali semble s’éloigner davantage. En effet, au moment où l’on parle de Dialogue Inter-maliens, la justice malienne vient de lancer un mandat d’arrêt international contre des leaders terroristes et séparatistes maliens pour leur implication dans des faits de terrorisme et de violence contre les populations civiles.
Désormais, sous le coup d’un mandat d’arrêt international, les leaders terroristes et séparatistes comme Iyad AG GHALI ; Amadou BARRY surnommé Amadou KOUFA ; Bilal AG ACHERIF ; Alghabass AG INTALLA ; Fahad AG ALMAHMOUD, Achafagui AG BOUHADA, ne seront pas au rendez-vous pour la paix et la réconciliation.
De l’avis de certains observateurs, cette démarche est préjudiciable à l’inclusivité du processus quand on sait que des participants à plusieurs foras avaient publiquement appelé au Dialogue avec tous les maliens, y compris les chefs terroristes.
Les travaux de l’atelier de validation des termes de références (TDR) du Dialogue Inter-Maliens ont pris fin, hier jeudi, au Centre international des conférences de Bamako (CICB). Les participants venus de l’intérieur et de l’extérieur du pays se sont penchés notamment sur cinq thématiques qui sont abordées dans cinq commissions différentes. Chaque commission comportait 21 personnes.
Ces commissions avaient pour mission de valider les TDR du Dialogue. Selon Zeini Moulaye, président de la Commission paix, réconciliation nationale et cohésion sociale, ‘’nous devons préparer les meilleures conditions de réussite du dialogue’’.
Cet atelier national de validation des termes de références du dialogue inter maliens pour la paix et la réconciliation nationale a démarré le lundi 26 février dernier. Donc, les résultats de tous ces travaux seront soumis au Comité de pilotage du Dialogue Inter-Maliens.
Selon Younouss SOUMARE de la Forsat civile, une organisation de la société civile qui soutient les autorités de la transition, le dialogue inter-maliens est, «ouvert à des Maliens qui ne remettent pas en cause l’unicité du pays».
L’activiste de la société civile ajoute que, « tous ceux qui se légitiment dans un Mali uni, indivisible, peuvent prendre part à ce dialogue. Mais tous ceux qui se légitiment être terroristes, séparatistes et qui font des réclamations, ils n’ont plus de place dans ce pays. Ceux-ci ne peuvent donc pas prendre part à ce dialogue entre les Maliens.»
Échec en vue
Mohamed El Maouloud RAMADANE, porte-parole du CSP-PSD, le Cadre stratégique permanent regroupant les anciens rebelles de la Coalition des mouvements de l’Azawad , affirme qu’un tel dialogue est voué à l’échec.
«Ils parlent d’un dialogue inter-maliens, mais d’un seul côté. C’est-à-dire, les chefs de tribu avec les autorités traditionnelles qui sont fidèles à ces autorités. Je ne vois pas le problème qu’ils cherchent à résoudre. Pendant ce temps, il y a les autres qui sont en conflit avec les autorités maliennes, par exemple les mouvements du CSP-PSD d’un côté et de l’autre côté, les mouvements djihadistes du JNIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans). S’il y a un problème aujourd’hui, c’est bien entre les représentants de l’Etat et ceux de ces organisations. Un dialogue qui n’existe pas entre ces partis, je ne vois pas quel est son objectif », estime le porte-parole du CSP-PSD.
Un nouveau pacte national
Mais pour Ibrahim Yahaya de l’International Crisis Group, ce dialogue pourrait favoriser des discussions avec les groupes armés , alors que, selon lui, la situation sécuritaire se détériore.
«Il peut prendre la forme d’un dialogue avec les forces vives de la nation, y compris la société civile, les autorités traditionnelles, les autorités religieuses etc… C’est d’ailleurs ce qu’on voit se mettre en place actuellement. Mais il pourrait aussi prendre la forme d’un dialogue avec les belligérants et notamment le Cadre stratégique permanent (CSP-PSD), afin de mettre fin aux hostilités et se donner les moyens d’une paix durable au nord du Mali. Je crois que ce dialogue inter-maliens pourrait prendre la forme de discussions pouvant aboutir à un nouveau pacte national qui regrouperait toutes les forces en armes», explique Ibrahim Yahaya.
Dans son discours à la nation le 31 décembre 2023, le président de la transition, le colonel Assimi GOÏTA a dit avoir opté pour cette voie. Selon les autorités, le dialogue inter maliens devrait permettre de lancer un processus pour la paix et l’élimination des racines des conflits communautaires.
Mais, pour un retour effectif à la paix, des voix prônent l’ouverture d’un dialogue avec la Coordination des mouvements de l’Azawad, la CMA et les groupes terroristes.
Lors du dialogue national inclusifs en décembre 2019, les participants avait recommandé l’ouverture d’un dialogue avec les leaders terroristes maliens.
Cette requête avait été également reprises dans les recommandations des Assises nationales de la refondation (ANR), tenues en décembre 2021.
Pour l’ancien premier ministre malien Moussa MARA , futur candidat du parti Yelema le Changement, ce dialogue doit inclure, sans réserve, tous les Maliens en arme y compris les groupes terroristes.
Par Abdoulaye OUATTARA