En attendant, le personnel licencié demande à être remis dans ses droits
L’Huilerie cotonnière du Mali (Huicoma), la plus grande huilerie cotonnière d’Afrique de l’ouest avec une capacité de plus de 340.000 tonnes de graines par an, a été créée en 1979 par la CMDT (Compagnie malienne de textile) qui en assure la gestion jusqu’en 1998 où une nouvelle direction autonome est nommée. Ces activités étaient orientées selon 2 filières : graine de coton : huiles végétales (enrichie en vitamine A), savon et aliments bétail ; beurre de karité : beurre de karité raffiné et produits de soins de beauté et cosmétiques (savons, crème et lait hydratant).
Huicoma possède trois usines de production localisées dans différentes régions du Mali avec une production annuelle de plus de 40 000 tonnes d’huile raffinée de coton ; 15 000 tonnes de savon et plus 230 000 tonnes d’aliment bétail. Société anonyme d’économie mixte au capital de 16,5 milliards de Fcfa, Huicoma emploie 855 personnes à plein temps et 300 saisonniers. En décembre 2002, suite aux recommandations de la Banque mondiale, l’Etat malien qui détenait 96,13 % du capital de la société, décida de n’en conserver que 12%, cédant 84,13% à un opérateur stratégique privé. C’est ainsi que Huicoma fut rachetée par l’entrepreneur Aliou Tomota. Aujourd’hui, l’entreprise est en piteux état.
Lors d’une visite à Koulikoro, il y a une dizaine de jours, le ministre de l’Industrie et de la Promotion des Investissements, Moustapha Ben Barka, a rencontré le personnel licencié de Huicoma. Ils étaient une trentaine, dans la salle de conférence du gouvernorat, venus répondre à l’appel du ministre qui a évoqué la possibilité d’une relance de l’usine.
« Nous voulons vraiment cette relance. Mais on veut avant tout une récupération de nos droits », a souligné Nienzé Sanogo. Cela fait 52 mois que le personnel de l’usine a été licencié. « Aujourd’hui l’espoir de tout le monde s’est envolé à cause de cette privatisation sauvage qui a causé le licenciement de 197 ouvriers de Koulikoro et de 495 au total dans les trois usines sur l’ensemble du territoire », a déploré cet ex-ouvrier de Huicoma.
A sa droite, un quadragénaire se lève et enchaîne : « Ici on a soif, on a faim » avant de lancer : « remettez-nous dans nos droits ». Le problème de Huicoma a fortement bouleversé la ville de Koulikoro, a-t-il ajouté. « Nous avons perdu beaucoup de nos camarades ouvriers parce qu’ils n’avaient plus de moyen de subsister. Certains ont abandonné la ville en choisissant le chemin de l’exil ».
« On se considère comme des morts », a déclaré Daouda Diallo, un ancien ouvrier, avant d’ajouter : « quand on pas sa dépense quotidienne, on devient un homme incomplet qui ne peut rien assumer ». Ce sont nos femmes qui détiennent le contrôle de la famille. Elles sont devenues des chefs de famille. « Ce sont elles qui nous logent, nous nourrissent et nous habillent. Nous n’avons plus de dignité parce qu’nous sommes incapables de nous acquitter des frais de scolarité de nos enfants et incapables d’assurer le quotidien de la famille et de payer des frais de location » témoigne-t-il. A défaut de partir en exode beaucoup se sont mis à l’exploitation de sable et de gravier dans le lit du fleuve Niger.
Le problème de Koulikoro est pire que celui qui prévaut aujourd’hui au nord, estime-t-il. Parce que, justifie-t-il, plus de 27 divorces ont été prononcés suite à la fermeture de Huicoma. « Moi qui vous parle, j’ai perdu ma femme. Elle est partie parce que je pouvais plus l’entretenir ». Son voisin est dans le même cas. Ils ont tous les deux été quittés par leurs épouses. Il y avait tellement de sollicitations de divorce que le procureur avait décidé de ne plus recevoir les intéressés, raconte-t-il.
Un jeune homme, les larmes aux yeux, s’adresse au ministre : « Monsieur le ministre on ne sait plus quoi dire ni que fai
source : essor