Au reste, le regroupement du FSD ne demande rien d’extraordinaire en soumettant, en termes de contribution à l’atelier de validation des TDR du Dialogue tenu en mi-septembre 2019, une conditionnalité de son éventuelle participation en sept points comme suit :
- que le Dialogue ne soit pas que politique mais national, étant entendu que la proposition d’accord politique du FSD suggérait en deux séquences un dialogue politique dit « de haut niveau » devant servir à élaguer les aspérités entre acteurs politiques pour ensuite aller à un dialogue national entre tous les forces socio-politiques ; la proposition a été dévoyée et mal intégrée dans l’accord politique de gouvernance (APG) sous forme de dialogue « politique » inclusif, oubliant que cela était désormais désuet après signature de l’APG ;
- que soit évalué l’utilité de tous les participants et allier l’inclusivité à la représentativité paritaire, tant de la majorité, de l’opposition que de la société civile, en évitant la surreprésentation de l’Etat qui devrait se limiter strictement à la facilitation logistique, sécuritaire et budgétaire. Nous savons que l’Administration étatique est aux ordres du pouvoir gouvernemental et politique, et nous voyons mal un gouverneur ou un préfet faire autrement qu’en application des instructions du Ministre de tutelle. A propos de société civile, il y a une forte dénaturation du concept, tant il a été le plus souvent utilisé à des fins politiciennes à outrance ; et je rappelle, à ma lecture des choses, que c’est la « société civile » qui avait porté la candidature du Président Amadou Toumani Touré en 2002, sous la férule du « Mouvement citoyen » et qui se trouvait du coup comptable de la gestion du pouvoir politique au Mali ;
- qu’il soit précisé à l’avance que le processus décisionnel qui devrait être sanctionné par une majorité qualifiée des trois-quarts (3/4), à défaut de consensus sur un point donné. Cette demande est intimément liée au point précédent et ne peut être efficiente que lorsque le choix des participants au Dialogue a été tamisé et convenu, à tous les niveaux ;
- que soient débattues les raisons des retards et blocages de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger et, le cas échéant, envisager sa relecture ;
- que soient appréciées l’opportunité et la pertinence de la révision constitutionnelle en ce moment en raison, entre autres, de l’absence de l’Etat à Kidal et dans bien des localités du centre et du nord, de la persistance voire l’aggravation de l’insécurité ; et de la nécessaire mise en place des règles et mécanismes permettant la transparence des consultations électorales ou référendaires ;
- qu’il soit affirmé clairement le caractère exécutoire et contraignant des résolutions adoptées, pour dorénavant couper court à la sempiternelle manœuvre de parlementer sans engagement, de produire des recommandations pour ensuite les reléguer aux oubliettes sans aucune conséquence ;
- et enfin qu’il soit mis en place le mécanisme d’un Comité de suivi indépendant et participatif, dans la logique des points 2 et 3 ci-dessus.
Pour revenir à l’exigence de conférer un caractère exécutoire et contraignant aux résolutions attendues, d’aucuns vont jusqu’à estimer que c’est trop demander à un pouvoir « légitime », alors que le contexte de crise de confiance et de méfiance fondée sur du vécu milite à se prémunir de précautions pour ne pas continuer à servir de faire-valoir à un pouvoir abonné à l’esbrouffe et à au jeu politicien, au détriment d’une action résolue de recherche des moyens et solutions de sortie de crise.
D’ailleurs, un pouvoir qui a concédé et signé un Accord comme celui issu du processus d’Alger avec son contenu et ses accessoires occultes convenus en faveur de groupes irrédentistes et anti-républicains (quand le pouvoir était encore plus légitime), a connu pire et ne doit rien craindre des citoyens républicains et patriotes réclamant le cadre d’un dialogue national, ouvert, inclusif, démocratique…, même si on y ajoutait le qualificatif “souverain”.
Et qui plus est, comment comprendre qu’on veuille :
- mobiliser les populations, par temps de travaux ruraux intenses, pour tenir des concertations locales dans les quartiers, villages et communes, …
- drainer des délégations de forces vives de la base vers les cercles, des cercles vers les régions, …
- demander aux Maliens établis à l’extérieur d’abandonner leurs occupations pour se retrouver à échanger en un lieu, situé souvent à dizaines voire des centaines de kilomètres de leur résidence respective, …
- convier les représentants de la société civile, des forces socioprofessionnelles et politiques de l’intérieur comme de l’extérieur à “dialoguer” entre elles et “diagnostiquer” les écheveaux de la crise multiforme malienne, durant des jours et des jours, pour en proposer des solutions concertées et convenues, …
… Et refuser de donner la garantie d’une application fidèle et intègre de ces solutions, … Cela est singulièrement une perte de temps, d’efforts et de moyens, mais aussi un manque de compassion et de considération pour le Peuple malien meurtri, déjà déçu par l’exemple du sort funeste réservé aux conclusions de la Conférence dite d’entente nationale de 2017. Et c’est bien dommage pour notre Peuple d’en être là, dans son profond désarroi et face à son destin !
Source: L’Aube