Tenu sur fond de boycott avec des recommandations taillées sur mesures, le Dialogue inter-Maliens est progressivement dénudé et révèle de jour en jour des limites objectives par l’incapacité à réconcilier les Kamites et les musulmans.
C’est du moins l’impression qu’inspire la Fatwa prononcée par la Conférence nationale des Ulémas, l’autorité suprême du Haut Conseil Islamique du Mali en matière d’interprétation et d’élucidation théologiques et doctrinaires. Les quatre-vingts érudits issus des différentes régions du Mali ont rendu publiques les conclusions de leur conclave tenu le 31 Mai dernier à Bamako, suite à leur saisine à plusieurs reprises par des particuliers, des associations et des membres de la communauté musulmane aux fins de clarifier la position de I’lslam à l’égard de la secte Kamites. Les Ulémas ont ainsi rendu leur verdict sous la forme de fatwa qui qualifie le kamitisme de secte dont l’hostilité à l’islam se traduit par la négation de ses piliers, de la croyance en «Dieu, ses anges, ses livres, en ses messagers». Il en résulte que les Kamites sont assimilables à des infidèles ou «Kafr», selon l’Islam dont le rejet peut se manifester par l’interdiction pour le musulman de contracter un mariage avec les adeptes de cette doctrine en raison de leurs mécréance. «Il n’est pas permis de contracter ou de maintenir un mariage entre un homme Kamite et une femme musulmane. Ni entre une femme Kamite et un homme musulman», mentionne le verdict rendu public, ajoutant qu’il n’est pas admissible non plus qu’un musulman prie pour une personne appartenant à cette secte en cas de décès, assiste à ses funérailles ou hérite de son legs et vice versa.
Tout en ouvrant la porte de la repentance aux adeptes Kamites, l’instance suprême de la religion musulmane appelle les fidèles à se méfier des appels et des idées malicieuses véhiculées par les Kamites. Il va sans dire que les clivages inter-religieux ont de beaux jours devant eux et risquent d’affecter la cohésion sociale jusqu’à l’échelle des liens familiaux si la fatwa des oulémas devait être respectée dans toute sa teneur. Et dire qu’un tel péril menace le tissu social malien dans la foulée d’un Dialogue inter-Maliens censé réconcilier les composantes du peuple et présenté comme tel par des autorités en deçà de leurs attributs de garantes de la cohésion nationale. Manifestement, les résultats du Dialogue se comptent moins en termes d’unité nationale qu’à l’aune des gains en durée de la Transition et ambitions politiques au sommet.
Amidou Keita