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Le porte-parole de la CRP, Dr Aboubacar Sidiki Fomba à cœur ouvert : “La politique n’est pas de l’animosité. Certes, le président IBK a échoué, mais je ne doute pas de son patriotisme”

Dans une interview qu’il a bien voulu nous accorder, le porte-parole de la Coalition pour le renouveau politique (Crp), le Dr Aboubacar Sidiki Fomba, s’est prononcé sur les sujets brûlants de l’heure, notamment le bilan du président IBK, la question de l’alternance en 2018, les missions de la Crp, la question de la candidature unique de l’opposition…

Aujourd’hui : Pouvez-vous présenter à nos lecteurs ?

Aboubacar Sidiki Fomba : Je suis Aboubacar Sidiki Fomba, ophtalmologue de formation. Je suis le président de l’Alliance démocratique du peuple malien (Adepm) et également le président du Front social de l’opposition. Aussi, j’assure le rôle de porte-parole de la Coalition pour le renouveau politique (Crp) ainsi que le poste de 2ème vice-président du mouvement “Le Mali avance”.

Justement, de l’ophtalmologie à la politique, comment avez-vous réussi la transition ? 

Vous savez que c’est très simple. Nous sommes dans un pays où tout le monde doit s’intéresser à la vie de la nation en nous disant que lorsque nous sommes des fonctionnaires sans une bonne politique, nous risquerons de nous retrouver dans la rue. Nous sommes conscients que nous avons contracté une dette auprès du contribuable malien parce que ce sont ses impôts qui ont permis de nous former et aujourd’hui ce sont les impôts du même peuple qui constituent nos salaires. C’est inconscient et insouciant de voir notre pays dans l’état dans lequel il se trouve et ne pas s’engager dans la politique et faire comme si de rien n’était. Nous nous sommes engagés dans la voie politique pour servir ce pays et non pour se servir. Aussi, faire en sorte que les jeunes maliens puissent se prendre en charge et non se servir de la politique pour s’enrichir. Donc, le fait de s’engager dans la politique est un engagement patriotique parce qu’il vise à payer la dette que j’ai contractée auprès du contribuable malien.

Il y a quelque temps, vous avez procédé au lancement de la création de la Coalition pour le renouveau politique (Crp), pourquoi ce regroupement de plus ?

Cette coalition est née d’un constat parce que durant 27 ans d’exercice démocratique où nous avons assisté à un montage institutionnel à une démocratie de façade. Vous constatez avec moi que notre démocratie se résume à l’organisation d’élections entachées de fraudes et d’irrégularité de toutes sortes. Aussi, la Cour constitutionnelle spécialisée dans l’annulation des voix sans en préciser les critères. Vous savez, nous vivons dans une démocratie importée dans laquelle on nous fait croire que c’est l’occident qui est la solution à tous nos maux et en même temps la source de tous nos malheurs. Cette démocratie même a donné l’impression aux religieux qu’ils constituent l’un de ses piliers. La démocratie sous laquelle nous vivons a également contribué à l’enrichissement de plusieurs personnalités politiques par des voies frauduleuses donnant ainsi l’impression que la politique est le moyen d’enrichissement le plus rapide.

Avec tous ces constats, nous pouvons dresser un tableau sombre de notre pratique démocratique en matière de sécurité, de santé, d’éducation et de façon générale de gouvernance. Aux vues de ce constat, nous avons décidé de nous mettre ensemble afin de créer ce regroupement dénommé la Coalition pour le renouveau politique (Crp) qui est constituée de plus de vingt partis politiques et plus d’une trentaine d’organisations de la société civile. Cette coalition s’inscrit dans le cadre de la rupture et de la refondation. Nous allons faire en sorte que notre démocratie soit basée sur la reformulation de la conscience politique adoptée à nos réalités socioculturelles. Nous allons faire en sorte que notre armée soit la première puissance de la sous-région en mettant en place une politique éducative permettant à l’accès à l’éducation à tous les enfants du Mali. Cette politique éducative permettra en même temps l’apprentissage dans la langue française et dans une autre locale de notre pays. En ce qui concerne le salaire des fonctionnaires maliens, nous prévoyons une augmentation conséquente des salaires en fonction du coût de la vie afin de permettre aux travailleurs maliens de vivre dignement des fruits de son travail.

