Chers amis,
Toute base de liens solides d’amitié entre les peuples, y compris entre les Russes et les Maliens, est fondée sur la compréhension mutuelle et la connaissance de l’histoire des uns et des autres, ainsi qu’également surtout les événements qui ont eu le plus grand impact sur la vie et le destin d’un nombre immense de personnes.
Dès les premiers jours à Bamako, j’ai ressenti la profonde sympathie des citoyens maliens pour la Russie, l’intérêt sincère envers son histoire. Cela m’a incité à écrire pour tous ceux qui cherchent à mieux comprendre mon pays, un texte sur une épreuve difficile qui a laissé une trace indélébile dans la mémoire de nombreuses générations russes.
Le 1er septembre 2019 a marqué le 80eme anniversaire du début de la Seconde Guerre mondiale, qui a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances.
Il est presque impossible de trouver une telle famille soviétique, qui n’aurait connu l’amertume des pertes et l’angoisse du deuil pendant cette guerre épouvantable. Quant à la mienne, en septembre 1941, en défendant la ville de Leningrad, a péri le père de ma mère, mon grand-père Nikolaï Leonov. Deux frères de mon grand-père paternel Fedor et Alexei Gromyko ont été tués sur le front biélorusse. A cette longue liste je peux également rajouter qu’un troisième frère a été grièvement blessé lors des combats.
- du fardeau de la guerre est tombée sur les citoyens de l’URSS.
Sur le front de l’Est, les forces armées soviétiques ont détruit, capturé ou vaincu 506 divisions allemandes pendant cette guerre qui a duré quatre longues années. En outre, 100 divisions des alliés du IIIeme Reich ont été également détruites. Il convient de noter que tous les alliés de l’URSS dans la guerre, pris ensemble, ont vaincu en Europe occidentale et en Afrique du Nord seulement 176 divisions au plus.
Le déclenchement des batailles féroces sur le front de l’Est a été la conséquence de l’inexorable approche du IIIe Reich aux frontières de l’Union soviétique. Dans une plus large mesure, l’expansion de l’Allemagne vers l’est n’a pas été une coïncidence, mais une tendance.
Les termes humiliants du Traité de paix de Versailles qui a scellé le bilan de la Première Guerre mondiale, poussaient l’Allemagne à en tirer vengeance.
En exploitant l’aspiration des cercles dirigeants et des citoyens allemands de restaurer la dignité nationale, les responsables occidentaux ont essayé, en 1920-1930, de garantir la paix à leurs peuples au détriment d’autres pays.
Donc, en 1926, le pacte de Locarno a été signé, divisant les frontières de l’Allemagne en deux catégories, dont seules les frontières occidentales étaient reconnues comme intangibles.
Profitant du silence des signataires du Traité de Versailles, l’Allemagne a commencé à renforcer ces capacités militaires. En 1936, Adolf Hitler s’empare de la région du Rhin, puis de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie.
La signature de l’Accord de Munich Le 29 septembre 1938, approuvé par la France (alliée militaire de la Tchécoslovaquie depuis 1935) et l’Angleterre, a rendu réalisable la partitionnement de la Tchécoslovaquie et sa liquidation en tant qu’Etat indépendant. La Pologne et la Hongrie ont eu un rôle extrêmement répréhensible, en ayant participé avec l’Allemagne au partage de la Tchécoslovaquie.
Il est à noter que si la France avait rempli ses obligations d’allié envers Prague, le conflit aurait été prévenu à la source : les forces armées de ces deux pays étaient de loin supérieures à celles de l’Allemagne (la Tchécoslovaquie seule comptait 45 divisions, contre 47 divisions allemandes).
Le seul État européen qui s’est déclaré prêt à fournir une assistance militaire à la Tchécoslovaquie était l’URSS, mais la Tchécoslovaquie a cédé à la pression diplomatique française et anglaise.
