Hawa s’était rendue compte qu’elle avait perdu l’homme de sa vie, s’était mise à le reconquérir. Mais les deux n’avaient écouté que leurs sentiments, rencontrant froideur et mépris des enfants qui menaçaient d’arrêter la perfusion financière.
L’histoire du couple avait pris fin sur une succession de malentendus, sur des bêtises dus à un contexte économique défavorable. Ali et Hawa s’étaient disputés à cause de questions d’argent, comme généralement dans les couples à travers le monde. Le mari avait lâché le morceau en trouvant sa seconde moitié ruineuse qui à son tour le jugeait inapte au mariage parce que trop pauvre pour entretenir une femme digne de ce nom. Faute de concessions de part et d’autre le couple s’est sclérosé. Les longues absences nocturnes de la maison de l’un et de l’autre du reste injustifiées alimentaient les suspicions et une froide cohabitation qui ont finalement tué l’amour. Chacun se désintéressait de l’autre, n’en faisait qu’à sa tête, s’éternisait en reproches acerbes. Au point que à la moindre divergence d’opinion, l’un se retranchait dans une chambre et en interdisait l’accès à l’autre. Tous les signes avant coureurs de la séparation étaient réunis. Les deux n’étaient plus à mesure de préserver la vie en couple.
Lointaines émotions fortes
Ces problèmes avaient conduit au divorce. Pourtant la séparation une fois consommée, Hawa repensait les bons moments passés ensemble : des émotions fortes. Pas qu’elle n’avait pas tenté de refaire une nouvelle vie, mais la chance ne l’avait pas sourit. La file des prétendants dégrossissait au fur et à mesure que les semaines passaient. De déboire en déboire, elle s’était longtemps gardée dans un premier temps de sonder les intentions de son ex- mari avant de se jeter finalement à l’eau. Elle était parvenue à force de recherches à obtenir son contact téléphonique grâce au concours appréciable d’une femme, un peu plus jeune, qui peinait de la voir malheureuse. Hawa s’est rendue compte qu’elle a perdu l’homme de sa vie, elle s’était remise à reconquérir l’amour de sa vie. Cependant vouloir refaire sa vie avec son ex- mari n’est pas une mine affaire, 35 ans après le divorce. Elle avait présenté ses excuses et était parvenue à convaincre son ex du retournement de situation, de sa volonté de revenir vivre à ses côtés. Ali, qui vivait seul après le décès de son épouse, en était très enthousiaste, souriait au vent qui agitait les feuilles d’arbre planté dans la cour.
Ni l’un ni l’autre ne se posaient des questions sur la réaction des enfants issus des secondes noces. Deux jours après son arrivée, Hawa ne pouvaient faire fi du regard réprobateur des enfants et de n’écouter que leurs sentiments. Les enfants ne n’étaient nullement enchantés par la nouvelle. Au contraire, ils convoquaient une réunion d’urgence dans la nuit consacrée à la nouvelle donne. Hawa en était écartée, sa présence était jugée choquante, dérangeante dans la famille. Le père qui n’avait eu droit à la parole que pour expliquer son geste était sommé de lui dire adieu sous peine d’arrêter leur perfusion financière et alimentaire. Il fallait opérer un atterrissage forcé. Le lendemain, elle retournait sur ses pas avec son balluchon posé sur la tête et pour seul viatique quelques billets de banque.
Pour une première fois, les deux se séparaient en bons termes. Passer à côté d’une possibilité de construire une belle histoire serait une déception. Ils ont eu au moins l’audace de tenter une nouvelle aventure plus solide qu’auparavant et qui s’est heurtée au bloc de granit des enfants.
Georges François Traoré
Source: Journal L’Informateur- Mali