Sur le plan du développement de l’agriculture, nous allons de façon à avoir instauré une agriculture économique et famille permettant à nos populations de vivre normalement. En dépit de cela, dans le domaine de la santé nous allons agir afin de faire en sorte que le Mali puisse instaurer l’assurance maladie universelle pour que le tailleur du bout de la rue, l’ouvrier qui se trouve dans son atelier ainsi que l’ouvrier qui pousse son pousse-pousse puissent avoir sa carte d’assurance maladie universelle afin de lui permettre de bénéficier les prestations sanitaires au même titre que les fonctionnaires. Nous comptons également mettre en place un cadre permanent de dialogue autour des préoccupations des organisations syndicales afin d’éviter les mouvements de grève.

Pour le problème récurent du nord, nous allons prendre des dispositions particulières pour une résolution définitive de la crise sécuritaire qui secoue cette partie du pays. Vous savez, le président IBK a trahi l’esprit de l’accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger. Car, l’accord prévoyait l’instauration d’une véritable politique de régionalisation. Nous pensons qu’avec cette politique de régionalisation, nous pouvons créer beaucoup plus d’emploi en permettant à chaque région de travailler et de bénéficier des retombées de l’exploitation de ses ressources.

Nous allons aussi faire en sorte que l’accord soit un accord des Maliens, car discuté au Mali et uniquement entre les Maliens. Et quelles que soient les modifications apportées que celles-ci soient apportées par le peuple malien à travers un dialogue inclusif, même si Iyad Agali ou encore Amadou Kouffa souhaite faire partir de ce cadre de dialogue, nous allons les accepter sur la table de négociation. Mais, tout cela doit se faire à travers une justice équitable. Nous voulons mener une lutte implacable contre la corruption. Pour cela, il convient de sauvegarder l’intégrité physique et morale des travailleurs. Nous constatons qu’au Mali, les travailleurs sont plutôt dans un état de survie, mais ils ne vivent pas. Nous prévoyons des salaires pour les élus locaux au lieu qu’ils perçoivent une indemnité. Avec tous ces projets, les ouvriers verront leur salaire augmenté. Vous n’avez jamais entendu parler de l’augmentation des salaires des ouvriers, mais il faut mettre en place des stratégies pour améliorer les conditions de vie des ouvriers.

Aussi, nous allons adopter des politiques pour que les fonctionnaires maliens ne prostituent plus pour être ministres ou pour occuper des postes de responsabilité. Nous allons chercher les cadres intègres et compétents où qu’ils se trouvent pour les nommer à des postes de responsabilité. Pour les Maliens de la Diaspora, nous comptons faire en sorte qu’un quota soit réservé à ceux-ci à l’Assemblée nationale. Ainsi, nous souhaitons que ces Maliens représentés au niveau des Consulats, des Ambassades, de toutes les représentations diplomatiques et de tous les départements ministériels afin de partager leur expérience avec ces différentes structures. Voilà en quelque sorte, le projet de société ou la feuille de route qui nous a conduits à la création de la coalition. Cette feuille sera mise en œuvre par le candidat de la coalition Mamadou Oumar Sidibé. Nous avons fixé des critères pour le choix. Ainsi, la jeunesse n’est pas le critère d’un bon leader. Le bon leader c’est quelqu’un qui a le leadership et la probité morale. C’est aussi quelqu’un qui est exemplaire et travailleur qui a un programme pertinent. Et c’est sur cette base de ces critères que la coalition a jeté son dévolu sur Mamadou Oumar Sidibé, président du Prvm-Fasoko. Il est notre candidat et il l’a déjà accepté, nous allons travailler dans ce cadre.

