L’audition de Moussa Sinko Coulibaly, leader du parti « Ligue Démocratique pour le Changement », jeudi 10 octobre, au camp I de la gendarmerie, sur instruction du procureur du tribunal de la commune V. Tel est l’unique thème de cette interviou que le Chef de l’Etat nous a accordée, samedi dernier, dans sa résidence privée de Sébénikoro. Entretien.
Mr le président, au sortir de 7 heures d’interrogatoire, jeudi dernier, Moussa Sinko Coulibaly semble avoir nié, devant les médias, qu’il avait, dans ses tweets, appelé à « mettre fin à ce régime incompétent pour abréger la souffrance du peuple ».
Et qu’est-ce qu’il a raconté aux scribouillards, cette fois ?
Qu’il « respecte des lois de la République, qu’il respecte la constitution et qu’il sait que le peuple est avec lui. Qu’il est confiant que l’aspiration profonde de la nation doit avoir une réponse appropriée et aujourd’hui, c’est nous qui proposons les vraies solutions ».
Tout ça, ce sont des bobards de politiciens. S’il respecte la constitution qui stipule que le coup d’état est un crime imprescriptible, allait-il appeler à mettre fin à mon régime ? Et par quel moyen sous-entend-t-il, si ce n’est pas par un putsch ? A ce que je sache, il me reste encore quatre ans pour boucler mon second mandat.
Donc, selon vous, Mr le président, il a tenté de noyer la vérité dans une déclaration politique …
Il était coincé, pardi ! Parce que s’il confirmait les propos contenus dans son tweet, il risquait de se voir accusé de vouloir renverser les institutions de la République par un putsch, une insurrection ou par un appel à la révolte.
Donc, pour sauver sa peau, il a servi une déclaration politique aux journalistes. Lesquels, d’ailleurs, n’ont pas eu la présence d’esprit de lui poser la question suivante : Mr Sinko, comment entendez-vous mettre fin à un régime, dont le mandat se poursuit jusqu’en juillet 2023 ?
Mais aucun des gratte-papiers présents, devant le camp I de la gendarmerie, ne lui a posé cette question.
Donc, après son audition, cette affaire est terminée, classée ?
Pas du tout ! Ce n’est que le début, voire le début du commencement.
C’est quoi la suite ?
La suite, c’est qu’il a deux choix : arrêter ses critiques acerbes contre mon régime, ou se voir condamner pour atteinte à la sureté de l’Etat. Car dans ces deux tweets, il a été on ne peut plus clair. Dans le premier, il a écrit : « Il est impérieux de mettre fin à ce régime incompétent pour abréger la souffrance du peuple » ; tandis que dans le second, diffusé après les évènements douloureux intervenus à Boulkessi et à Mondoro, il ajoute : « Ma consternation est grande. La nation est meurtrie par l’incompétence du régime d’une médiocrité à nulle autre pareille. Il est temps de trouver les moyens de mettre fin à cette gouvernance scabreuse ».
Comme on le voit, dans un cas, comme dans l’autre, il a appelé à renverser mon régime. Par tous les moyens. Il ne peut être plus clair. Alors, au lieu de demander aux autres de retourner sur les bancs de l’école parce qu’ils n’auraient pas compris sa pensée, c’est plutôt lui qui doit retourner sur les bancs.
Moi, j’ai fait mes humanités à la Sorbonne. Les belles lettres, ça me connaît. Même quand je mange avec la main droite, j’ai la main gauche posée sur le dictionnaire Larousse. Donc, il parle, peut-être, du procureur qui a instruit à la gendarmerie de l’entendre sur P.V (Procès Verbal) ; mais pas du « Sorbonnard » que je suis.
Si je vous ai bien compris, Mr le président, Moussa Sinko Coulibaly est reparti, libre, chez lui ; mais il n’est pas, pour autant, libre…
C’est bien cela ! Moussa Sinko Coulibaly est, pour l’instant, libre ; mais il est en liberté surveillée. A la moindre déclaration, appelant à « mettre fin à mon régime », il se retrouvera au gnouf.
Est-ce vous, Mr le président, qui avez donné l’ordre au ministre de la Justice d’instruire à la gendarmerie de l’auditionner ?
Pas du tout ! Ce que nombre de Maliens ignorent, c’est que les procureurs peuvent interpeller n’importe qui se serait rendu coupable de déclarations, susceptibles de mettre en péril les institutions de la République. C’est le rôle des procureurs de faire régner l’ordre dans le pays.
C’est vous dire que, désormais, la récréation est terminée !
Les langues fourchues racontent que c’est le général Moussa Sinko Coulibaly, chef de cabinet du capitaine Amadou Aya Sanogo, qui vous a présenté au chef de la junte militaire d’alors …
Ah bon ? Je ne me rappelle plus de cette époque.
Il paraît que c’est lui qui vous a présenté à Aya comme le candidat qui pouvait faire l’affaire de la junte militaire.
Je vous le répète : je ne me rappelle pas avoir été présenté à qui que ce soit comme étant le candidat de la junte. Ce qui est, par contre, clair, à la présidentielle de 2013, j’étais le candidat de tous les Maliens. Ou presque.
Propos recueillis par Le Mollah Omar
Canard Déchaîne