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Liberté d’expression : L’épée de Damoclès au-dessus de la presse malienne

Le gouverneur du district de Bamako est le bouc émissaire parfait pour endosser la responsabilité de réduire au silence une radio qui gêne.

La fermeture de Renouveau FM, notifiée par une décision de ce « grand commis de l’Etat », rappelle les coups de tête des administrateurs coloniaux qui régnaient sur Bamako. Envahir une station de radio par les forces de l’ordre est une première dans la capitale malienne de mémoire de démocrate. Le basculement du Mali vers le musèlement des voix discordantes ne tient plus qu’à un fil.

Tout dépend à présent de l’attitude des organisations de défense de la presse face à cette décision réactionnaire dont le seul responsable est le gouvernement. Il y a l’auteur du liberticide, il y a aussi les commanditaires. La question est donc de savoir à qui profite le crime. L’on sait que cette radio dérange énormément les autorités du pays en donnant de la visibilité à Ras Bath, un chroniqueur fougueux.

Chacune des émissions de ce quadragénaire démolit ceux qui ont le malheur d’être les cibles de « Carte sur table », une chronique presque suivie dans tous les foyers de la capitale et d’ailleurs. L’argument mis en avant par le gouvernorat souligne la nécessité de «préserver l’ordre public et la tranquillité dans le district de Bamako».

Erreur ! C’est une décision contreproductive que même le très puissant Louis Faidherbe, gouverneur général de l’Afrique occidentale française (AOF), n’aurait pas prise en son temps. La presse ne peut voir dans cette décision qu’une intimidation ouvrant la voie à une chape de plomb sur la liberté d’expression. Dans un contexte électoral, cela équivaut à créer un désamour entre le quatrième pouvoir et le régime en place.

L’administration malienne, engluée dans ses habitudes héritées de la colonisation, est le pire ennemi du pouvoir, partant l’Etat. Les représentants de l’Etat sont toujours en déphasage avec le peuple ; la vue d’un préfet, sous-préfet ou gouverneur suffit à effrayer les citoyens. Cela explique en partie les rébellions et le rejet de l’Etat dans le nord et le centre du pays ; une certaine haine envers les « Bambara» qui ne sont connus par une partie de la population qu’à travers l’administration.

La question que l’on se pose est de savoir à qui le tour après Renouveau FM? Il y a bien une épée de Damoclès au dessus de la presse malienne, une menace sournoise dont l’effet collatéral est l’enquiquinement de journalistes français à l’aéroport de Bamako à la veille du premier tour de la présidentielle. Ce qui est sûr, le gouverneur vient de donner un coup d’accélérateur à la popularité de Ras Bath. Aux yeux du Malien lambda Rasta est « le seul » qui dit la vérité. Fermer Renouveau FM réconforte cette opinion bien ancrée.

Soumaila T. Diarra

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