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Mali – TIC : La Covid-19, une nouvelle opportunité

La crise née de la pandémie du coronavirus a entraîné des bouleversements dans plusieurs domaines d’activité au Mali et à travers le monde. Des changements et des adaptations qui  ont mis en exergue la nécessité de développer davantage les services numériques dans le domaine des TIC (Techniques de l’information et de la communication). Enseignement à distance, télétravail ou transactions financières, ces réponses urgentes à des questions concrètes démontrent que chez nous les solutions innovantes peuvent contribuer à élargir le champ des possibles. Mais leur développement est conditionné à celui des infrastructures et de l’écosystème par l’État, afin de permettre une participation efficiente des autres acteurs.

 

La pandémie du  coronavirus a surtout entraîné des changements dans les relations de travail. Le processus de digitalisation entamé bien avant  le déclenchement de la maladie dans les domaines du télétravail ou de l’apprentissage, avec le téléenseignement, n’est pas nouveau, mais « la Covid-19 a mis en exergue l’intérêt de la digitalisation et va aussi accélérer le processus », note M. Mohamed Diawara, directeur général de la société Général Computech.

Les secteurs qui seront véritablement impactés par l’accélération sont ceux de la monnaie virtuelle et du travail collaboratif, estime M. Diawara. Les premières mesures préconisées dans les pays durement frappés par la pandémie ont été les confinements. Et, les besoins de consommation ne s’arrêtant pas, les transactions financières ont continué pour assurer ces services.

Processus continus

Entamée depuis quelques années, la digitalisation de la monnaie a connu un essor important en Afrique et le volume croissant des transferts d’argent, notamment, en est une illustration. Mais « la crise va accélérer ce processus », assure M. Diawara. Ce qui confortera certaines initiatives dans le développement des banques en ligne et permettra également la vulgarisation de nouveaux outils, dont l’assistance vocale. Les plateformes d’achats déjà fonctionnelles dans plusieurs domaines sont autant d’opportunités qui se développeront. Ce qui va aussi changer, c’est le comportement au travail, avec les visioconférences qui se généralisent aussi bien chez les institutionnels que chez les privés et le développement des plateformes d’accès aux données.

Chargé notamment de l’amélioration de la gouvernance et des programmes et institutions,  le Programme d’appui au développement de l’Enseignement supérieur (PADES) comporte un volet TIC, essentiel pour la modernisation. « Pour améliorer l’accès au numérique et faciliter ses usages, le PADES a financé la réactivation du MaliRen (Réseau d’éducation et de recherche) en le dotant d’un réseau autonome pour lui permettre de se connecter au réseau ouest-africain. La formation à distance est une composante essentielle de ce processus », indique le Professeur Bakary Cissé, Coordinateur du PADES.

La pandémie du coronavirus a été une opportunité qui a accéléré le concept général de la plateforme numérique de formation en ligne pour tout le secteur de l’éducation, ajoute M. Cissé.

Actuellement, le PADES finance la formation des enseignants de toutes les universités au concept et à la mise en ligne de contenus numériques sur la plateforme Moodle. Parallèlement, certains supports sont enregistrés sur la plateforme Claroline pour les autres sous-secteurs de l’éducation. Par ailleurs, le PADES financera l’appui de l’UQAM (Université du Québec à Montréal) à la FSEG (Faculté des sciences économiques et de gestion), afin d’atténuer la perte de temps et d’assurer le maintien des services d’éducation, en mettant les ressources à la disposition des étudiants, en co-produisant du contenu dans les matières demandées par les experts de SG CONSULTING, notamment les professeurs de l’ESG – UQAM et la FSEG, et en mettant à la disposition des étudiants des cours en ligne.

Ce processus va se poursuivre et même se renforcer, assure le responsable du PADES. Car « l’enseignement en ligne ne doit pas être un effet de mode », prévient un acteur. Ce besoin de mettre la connaissance et l’éducation à la disposition du plus grand nombre doit être un facteur d’innovation et les technologies un moyen pour l’assurer.