Compte tenu de la politique de la France et de la Grande-Bretagne, dont la dernière cherchait toujours à trouver un modus vivendi avec l’Allemagne, la situation de l’URSS devenait de plus en plus compliquée. En Extrême-Orient, elle a été menacée par le Japon, participant au Pacte anti-Komintern de 1936 contre l’URSS. Dans de telles circonstances, l’URSS a frolé une guerre sur deux fronts. Par conséquent, pour parer à сette menace, l’URSS a accepté la conclusion d’un traité de non-agression avec l’Allemagne.
L’allégation, selon laquelle il s’agissait d’une pratique immorale et que le traité était contraire au droit international, n’est pas fondée. Des accords similaires ont également été conclus avec l’Allemagne hitlérienne par la Grande-Bretagne, la France, la Lituanie, l’Estonie et la Pologne: la déclaration anglo-allemande a vu sa signature le 30 septembre 1938 et la déclaration franco-allemande – le 6 décembre 1938. A l’aide de ces accords, Londres et Paris ont créé une barrière juridique pour la protection contre l’Allemagne, lui fournissant un arrière fort et renforçant ainsi le «Drang nach Osten» (francais: «Marche vers l’Est»). Il va de soi, que l’accord germano-polonais du 28 janvier 1934 portant sur le non-recours à la force armée ne différait pas du Pacte Molotov-Ribbentrop.
Quant au protocole secret du Pacte de 1939, il visait à empêcher l’Allemagne de se rapprocher des anciennes frontières de l’URSS, ainsi qu’à protéger les peuples ukrainiens et biélorusses au cas où l’État polonais cesserait d’exister. Tout cela a créé des conditions plus favorables à la défense de l’URSS.
Suite à l’attaque allemande contre la Pologne le 1er septembre 1939, les troupes soviétiques ne sont rentrées dans ce pays que le 17 septembre 1939, date à laquelle, en fait, la Pologne a cessé d’exister en tant qu’État, avec ses dirigeants hors du pays, et les troupes allemandes aux alentours des frontières de l’URSS. Les gouvernements de Grande-Bretagne et de France, ont déclaré la guerre à l’Allemagne, mais seulement sur le papier (cette période est entrée dans l’histoire comme une “guerre étrange”. Nul n’en doute doute, Ils n’ont pris aucune action lorsque la Wehrmacht était en train de détruire l’armée polonaise.
En raison des incitations tacites des pays occidentaux – garants et bénéficiaires principaux du Traité de Versailles – l’Allemagne a été capable d’attaquer successivement les pays d’Europe centrale et orientale, en ayant pour objectif une offensive massive contre l’Union soviétique selon les plans militaires du III Reich.
La défaite du nazisme a coûté la vie à 55 millions de personnes en Europe. Environ 30 d’entre eux étaient citoyens de l’Union soviétique.
Malgré la décision du tribunal de Nuremberg de condamner le nazisme en tant qu’idéologie, 80 ans plus tard, le spectre de ce régime monstrueux continue à hanter l’Europe.
Des sympathisants nazis de divers pays resurgissent à nouveau la tête. En Ukraine et dans les États baltes, les membres des groupes armés criminels Waffen-SS organisent des défilés, en Pologne, en République tchèque et dans d’autres pays européens des monuments aux libérateurs soviétiques sont démantelés, en Belgique, le gouvernement allemand verse des pensions aux complices du régime Nazi.
De plus, on a vu des tentatives qui ont été faites pour réécrire et falsifier l’histoire de la Seconde Guerre Mondiale, pour blanchir le nazisme et pour diminuer le rôle de l’URSS, ce qui s’inscrit dans une même logique sournoise qui avait jadis conduite l’humanité à sa plus grande catastrophe.
Si l’on compare les événements dramatiques des années 1930-40 avec les actions irresponsables d’un certain nombre de pays de notre époque (l’ingérence de la part de puissances étrangères dans les affaires d’ Irak, d’Afghanistan, de Libye, de Syrie et du Venezuela), il devient donc évident, que même de nos jours il n’est communément compris, que des décisions politiques amorales, la violation flagrante du droit international et certains normes éthiques conduisent tôt ou tard à un résultat, contraire à celui souhaité initialement et se retournent contre leurs «auteurs».
Igor Gromyko
Ambassadeur de la Fédération de Russie à Bamako
Source: service de presse de l’Ambassade de Russie