Nous avons également apporté plusieurs innovations pour faire en sorte que désormais les partis politiques vont travailler ensemble à toutes les échéances électorales notamment les élections législatives, régionales et communales. Cela de permettre à notre coalition d’avoir une majorité confortable à l’Assemblée nationale pour la mise en œuvre de notre projet de société. Nous savons déjà qui peut être maire, député ou ministre. La coalition est ouverte à toutes les personnes partageant notre vision.

Vous avez choisi un candidat différent de l’actuel président IBK, cela voudrait dire que vous vous inscrivez déjà dans pour une alternance en 2018 ?   

Nous avons dit que nous sommes pour l’alternance en 2018. La Crp n’est pas un obstacle pour une candidature unique de l’opposition. Mais, nous n’attendons pas par alternance une alliance des partis politiques de l’opposition contre le président IBK parce que nous savons tous qu’il a échoué sur tous les plans. Le bonheur des Maliens s’est transformé en leur malheur. La pauvreté de la population est le constat le plus amer. Le président de la République lors de la campagne avait promis le grand bonheur aux Maliens. Aujourd’hui les Maliens n’ont pas d’eau ni électricité. Aujourd’hui, l’état de l’école malienne reste à désirer, car nous avons des élèves qui sont en possession de stocks d’armes blanches et d’armes à feu. C’est encore plus grave. Aussi, cela fait combien d’années que les professeurs n’ont pas dispensé de cours ?

Le bonheur promis aux Maliens a donné lieu à des grèves de plus de 38 jours des agents de santé avec son corolaire de plus mille morts des personnes qui ont voté pour IBK. Ce président de la République qui avait promis de construire une armée forte pour le Mali. Cependant, la seule année de 2017, nous avons enregistré plus de 736 soldats tués du fait de l’insécurité. Le même président de la République qui lorsque nous lui avons confié le Mali, l’armée régulière était à Kidal. Aujourd’hui, nos forces armées et de défenses complètement absentes de Kidal ainsi de plusieurs localités du centre de notre pays.

Par l’incapacité de l’actuel régime qui avait pourtant promis la paix et la sécurité, nous avons perdu le centre. Aujourd’hui, nous n’avons plus la paix ni la sécurité au Mali. En temps, le gouvernement nous a parlé des 200 000 emplois promis par le président IBK lors de la campagne électorale de 2013, mais la réalité desdits emplois était de mobiliser plus de 250 milliards de FCFA pour créer un millier d’activités qui à leur tour vont produire les 200 000 emplois à travers les BTP, l’éducation… est-ce que cela est fait aujourd’hui ? Quand je vois le ministre en charge de l’emploi se pavaner en comptant des centaines de milliers d’emplois soi-disant créés. Ainsi, ils ont même oublié qu’ils avaient prévu de mobiliser 250 milliards de nos francs afin de produire ces emplois.

Ce qui est encore plus c’est la construction par le président de la République d’une maison pour les Maliens de l’extérieur, mais pour faire dedans alors qu’au même moment, il avait promis la création d’une banque pour nos concitoyens établis en dehors de nos frontières. Je pense que ce projet est déjà dans les oubliettes. Nous pensons que si les Maliens sont réellement conscients de la gravité de la situation, le président IBK ne doit même pas être dans les cinq premiers lors de la prochaine présidentielle. Pour nous, il n’est pas opportun d’aller à une candidature unique contre le président, car il a échoué sur toute la ligne. Avec ce bilan sombre, le président IBK est déjà disqualifié pour la présidentielle de 2018.

Les partisans de l’actuel président sont en train de lui attribuer la paternité de l’échanger de Ségou et la route de Koulikoro, c’est faux nous connaissons les initiateurs de ces projets quand bien même que l’État serait une continuité. Comprenez que le peuple malien n’est pas dupe. Pire, ce même président de la République qui avait précisé dans son programme de préparer le départ de la mission onusienne au Mali, mais malheureusement, les Maliens ont assisté au renforcement du mandant de cette mission.