Booster les initiatives

« La crise née du Covid-19 a permis de mettre en exergue l’apport des TIC de façon transversale dans tous les domaines », explique M. Bakary Kouyaté, gestionnaire du centre d’incubation de l’Agence de gestion des technologies de l’information et de la communication (AGETIC).

Le confinement ayant empêché les employés des services publics et privés de se rendre sur sites pour travailler, l’explosion du télétravail est devenue une réalité. Durant la même période, les solutions de télétravail qui existaient déjà ont été mises en œuvre et ont ainsi permis d’assurer la continuité du service public, comme dans le domaine de l’enseignement. Mais la crise a aussi favorisé un esprit de créativité et donné force à plusieurs initiatives.

Plusieurs inventions, en termes d’applications, de robotique, d’intelligence artificielle, ont permis « de libérer le génie créateur. Des robots pulvérisateurs développés par des jeunes maliens et des systèmes de respirateurs sont en cours de test. Plusieurs nouvelles inventions ont vu le jour », ajoute M. Kouyaté.

Des initiatives qui se sont multipliées à travers le monde, comme en Corée, où une application permettant de tracer les citoyens et de fournir une carte sanitaire a été développée. Elle permet de savoir dans quelle zone il y a danger ou pas et le citoyen qui quitte une zone pour une autre reçoit des alertes et est informé des dangers et risques éventuels qu’il court.

Plus près de nous, au Rwanda, des robots permettant d’agir sur les patients ont été mis au point afin d’éviter les contaminations massives du personnel soignant.

Au Mali, d’autres initiatives, comme celle du drone sonore pouvant survoler les marchés et émettre un message informant par rapport à la maladie, ses mesures de prévention et ses modes de contamination, ont aussi été développées.

Contraintes

Autant les opportunités sont grandes dans le domaine, autant les contraintes le sont. Ainsi, lorsque le besoin à satisfaire n’est pas pris en charge à la base, le problème perdure. En effet,  chez nous, c’est la conception de l’outil qui fait défaut, « parce que l’offre n’est pas adaptée à la clientèle », explique M. Diawara. Souvent, ce sont des standards très compliqués, conçus ailleurs et inappropriés pour répondre à nos demandes. C’est pourquoi il faut une analyse réelle de nos besoins et de nos réalités pour développer les solutions, au risque de voir les outils que nous adoptons rangés dans les tiroirs.

Si dans ce processus les privés qui conçoivent les outils jouent un rôle de premier plan, l’État a le devoir de créer les conditions adéquates, suggère M. Diawara. L’État et les privés connaissant leurs intérêts et leurs besoins, c’est à chacun d’utiliser la technologie dans ce cadre. Mais « il n’y a pas une course entre eux ». Le manque d’infrastructures TIC figure au nombre des contraintes, selon M. Kouyaté.

D’autre part, l’écosystème du numérique doit être favorisé par l’État. Et sur ce plan, le coût de la connexion est encore un frein pour les usagers, alors qu’en disposer ne devrait plus être un luxe, comme c’est encore le cas ici.

En outre, l’accent doit être mis sur la formation de la ressource humaine. Les personnes ressources qualifiées, indispensables au développement des TIC, font encore défaut. En effet, il n’existe « aucune école informatique de l’État qui forme des cadres dans ce domaine, alors que c’est son rôle primordial de les former pour produire », déplore M. Kouyaté.

Il faut le comprendre et s’en convaincre, « le numérique apporte beaucoup plus que l’agriculture, que nos mines d’or, parce que son développement n’a pas de limites, alors que les ressources des secteurs sur lesquels nous nous basons actuellement sont épuisables. Chaque jour on peut créer et innover et chaque jour de nouveaux besoins apparaissent. Nous avons donc intérêt à développer ce secteur. L’État doit même mettre en place une banque pour financer ce domaine d’activité, tout comme le domaine agricole, afin que lorsqu’une entreprise a un projet et sollicite un financement, ce problème, qui constitue une contrainte majeure, soit résolu ».

Fatoumata Maguiraga

Journal du Mali

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