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Forum sur l’avenir du travail : COMMENT FAIRE FACE AUX MUTATIONS POUR LE TRAVAIL DE DEMAIN ?

Les crises sécuritaires et environnementales, l’introduction de nouvelles technologies, la croissance démographique sont autant de facteurs qui perturbent le monde du travail

Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta, a marqué de sa présence l’ouverture officielle du Forum national sur l’avenir du travail. C’était hier au Palais de la culture Amadou Hampaté Ba, en présence du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga, des membres du gouvernement, des présidents des institutions de la République et des représentants du corps diplomatique.
Ce forum qui s’achève aujourd’hui regroupe Etat, travailleurs, patrons et, bien sûr, société civile. Il a été l’occasion pour le chef de l’Etat de souligner que l’évolution de nos sociétés, engendrée par les mutations technologiques et le poids démographique croissant, nous impose de réfléchir et de nous projeter dans l’avenir car notre pays ne doit pas être surpris. Pour le président Keita, il s’agit d’un important forum qui doit aboutir à des résultats probants.
Ce forum sur l’avenir du travail est l’occasion de poser des jalons afin d’assurer le plein emploi, l’extension de la protection sociale aux couches sociales les plus défavorisées et de maintenir un dialogue social crédible. L’Organisation internationale du travail (OIT) estime que le monde aura besoin de 600 millions d’emplois dans les décennies à venir pour générer une croissance durable et maintenir la cohésion sociale. L’emploi des jeunes et des femmes est devenu une préoccupation majeure pour les gouvernements. L’accès au marché du travail est inégalitaire et le taux élevé de chômage est caractérisé par la discrimination dans l’emploi et la profession. La précarité de l’emploi est aussi une préoccupation majeure pour le monde entier et particulièrement pour notre pays qui se relève d’une crise multidimensionnelle.
Pour le ministre du Travail et de la Fonction publique, chargé des Relations avec les institutions, le travail décent se résume en la possibilité d’exercer un travail productif et convenable rémunéré dans des conditions de sécurité et de santé sur le lieu de travail, assorti d’une protection sociale garantissant la dignité. Le travail décent est le point de convergence de quatre objectifs stratégiques, à savoir les normes, principes et droits fondamentaux au travail, l’emploi, la protection sociale et le dialogue social. Les crises sécuritaires et environnementales, l’introduction de nouvelles technologies, la croissance démographique, sont des facteurs qui continuent de perturber le monde du travail et de rendre les emplois inaccessibles.
A ce propos, Mme Diarra Racky Talla a expliqué que le chef de l’Etat a très tôt compris que la question de l’emploi méritait une réponse idoine, sans occulter aucune couche sociale. C’est ainsi que le candidat à l’élection de 2013, Ibrahim Boubacar Keïta, a promis 200.000 emplois au cours de son mandat. Cet objectif a été atteint et même dépassé, a-t-elle indiqué.
Le secteur du développement rural a bénéficié de 15% du budget national, de la subvention des tracteurs, des engrais, des semences, de l’aménagement des centaines de milliers d’hectares dans la zone Office du Niger, du développement de la pisciculture, de l’aquaculture et de l’amélioration des races bovines, à travers des dons de semences animales pour accroitre la production bouchère et laitière. Dans le secteur de la formation professionnelle, des dizaines de milliers de jeunes ont été initiés à des métiers, dotés de kits et très souvent bénéficiant de financements octroyés par le ministère en charge de l’Emploi. Mme Diarra Racky Talla a aussi rappelé que malgré la crise, le SMIG a été substantiellement augmenté de 28 460 F à 40 000 Fcfa.
Yacouba Katilé, secrétaire général de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM), a rappelé que le président de la République a consenti beaucoup d’efforts pour les travailleurs salariés et ceux du monde rural. Pour lui, l’option du chef de l’Etat pour un travail décent, au-delà de la satisfaction des besoins quotidiens, n’est malheureusement pas perçue par certains hauts cadres à la tête des directions des services centraux et nationaux.
Cependant, Yacouba Katilé a dénoncé certaines situations dans le pays. «Le non respect du droit et de la liberté d’exercer une activité syndicale se généralise et les velléités sont férocement réprimées. Des entraves ont été érigées pour empêcher l’exercice du mandat dont sont investis des responsables syndicaux», a-t-il dit ajoutant que le plus étrange, est l’anti syndicalisme manifeste dans les services et entreprises privés comme si le Mali est un microcosme livré au non droit et aux abus.
Bientôt, l’OIT commémorera ses 100 ans, a annoncé notre compatriote Dramane Haïdara, directeur du bureau pays de l’OIT. Dans cette optique, le directeur général du BIT, Guy Ryder, a lancé depuis 2015, «l’initiative du centenaire sur l’avenir du travail».
Celle-ci est basée sur la reconnaissance qu’une transformation du monde est à l’œuvre dans tous les pays du monde et sur l’impérieuse nécessité pour l’OIT de comprendre et réagir efficacement à ces changements afin de faire progresser son mandat en faveur de la justice sociale.
En Afrique, plus de 29 dialogues nationaux sur l’avenir du travail ont été organisés autour de quatre thèmes : le travail et la société ; des emplois décents pour tous ; organisation du travail et de la production et la gouvernance du travail. Ils ont fait ressortir des messages très importants comme le rapport entre le travail et la société. Les formes de travail traditionnelles, enracinées dans la communauté et basées sur les principes de la mutualité, de la solidarité et de la réciprocité, dominent toujours le monde du travail en Afrique.
De plus, avec les conditions économiques difficiles et les réalités sociales, la majorité des gens travaille pour la simple survie et pour satisfaire les besoins élémentaires. Dans cette optique, les emplois instables et non permanents sont la norme plutôt que l’exception en Afrique.
Nombre de travailleurs sont engagés dans le travail saisonnier ou temporaire ou opèrent comme des micro-entrepreneurs ou des entreprises familiales. Cela nécessiterait des programmes communautaires de développement économique local, s’appuyant sur des principes coopératifs et le renforcement des réseaux sociaux. Le monde du travail se transforme avec la 3è révolution industrielle qui a créé la distribution et provoqué aussi la naissance d’un mono système économique fondé sur le partage et les communautés collaboratives, a expliqué Mamadou Sinsy Coulibaly, président du patronat malien. Cette période de transition voit la disparition progressive du capitalisme classique et la naissance d’une économie de production dont le coût marginal, tend vers zéro.
«L’entreprise n’est plus au centre de la création de la richesse, on deviendra tous mi-producteurs mi-consommateurs», a-t-il averti. «Nous devons retenir que le code du travail n’est pas le code de l’emploi. Le droit du travail n’est pas un droit au marché du travail. Il faut libérer les employeurs des contraintes. Aucun dirigeant politique au monde n’a, aujourd’hui, un plan B pour l’avenir du travail. Le monde de demain appartiendra à ceux qui savent s’adapter… », a-t-il ajouté.
Youssouf DOUMBIA

 

Source: Essor

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