IBK qui avait dénoncé que des soldats étrangers nous protègent sur notre propre territoire et c’est le même IBK qui a accepté signer un accord de défense avec la France qui détermine la réactivité de notre armée sur notre territoire, chose que tous ses prédécesseurs avaient refusé. Le président qui avait dit en son temps qu’il ne va jamais discuter avec les hommes en arme, aujourd’hui c’est ce même président qui partage des repas avec des hommes en arme. Le président est un tellement contradictoire qu’il constitue plus un vrai challenger pour les prochaines élections. C’est pour cela que nous insistons sur l’organisation d’élections crédibles et transparentes le 29 juillet, car le président sortant ne fait pas le poids. Raison pour laquelle nous avons dit que nous ne voulons plus de ces cartes Nina. Nous proposons la confection des cartes simples avec des photos afin de permettre aux Maliens de voter. Le gouvernement avait dit également qu’il va commander des tablettes, l’opposition a estimé que c’est une bonne chose, mais compte tenu de l’urgence c’est impossible parce que ces tablettes coûteront plus de 35 milliards de nos francs. Ainsi, nous les avons demandés de faire l’économie de tout cela.

Ce qui est plus scandaleux c’est que les agents de l’armée sont recrutés sur la base de la carte Nina, sachant bien que celle-ci constitue d’énormes problèmes. La question que l’on se pose est de savoir à quelle fin ? Pourquoi cette discrimination ? Pourquoi conditionner le recrutement à la carte Nina ? Tous ces éléments prouvent que le président IBK doit partir. Il faut une alternance pour amener la rupture. Si deux opposants se retrouvent au second tour de l’élection présidentielle, qu’es-ce qu’il faut faire, donc la question doit être beaucoup plus étudiée. Nous ne pensons pas qu’il faille aller à la candidature unique puisque tous ces candidats peuvent mieux faire que le président de la République.

Avez-vous un message à l’endroit du peuple malien ?

Le message que j’ai à l’endroit du peuple malien c’est d’attirer l’attention de la jeunesse malienne sur le fait que la jeunesse n’est pas forcement le critère de bon leader. Donc, dire à la vieille génération de ne pas se présenter à l’élection présidentielle est un facteur discriminatoire. Travaillant à éviter les conflits générationnels en plus des conflits ethniques. La jeunesse doit encore plus travailler. Je pense que le candidat le plus âgé en 2013 a bénéficié du soutien des candidats les plus jeunes, mais cela ne lui a pas empêché d’échouer. Je demande à tous les candidats qu’ils soient vieux ou jeunes que le Mali a besoin d’un candidat rassembleur, un candidat qui travail avec la jeune génération et les femmes à travers un programme pertinent comme celui que nous avons. Je voudrais rappeler que la politique n’est pas de l’animosité. Certes, le président IBK a échoué, je ne doute pas de son patriotisme, mais il a été incapable à conduire les affaires du pays. Nous n’allons pas donner une prime à l’incapacité. La seule chose qu’il peut faire c’est d’organiser une élection crédible et transparente le 29 juillet prochain. Après, ces élections que les Maliens fêtent enfin la fin de la traversée du désert qu’ils ont commencée en septembre 2013 avec l’avènement du régime IBK.

J’invite l’ensemble du peuple malien à se donner la main pour éviter les conflits interethniques que nous sommes en train de vivre dans certaines localités de notre pays suite à l’incapacité de l’actuel régime. De faire en sorte que ceux qui ont vécu ensemble pendant des millénaires puissent continuer à vivre ensemble dans la quiétude et dans la paix. J’invite également le président IBK à tirer toutes les conséquences de son bilan négatif afin d’organiser des élections crédibles et acceptées de tous.

    Réalisée par Boubacar PAÏTAO

Source: Aujourd’hui-Mali

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